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    Synapse. © Sashkin, Shutterstock

    Synapse. © Sashkin, Shutterstock 

    Qui a peur de l'évolution?

    La science a, depuis ces débuts, la conséquence de faire tomber l'homme du piédestal sur lequel il se plaît à se hisser.

    Il a fallu comprendre que la terre n'était pas le centre du système solaire, puis que le système solaire n'était pas le centre de l'univers. Avec l'évolution, l'homme se retrouve à pied d'égalité avec les autres êtres vivants, soumis aux mêmes lois, modelé par la nature au lieu de la soumettre à ses désirs. Pire, l'évolution lui explique que son apparition a été, en partie, fortuite. Si l'on reprenait la « soupe primordiale » de l'origine du monde vivant, et qu'on la soumettait aux mêmes conditions originales, pour la laisser se développer pendant un même nombre de millions d'années, la probabilité de voir surgir des hommes, même des mammifèresmammifères, ou n'importe quel être vivant actuel, est quasi nulle. Les organismes présenteraient peut-être des similarités dans certaines fonctions, mais pas de développement à l'identique.

    © domaine public wikipedia

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    Si cela fait rêver les auteurs de science fiction, cela fait faire des cauchemars à tous ceux qui se raccrochent à l'idée que l'homme occupe une place « spéciale » dans la nature. Les religieux sont évidemment les plus susceptibles d'adhérer à ce type de point de vue, mais ils sont loin d'en avoir l'exclusivité. Néanmoins, les religions ne demandant par principe à leur fidèle que de croire, sans remise en question, ceci peut dans certains cas entraîner un conflit entre les idées religieuses et les idées scientifiques, lesquelles reposent justement sur le principe de la remise en question permanente, et exigent que toute théorie soit soumise à l'épreuve de l'expérimentation pour être validée.

    Quand la biologie évolutive regarde les religions

    Le lien entre théorie de l'évolutionthéorie de l'évolution et religion peut complètement changer de nature quand on décide de regarder les religions humaines par la lentillelentille de la biologie évolutive. Ce point de vue est celui de la psychologie évolutive, dont l'objet est la compréhension de l'évolution des comportements humains, qui sont ainsi observés comme le sont ceux de n'importe quelle autre espèceespèce animale.

    Carte des religions : dans chaque pays, Gallup a posé la question de l'importance de la religion dans la vie quotidienne des habitants. L'importance est croissante, du gris, vert pale, au vert foncé. Licence cc by, auteur Sbw01f, (sur les données du Gallup Poll en 2006-2008).<br />© Wikipedia

    Carte des religions : dans chaque pays, Gallup a posé la question de l'importance de la religion dans la vie quotidienne des habitants. L'importance est croissante, du gris, vert pale, au vert foncé. Licence cc by, auteur Sbw01f, (sur les données du Gallup Poll en 2006-2008).
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    Ceci pose en premier lieu la question de la nature de nos comportements. De nombreuses personnes, et notamment certains philosophes, pensent que nos comportements diffèrent de ceux des autres espèces par leur nature. L'animal, selon eux, est instinct, alors que l'homme est apprentissage. La réalité est autre : instincts (ou comportements génétiquement déterminés) et apprentissages interagissent, se superposent, chez tous les animaux, homme y compris.

    Quel rôle jouent nos gènesgènes dans la détermination de nos comportements?  De l'instinct pur à la capacité d'apprentissage, ils codent pour une plus ou moins grande plasticité comportementale, laissant ainsi une plus ou moins grande part au déterminisme environnemental.

    Ceci nous amène directement à la question suivante : quel rôle les mécanismes évolutifs ont-ils joué dans l'histoire de nos comportements, et dans quelle mesure jouent-ils encore un rôle aujourd'hui ? Certains scientifiques, comme Richard Sosis (Sosis R. and Kuffle R. Religious ritual and cooperation : testing for a relationship in Israeli religious and Secular Kibbutzim, Current Anthropology, 2003), ont décidé d'étudier si certains comportements liés aux religions, comme la pratique de rituels socio-religieux coûteux pour l'individu, pouvaient être analysés d'un point de vue évolutifs. Et leurs conclusions sont étonnantes. Selon ces études, les comportements rituels auraient évolué grâce à leur capacité à permettre un bonne cohésion sociale des membres du groupe. La pratique des tels rituels socio-religieux agirait comme un filtre « anti-tricheur », en permettant de faire le « tri » des individus désirant entrer dans le groupe, dans le but de refuser les profiteurs. Ne sont ainsi acceptés que ceux dont la volonté est de donner autant qu'ils reçoivent.

    L'étude de l'évolution est ainsi la source d'innombrables questionnements, sur l'ensemble du vivant, mais aussi sur nous-même. Nombre de ces questions n'ont pas encore de réponse, mais, bien qu'elles soient parfois considérées comme dérangeantes, elles suscitent un intérêt croissant de la part des chercheurs. En croisant les donnée obtenues par la psychologie évolutive, la psychologie, la neurologieneurologie, et les sciences humaines et sociales, peut-être arriverons-nous à construire une image de l'homme tel qu'il est, et ainsi mieux nous comprendre les uns les autres ?