Les observations d'un groupe d’astronomes français et américains donnent une vision plus claire de la répartition du gaz interstellaire autour du Soleil. S’étendant sur presque mille années-lumière, une carte 3D a pu être dressée. Elle montre bien la Bulle locale de gaz raréfié et les « tunnels interstellaires » entre les nuages denses qui l'entourent.

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    Carte des nuages de gaz interstellaire partiellement ionisés à moins de 300 parsecs autour du Soleil dans le plan galactique. Les triangles indiquent les étoiles utilisées pour produire la carte. Les couleurs allant du blanc au noir représentent la densité croissante des gaz, et en orange les régions sans mesures fiables. La Bulle locale est représentée par la zone blanche de faible densité de gaz qui entoure le Soleil à environ 80 parsecs. Crédit : B. Y. Welsh (UCL Berkeley, Etats-Unis), R. Lallement, S. Raimond (Université Versailles-St Quentin/CNRS), J.-L. Vergely (ACRI-ST)

    Carte des nuages de gaz interstellaire partiellement ionisés à moins de 300 parsecs autour du Soleil dans le plan galactique. Les triangles indiquent les étoiles utilisées pour produire la carte. Les couleurs allant du blanc au noir représentent la densité croissante des gaz, et en orange les régions sans mesures fiables. La Bulle locale est représentée par la zone blanche de faible densité de gaz qui entoure le Soleil à environ 80 parsecs. Crédit : B. Y. Welsh (UCL Berkeley, Etats-Unis), R. Lallement, S. Raimond (Université Versailles-St Quentin/CNRS), J.-L. Vergely (ACRI-ST)

    La spectroscopie a été à l'origine de la théorie quantique en aiguillant Niels BohrNiels Bohr sur la voie de la découverte de son fameux modèle atomique au début du XXe siècle. En retour, la mécanique quantique a donné à la spectroscopie de nouveaux moyens d'étude des astres. On peut ainsi mesurer les températures, pressions et intensités de champs magnétiques dans les atmosphèresatmosphères des étoiles mais aussi dans les nuagesnuages atomiques et moléculaires de la Voie lactéeVoie lactée.

    En plus des images de notre GalaxieGalaxie dans le domaine optique fournies par Hubble, il est aussi possible d'y cartographier la répartition des grands nuages d'hydrogènehydrogène à l'aide de radiotélescopesradiotélescopes. Tout dernièrement d'ailleurs, les images prises dans l'infrarougeinfrarouge il y a des décennies par le satellite Cobe, qui avait fourni la première carte du rayonnement fossile, ont permis de dessiner un nouveau visage de la Voie lactée.

    Aujourd'hui, c'est en étudiant l'absorptionabsorption de la lumièrelumière émise par 1.857 étoiles situées jusqu'à presque 6.000 années-lumièreannées-lumière du SoleilSoleil que B. Y. Welsh (UCL Berkeley, Etats-Unis), R. Lallement, S. Raimond (Université Versailles-St Quentin/CNRS) et J.-L. Vergely (ACRI-ST) ont réussi à cartographier plus précisément les nuages de gazgaz situés dans un volumevolume de presque 1.000 années-lumière de diamètre autour du Système solaireSystème solaire.

    Ce phénomène d'absorption de la lumière est connu des astronomesastronomes depuis longtemps et signale la présence de nuages de matièrematière entre les étoiles. Dès 1904, l'astronome allemand J. Hartmann avait observé des raies K d'absorption du calciumcalcium ionisé (Ca-II, 3.933 Å) dans le spectrespectre de l'étoile deltadelta Orionis. Puis les fameuses raies du sodiumsodium formant un doubletdoublet (Na-I, 5.889 et 5.895 Å) furent détectées en 1919 dans delta Orionis et bêtabêta Scorpii. On sait depuis que la raie Ca-II K et le doublet Na-I sont complémentaires car la première est sensible aux gaz partiellement ionisés et la seconde aux gaz interstellaires froids et neutres.

    Traces nuageuses de supernovae

    En remesurant ces raies avec une haute résolutionrésolution à l'aide des instruments de l'ESOESO, les chercheurs ont donc précisé la forme de la fameuse Bulle locale, dont la taille est d'environ 260 années-lumière selon certaines estimations. Contient un gaz neutre et très peu dense, elle est entourée de nuages de gaz eux aussi neutres mais bien plus denses. Les régions entre les nuages représentent de véritables « tunnels interstellaires » où la matière est à nouveau raréfiée et connectent d'autres bulles au-delà de la Bulle locale.

    C'est la première fois qu'une carte aussi précise de la distribution de Ca-II dans la banlieue proche du Soleil a été réalisée et elle montre des filaments de gaz ionisés partiellement formant une structure rappelant celle d'un nid d'abeilles. On pense que l'ensemble de ces structures résulte de l'impact des explosions de supernovaesupernovae et des flux de matière et de rayonnement de jeunes étoiles il y a environ 15 millions d'années et seulement deux à quatre dans certains cas.

    Ce genre d'information est importante pour comprendre la dynamique du milieu interstellaire et le cycle de la matière, comprenant la formation et la mort des étoiles de la Voie lactée.