Le clignotement régulier des pulsars pourrait permettre de se repérer dans l’espace au-delà du Système solaire. Une sorte de « phare cosmique » aussi précis qu’une horloge atomique mais qui nécessite des calculs complexes. Avec son système Sextant, la Nasa compte bien s’en servir pour ses futures missions interplanétaires.


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    Jadis, les navigateursnavigateurs utilisaient la position des étoiles dans le ciel pour se repérer. Plus tard, la lumière des phares est venue les prévenir des dangers des côtes. Aujourd'hui, nous nous orientons grâce aux satellites, qui nous donnent en permanence notre position exacte sur Terre. Pour les futurs voyages interplanétaires, les astronautes utiliseront peut-être un mix des trois, en se repérant par rapport aux émissions de rayonnement X des pulsars.

    Les pulsars, véritables phares cosmiques

    Les pulsars, aussi appelés étoiles à neutrons, sont d'anciennes étoiles massives qui se sont effondrées sur elles-mêmes. Comme leur nom l'indique, elles émettent des ondes électromagnétiquesondes électromagnétiques à un rythme rapide et régulier, comme des pulsations cardiaques. « Leurs faisceaux lumineux de rayons Xrayons X balayent le ciel comme un phare, illustre Luke Winternitz, ingénieur en systèmes de navigation au Goddard Space Flight CenterGoddard Space Flight Center de la NasaNasa à Greenbelt, dans le Maryland (États-Unis). Les pulsations de certaines étoiles à neutrons sont très stables, certaines même aussi stables que les horloges atomiqueshorloges atomiques terrestres à long terme, ce qui les rend potentiellement aussi fiables que le GPSGPS », poursuit le chercheur. Car si le GPS est parfaitement adapté à la navigation terrestre, il devient complètement inutile pour les voyages interstellaires. Contrairement aux informations fournies par les satellites, les rayonnements des pulsars ne se dégradent pas en s'éloignant de la Terre, puisqu'ils sont répartis dans toute la Voie LactéeVoie Lactée. « On fait passer le G de Global au G de GalaxieGalaxie », appuie son collègue JasonJason Mitchell. Ce système pourrait fonctionner n'importe où dans le Système solaireSystème solaire et même transporter des robotsrobots ou des équipages au-delà du Système solaire ».

    Illustration d’un pulsar en rotation. Le faisceau de rayons X balaye le ciel un peu comme un « phare cosmique ». © Bill Saxton, NRAO, AUI, NSF
    Illustration d’un pulsar en rotation. Le faisceau de rayons X balaye le ciel un peu comme un « phare cosmique ». © Bill Saxton, NRAO, AUI, NSF

    Des signaux faibles difficiles à collecter

    Le problème, c'est que contrairement aux pulsations radio également émises par les étoiles à neutrons, les émissions de rayons X sont très faibles. Il faut donc un système suffisamment puissant pour les détecter. De fait, le Nicer (Neutron star Interior Composition Explorer) fait à peu près la taille d'une machine à laver, ce qui est incompatible avec une sonde ou un vaisseau compact destiné à être envoyé à l'autre bout de l'UniversUnivers. Mais selon Jason Mitchell, il est possible de réduire drastiquement sa taille en échangeant une zone de couverture très large avec une duréedurée de collecte plus longue (plus on augmente le temps de collecte, plus on récolte de photonsphotons). L'autre limite concerne le nombre restreint d'étoiles à neutrons exploitables. Cela nécessite d'établir un catalogue extrêmement précis du calendrier des pulsations de chaque étoile, dont la position de certaines demeure en outre variable.

    Le système de détection Nicer à bord de l’ISS. © Nasa
    Le système de détection Nicer à bord de l’ISS. © Nasa

    L'idée n'est pas nouvelle. Ce système, appelé XNAV ou « phare cosmique », est déjà testé par la Nasa sur la Station spatiale internationaleStation spatiale internationale (ISS), qui dispose d'un appareil nommé Nicer, qui détecte et horodate la lumière des rayons X dans le ciel. Couplé au logiciellogiciel SextantSextant (Station Explorer for X-ray Timing and Navigation Technology), il permet de créer une carte de navigation comme celle que l'on peut obtenir avec le GPS. Les scientifiques ont développé des modèles permettant de prédire avec précision quand une impulsion de rayons X va parvenir à un point donné. En chronométrant l'écart entre l'arrivée de l'impulsion à l'ISS et le moment auquel elle devait arriver à ce point de référence, on peut ainsi déterminer la position exacte où l'on se trouve.

    Un système de navigation complémentaire

    Le système XNAV devrait être testé également sur la future station orbitaleorbitale lunaire GatewayGateway pour y servir de navigation d'appui lors des missions vers Mars. « Les astronautes pourraient également l'utiliser pour compléter les capacités de navigation à bord s'ils devaient revenir sur Terre par leurs propres moyens », suggère Jason Mitchell. Outre la Nasa, les Chinois ont développé un mini satellite baptisé XPNAV 1 destiné à mettre au point une carte de navigation. L'Agence spatiale européenneAgence spatiale européenne (ESA), qui avait pourtant été une des premières à s'intéresser à cette technologie avec la publication en 2004 d'une étude sur la faisabilité du XNAV, semble depuis avoir abandonné l'idée.


    Un GPS avec des pulsars pour sondes et vaisseaux interplanétaires

    Article de Laurent SaccoLaurent Sacco publié le 02/06/2013

    La miniaturisation des miroirsmiroirs à rayons X permet d'envisager l'utilisation des émissions des pulsars pour se repérer dans le Système solaire et même au-delà. Les prochaines sondes interplanétaires pourraient naviguer de façon autonome de cette façon, selon trois chercheurs de l'institut Max PlanckMax Planck de radioastronomie.

    Pour naviguer avec précision dans le Système solaire, il faut utiliser les corrections aux équationséquations de la mécanique céleste newtonienne, déduites des équations de la relativité générale. D'après des membres de l'institut Max Planck de radioastronomie (Allemagne), les sondes interplanétaires du futur pourraient bien utiliser une autre conséquence des équations de la relativité généralerelativité générale, les pulsars.

    On sait que ces étoiles à neutrons sont de véritables phares dans l'espace interstellaire. Ce sont aussi d'excellentes horloges, et cela fait seulement quelques années que l'on est capable de construire des horloges atomiques plus stables que ces objets naturels. Dès les années 1970, on savait que l'on pouvait s'en servir pour se localiser dans la Voie lactée, et c'est pourquoi la position de la Terre a été indiquée par rapport aux pulsars sur la fameuse plaque en or des sondes Pioneer. On a procédé de la même manière pour le célèbre Golden Record des sondes Voyager.

    Les pulsars : des phares cosmiques pour l'astronautique

    Dans l'article qu'ils viennent de publier sur arxiv, les chercheurs allemands montrent qu'il est désormais possible, pour une sonde ou un vaisseau interplanétaire, de se repérer de façon autonome et avec précision dans le Système solaire, en utilisant des pulsars.

    Une vue d'artiste d'une sonde du type de Rosetta, qui serait équipée d'un GPS interplanétaire utilisant des pulsars. La méthode étant celle de la triangulation, il faudrait trois pulsars dont les faisceaux d'ondes balayeraient l'espace tels des phares, comme sur cette image. © Esa
    Une vue d'artiste d'une sonde du type de Rosetta, qui serait équipée d'un GPS interplanétaire utilisant des pulsars. La méthode étant celle de la triangulation, il faudrait trois pulsars dont les faisceaux d'ondes balayeraient l'espace tels des phares, comme sur cette image. © Esa

    Actuellement, si l'on sait localiser une sonde au moyen des ondes radio qu'elle échange avec la Terre (à quelques mètres près), ce n'est vrai que du point de vue de la distance radiale. Pour ce qui est de la position angulaire, les limites imposées par la nature physiquephysique même des ondes et des radiotélescopes conduisent à des erreurs, de l'ordre de quatre kilomètres par unité de distance astronomique. Il en résulte que la position de la sonde Voyager 1 n'est en fait connue qu'à 500 km près, et que celle d'une sonde au voisinage de PlutonPluton le serait avec une marge d'erreur de 200 km.

    On envisage d'utiliser les ondes radio émises par trois pulsars pour réaliser une triangulationtriangulation. Pour une sonde comme RosettaRosetta ou New Horizons cela lui permettrait alors de connaître sa position, indépendamment des instruments sur Terre. Comme l'expliquent les chercheurs, il faudrait que ces sondes soient équipées d'antennes, ayant par exemple une surface de 150 m2 à une longueur d'ondelongueur d'onde de 21 cm : c'est encore trop, mais il y a désormais une alternative.

    Des télescopes à rayons X miniaturisés pour se repérer

    Si un satellite comme Chandra avait besoin d'un instrument pesant 18,5 t par m2 pour collecter des rayons X en provenance d'un pulsar, ce n'est plus le cas aujourd'hui, pour des satellites similaires. Un détecteur pesant 25 kgkg pour une surface équivalente est maintenant réalisable. On peut donc penser que la prochaine génération de sondes ou de vaisseaux interplanétaires pourrait être équipée de capteurscapteurs de rayons X pour se repérer de façon autonome, partout dans le Système solaire, avec une erreur de seulement 5 km.

    Pour Werner Becker, l'un de coauteur de l'étude, et ses collègues, ce n'est qu'un début. On connaît déjà presque 2.000 pulsars, et bien d'autres devraient être découverts dans les années à venir. Selon eux, une sorte de GPS interplanétaire utilisant les pulsars verra le jour. Ils font même un clin d'œilœil à la série Star Trek, en imaginant qu'un tel système permettrait de se localiser dans la Voie lactée lors de missions en direction d'exoplanètes habitables.