La technologie basée sur l’utilisation de lasers haute puissance pulsés est une des solutions envisagées pour de futurs systèmes de propulsion spatiale. Le Cnes, qui travaille déjà aux lanceurs qui succéderont à Ariane 6, s’intéresse à ce développement prometteur. Les explications de Christophe Bonnal, senior expert à la direction des lanceurs du Cnes.


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    Le Cnes, qui travaille déjà à l'après-Ariane 6Ariane 6, avec en étude une double possibilité d'évolution (Ariane Next) dès 2025, se projette également sur un horizon plus lointain avec Ariane Ultimate, un concept prospectif guère envisagé avant l'horizon 2040, mais qui marquera une véritable rupture technologique sur la propulsion, et par ricochet sur l'architecture des lanceurs.

    Comme nous l'explique Christophe Bonnal, senior expert à la direction des lanceurs du Cnes, « selon l'évolution de la concurrence », Ariane Next peut soit être une version évoluée a minima d'Ariane 6 de « façon à améliorer sa compétitivité », par l'ajout de « nouveaux boosters pour augmenter sa performance par exemple », soit une solution plus radicale qui passe par la « mise au point d'un nouveau lanceur partiellement réutilisable ».

    Le Cnes s'y prépare à travers plusieurs programmes précurseurs, dont PrometheusPrometheus, CallistoCallisto et Frog. Prometheus est un « nouveau moteur européen dix fois moins cher que le Vulcain et potentiellement réutilisable ». Callisto, lui, est un « démonstrateurdémonstrateur de premier étage réutilisableétage réutilisable », réalisé en coopération entre le Cnes et les agences spatiales allemandesagences spatiales allemandes (DLR) et japonaise (Jaxa), qui volera au Centre spatial guyanais en 2020. Quant à Frog, il s'agit d'un démonstrateur de vol à échelle réduite qui a pour but de « tester des algorithmes d'atterrissage vertical au profit des futurs lanceurs réutilisables ».

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    À plus long terme, c'est-à-dire au-delà d'Ariane Next, de nombreuses solutions de transport spatial qui pourraient succéder à l'actuelle famille Ariane 6, sont à l'étude au sein d'ArianeWorks. Sorte de think tank mis en place par le Cnes et ArianeGroup, les équipes pluridisciplinaires d'ArianeWorks explorent et testent avec une grande liberté les pistes de technologies et solutions prometteuses pouvant radicalement améliorer, en performances, coûts ou services, ce qui se fait aujourd'hui en matière de lanceurs.

    Parmi ces technologies de rupture envisagées telles que des « ergols polyazotés ou de nouveaux matériaux à base de nano-tubes de carbonecarbone », le Cnes travaille aussi sur de nouvelles technologies de propulsion dont certaines semblent prometteuses, comme la « propulsion par ablationablation laserlaser » qui repose sur le « principe d'éjection de massemasse d'une fine couche de matière engendrée par l'ablation laser d'une surface solidesolide », souligne Christophe Bonnal.

    La propulsion laser, une des solutions envisagées pour les lanceurs du futur. © YouTube

    Propulsion par ablation laser

    L'idée du Cnes est d'utiliser un laser pulsé à périodes très courtes, de l'ordre de 100 picosecondespicosecondes toutes les 20 ms de façon à « sublimer et vaporiser la surface d'un matériaumatériau », ce qui crée un « dégazagedégazage à haute vitessevitesse et donc une poussée similaire à un moteur de lanceur ». Le critère pertinent sur le sujet est le coefficient de couplage, c'est-à-dire le « nombre de newtonsnewtons par wattwatt. Les valeurs standards vont de 40 à 100 newtons par mégawatt ».

    Le Cnes, en coopération avec les collègues de l'ENSAM, de l'ENSMA, de Polytechnique et des Mines Paris-Tech, a identifié un matériau révolutionnaire appelé POM (polyoxyméthylène), qui semble être le plus prometteur en raison d'un coefficient de couplage de la quantité de mouvementquantité de mouvement et l'impulsion spécifiqueimpulsion spécifique, qui permet de juger de l'efficacité de la propulsion, les plus élevés. « Avec une valeur de 700 N/MW, ce POM bat le record du monde de couplage ». Avec ce polymèrepolymère, la « poussée engendrée par l'éjection de masse », signifie qu'il est possible de faire léviter une charge utile comme une sphère de 30 kilogrammeskilogrammes recouverte de polyoxyméthylène puis de l'accélérer et envoyer en orbiteorbite jusqu'à 20 kg de charge utile, sur les 30 kg de la sphère. Une démonstration est prévue. Elle consisterait à « envoyer, à l'aide d'un laser, un ballonballon de football à un kilomètre d'altitude à près d'un kilomètre par seconde », conclut Christophe Bonnal.

    Cette technologie nécessite néanmoins encore de nombreux développements, mais les études théoriques sont encourageantes. Elles montrent qu'il est possible de lancer des satellites vers les orbites basses ou vers l'espace interplanétaire en utilisant des lasers à impulsion répétitive avec des coûts de l'ordre de quelques centaines de dollars le kilogramme en orbite contre plusieurs milliers aujourd'hui.