En raison de sa forêt dense, l’étude des sites archéologiques en Amazonie a toujours été compliquée et limitée dans les détails. Une nouvelle technique permettant d’obtenir des images 3D de la surface au sol a récemment été utilisée et a révélé des vestiges archéologiques urbains remarquables !


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    Sur les derniers milliers d'années, les agriculteurs préhispaniques des Llanos de Mojos, en Bolivie, se sont installés dans les savanes de l'Amazonie dont le sol bénéficie de propriétés agricoles et aquacoles plutôt avantageuses. Cette zone de plaines a été longtemps inondée pendant la saisonsaison des pluies favorisant un dépôt sédimentaire important et donc la création d'une topographie surélevée avec le temps et d'un sol riche et bien drainé. 

    Les scientifiques savent que la culture de Casarabe s'y est largement développée il y a environ entre 1.400 et 500 ans, avec une localité d'une superficie de 4.500 km2. Il avait été retrouvé en ces lieux la présence de 189 grands sites monumentaux, 273 sites plus petits et finalement 957 kilomètres de canaux et de chaussées. De plus, les fouilles affirment que ces sites étaient bien habités tout au long de l'année et que les autochtones étaient très organisés : ils cultivaient leur nourriture, ils avaient des systèmes de maîtrise de l’eau, chassaient et pêchaient pour leur besoin en protéinesprotéines.

    L'image ci-dessus est une capture d'écran d'une animation 3D du site Cotoca. Ce site est l'un des deux plus grands et importants sites de la région étudiée. © Heiko Prümers, DAI
    L'image ci-dessus est une capture d'écran d'une animation 3D du site Cotoca. Ce site est l'un des deux plus grands et importants sites de la région étudiée. © Heiko Prümers, DAI

    La technique au laser 

    Malgré toutes ces informations archéologiques récoltées, la cartographie des sites a toujours été très compliquée et limitée dans les détails en raison de sa localisation dans un milieu forestier tropical. Pour remédier à cette contrainte, le Dr Heiko Prümers et ses collègues ont effectué une cartographie laser aéroportée pour six zones dans lesquelles sont concentrés les établissements majeurs connus. C'est la première fois que cette technique, le Lidar (Light Detection and RangingLight Detection and Ranging), est utilisée dans la région amazonienne. Elle implique d'attacher un scanner laser à un hélicoptère, un petit avion ou un drone, permettant de cartographier le terrain. Les images ont ensuite été travaillées numériquement pour retirer la végétation et ne garder que la surface terrestre, elles ont permis d'obtenir de beaux modèles sous forme d'image 3D, partagés dans la revue Nature

    L'image montre le résultat Lidar de la partie centrale du site. Les caractéristiques architecturales sont numérotées de 1 à 23 : 1 = tumulus principal en forme de U de 22 m de haut ; 2 à 21 = monticules de plateforme plus petits ; 22 et 23 = plateformes à la jonction d'une chaussée et de l'enceinte polygonale. © Heiko Prümers et al, 2022
    L'image montre le résultat Lidar de la partie centrale du site. Les caractéristiques architecturales sont numérotées de 1 à 23 : 1 = tumulus principal en forme de U de 22 m de haut ; 2 à 21 = monticules de plateforme plus petits ; 22 et 23 = plateformes à la jonction d'une chaussée et de l'enceinte polygonale. © Heiko Prümers et al, 2022

    Des vestiges surprenants !

    Les images ont révélé deux sites remarquablement étendus faisant place à des vestiges archéologiques urbains dont des architectures civiques (des habitations) et cérémonielles. Ces infrastructures comprennent des plateformes à gradins au sommet desquelles se trouvent des structures en forme de U, des monticules de formes rectangulaires et des pyramides coniques montant jusqu'à 22 mètres de haut. Ces deux grands sites de peuplement sont entourés de bancs polygonaux concentriques représentant des nœuds centraux qui sont reliés à des sites de rang inférieur par des chaussées droites et surélevées qui s'étendent sur plusieurs kilomètres. Pour finir, ces images 3D montrent également des infrastructures massives pour la gestion de l'eau, composées de canaux et de réservoirs. 

    Il n'est cependant pas encore possible d'estimer combien de personnes vivaient dans ce système anthropisé. L'organisation et la disposition de la colonie indiquent que de nombreuses mains devaient être à l'œuvre et que cette population a dû augmenter comme en témoigne l'expansion du système de remparts-fossés.