Il y a à peine un demi-siècle, nous commencions tout juste à explorer les planètes du Système solaire avec des sondes telles que Viking et Voyager. Aujourd'hui, nous connaissons plus de 7 000 exoplanètes et les mesures concernant leur composition et la physico-chimie de leur atmosphère sont de plus en plus à la portée des instruments de la noosphère, comme le VLT de l'ESO. Une équipe de chercheurs vient de révéler avoir détecté des vents incroyables avec des vitesses de 9 km/s, soit presque 30 fois la vitesse du son dans l'atmosphère de la Terre, avec la Jupiter chaude WASP-127b. C'est un record !
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Nous sommes en 2025 et cela fait bientôt 30 ans que Michel Mayor et Didier Queloz ont annoncé (plus précisément en octobre 1995) la découverte de la première exoplanète en orbite autour d'une étoile sur la séquence principale : 51 Pegasi b. Une découverte pour laquelle ils ont été récompensés par le prix Nobel de physique en 2019. La même année, Jean Schneider, astronomeastronome à l'observatoire de Paris, fondait la célèbre Encyclopédie des planètes extrasolaires, qui affiche en ce mois de janvier plus de 7 403 exoplanètes au compteur, celles dont l'existence a été confirmée après avoir été détectées par des satellites comme Kepler et Tess. Il s'agit dans ce dernier cas de planètes débusquées par la légère chute de luminositéluminosité qu'elles provoquent en passant devant leur soleil pour les observateurs terrestres.
Plus de trois transits sont nécessaires pour commencer à être sûr de voir indirectement une exoplanète et pas simplement une variation naturelle de la luminosité d'une étoile faisant partie de la grande famille des étoiles variablesétoiles variables surveillées par les astronomes amateurs.
Une autre technique d'observation, qui sert aussi à confirmer les découvertes faites avec transit, est celle des vitessesvitesses radiales et on peut la mettre en pratique au sol avec des télescopestélescopes qui mesurent l'effet Dopplereffet Doppler produit sur la lumièrelumière d'une étoile par son mouvementmouvement d'oscillation qui rapproche et éloigne périodiquement cette étoile de nous. Ce mouvement est le reflet de l'attraction d'une exoplanète en orbite. On peut parfois aussi imager directement une exoplanète en orbite autour de son étoile hôte. Pour plus de détails sur ces méthodes d'observation, on pourra se reporter aux vidéos du CEA sur les exoplanètes comme celle ci-dessous.
Une atmosphère planétaire possède une signature spectrale qui représente sa composition chimique, mais également sa composition en nuages et « brouillard ». Grâce à plusieurs techniques, il est possible de déterminer les caractéristiques physico-chimiques de l'atmosphère d'une exoplanète. Parmi ces techniques : le transit spectroscopique, le transit secondaire ou éclipse, l’observation spectroscopique directe de la planète ou encore l'observation de la planète à différentes phases autour de l'étoile afin de mesurer des variations temporelles et saisonnières. Partez à la découverte des exoplanètes à travers notre websérie en 9 épisodes à retrouver sur notre chaîne YouTube. Une playlist proposée par le CEA et l’université Paris-Saclay dans le cadre du projet de recherche européen H2020 Exoplanets-A. © CEA
Des exoplanètes autour de pulsars aux Jupiter chaudes torrides
Il peut être nécessaire de rappeler encore que les premières détections d'exoplanètes remontent à avant 1995 ! En effet en 1990, l'astronome polonais Aleksander Wolszczan avait commencé par découvrir, à l'aide du désormais défunt mais toujours mythique radiotélescope d'Areciboradiotélescope d'Arecibo, PSR B1257+12. Il s'agit d'un pulsar situé à une distance d'environ 2 300 années-lumièreannées-lumière dans la constellation de la Viergeconstellation de la Vierge. En 1992, en compagnie de son collègue canadien Dale Frail, il fait savoir via un article dans Nature que deux exoplanètes sont en orbite autour de l'étoile à neutronsétoile à neutrons, un cadavre d'étoile ayant par définition quitté la fameuse séquence principale où vivent les étoiles (une troisième exoplanète autour d'un pulsarpulsar a ensuite été découverte).
Un article aujourd'hui publié dans Astronomy & Astrophysics, dont une version est en accès libre sur arXiv, nous parle toutefois d'une exoplanète en orbite autour d'une étoile bien vivante et ce n'est pas la première fois que cette Jupiter chaudeJupiter chaude est sur le devant de la scène de l'actualité astronomique de la noosphère : il s'agit de WASP-127b. Comme son nom l'indique, l'exoplanète a été découverte dans le cadre de WASP (Wide Angle Search for Planets ou « recherche à angle large de planètes »), un projet de recherche d'exoplanètes par la méthode du transit astronomiquetransit astronomique mené avec deux instruments identiques installés sur les sites de deux observatoires, à savoir l'Observatoire du Roque de los Muchachos et l'observatoire astronomique sud-africain.
Nous la connaissons depuis 2016 et nous savons que cette planète gazeuseplanète gazeuse géante située à plus de 500 années-lumière du Système solaireSystème solaire est légèrement plus grande que Jupiter, mais n'a qu'une fraction de sa massemasse, ce qui implique qu'elle est « bouffie ». Point de mystère à ce sujet, elle orbite si proche de son étoile hôte que son atmosphèreatmosphère surchauffée est dilatée. Un communiqué de l'ESOESO fait savoir qu'elle a été observée de nouveau en utilisant une version upgradée du CRyogenic high-resolution InfraRed Echelle Spectrograph équipant le Very Large TelescopeVery Large Telescope (VLT) de l'ESO : CRIRES+.
Cela a donné accès aux astrophysiciensastrophysiciens à des estimations des vitesses des équivalents des courants-jetscourants-jets bien connus dans l'atmosphère de la Terre et dont on peut transposer la théorie au cas des atmosphères des exoplanètes, en raison de l'universalité des lois de la physiquephysique au moins à l'échelle de la Voie lactéeVoie lactée.
Les résultats ont été stupéfiants... Des ventsvents extrêmement puissants qui soufflent sur l'équateuréquateur de WASP-127b, et qui peuvent atteindre une vitesse de 33 000 km/h, constituent le courant-jet le plus rapide de ce type jamais mesuré sur une planète !
Des astronomes ont mesuré des vents supersoniques sur WASP-127b, une planète gazeuse géante située à environ 520 années-lumière de la Terre. Il s’agit du courant-jet le plus rapide de ce type jamais mesuré dans l’Univers, avec des vitesses allant jusqu’à 9 km par seconde. L’équipe a cartographié le climat de WASP-127b à l’aide de l’instrument CRIRES+ du Very Large Telescope de l’Observatoire européen austral (VLT de l’ESO). Pour obtenir une traduction en français assez fidèle, cliquez sur le rectangle blanc en bas à droite. Les sous-titres en anglais devraient alors apparaître. Cliquez ensuite sur l'écrou à droite du rectangle, puis sur « Sous-titres » et enfin sur « Traduire automatiquement ». Choisissez « Français ». © ESO Réalisation : Angelos Tsaousis et Martin Wallner. Montage : Angelos Tsaousis. Support web et technique : Gurvan Bazin et Raquel Yumi Shida. Écrit par : Alejandro Izquierdo López, Hanna Huysegoms. Musique : Stellardrone – Cosmic Sunrise. Images et photos : ESO / Luis Calçada, Angelos Tsaousis, Cristoph Malin (christophmalin.com), Babak Tafreshi (twanight.org). Consultante scientifique : Paola Amico, Mariya Lyubenova
WASP-127b, un laboratoire pour la planétologie comparée
On le sait parce que CRIRES+ permettait de mesurer non seulement la signature spectrale de la présence de vapeur d'eau et de moléculesmolécules de monoxyde de carbonemonoxyde de carbone dans l'atmosphère de la planète, mais aussi de se servir du décalage Doppler de cette signature pour en tirer des vitesses d'écoulement du fluide de l'atmosphère de WASP-127b.
Le communiqué de l'ESO au sujet de cette découverte contient plusieurs commentaires de ses auteurs. On peut ainsi y lire les déclarations de LisaLisa Nortmann, scientifique à l'Université de Göttingen, en Allemagne, et auteur principal de l'étude : « Une partie de l'atmosphère de cette planète se rapproche de nous à grande vitesse, tandis qu'une autre s'en éloigne à la même vitesse. Ce signal nous montre qu'il existe un vent-jet supersonique très rapide autour de l'équateur de la planète. C'est quelque chose que nous n'avions jamais vu auparavant. C'est le vent le plus rapide jamais mesuré dans un courant-jet qui tourne autour d'une planète. À titre de comparaison, le vent le plus rapide jamais mesuré dans le Système solaire a été trouvé sur NeptuneNeptune, se déplaçant à seulement 0,5 km par seconde (1 800 km/h) »
« Comprendre la dynamique de ces exoplanètes nous permet d'explorer des mécanismes tels que la redistribution de la chaleurchaleur et les processus chimiques, ce qui améliore notre compréhension de la formation des planètes et pourrait nous éclairer sur les origines de notre propre Système solaire », ajoute David Cont, de l'université Ludwig Maximilian de Munich, en Allemagne, et coauteur de l'article.
L'Extremely Large Telescope de l'ESO et son instrument Andes permettront aux chercheurs d'aller encore plus loin pour percer les arcanes des conditions météorologiques des exoplanètes car d'après Lis Nortmann, « cela signifie que nous pourrons probablement résoudre des détails encore plus fins de la configuration des vents et étendre cette recherche à des planètes plus petites et rocheuses ».