Selon un rapport scientifique publié dans la célèbre revue américaine Science, la quasi-totalité des espèces de poissons et de crustacés pêchés pour la consommation auront disparu des océans avant 2050 si les tendances actuelles se poursuivent. Greenpeace demande que 40% des océans soient déclarés réserves marines.

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    La surpêche en méditerranée conduit à la capture de poissons de plus en plus petits.© Greenpeace

    La surpêche en méditerranée conduit à la capture de poissons de plus en plus petits.© Greenpeace

    "Ce rapport vient renforcer nos actions contre les menaces qui pèsent sur les océans. Nous ne voulons pas d'un moratoiremoratoire sur tous les océans mais la création de réserves marines" déclare Aurèle Clémencin. "Ces réserves marines devront être fermées à toutes les activités industrielles extractives pour protéger les espècesespèces mais aussi les écosystèmesécosystèmes qui les font vivre. À l'heure actuelle la sur-exploitation des espèces, l'utilisation de techniques de pêchepêche destructrices pour les espèces et les écosystèmes doivent être stoppées. Il ne s'agit pas de fermer les océans à toutes les activités mais il faut s'assurer que les ressources et les services rendus à l'Homme par les écosystèmes soient stabilisés."

    Sonnette d'alarme

    "Nos analyses indiquent que sans changement, la situation actuelle laisse présager de sérieuses menaces sur la sécurité alimentaire mondiale, la qualité des eaux côtières et la stabilité de l'écosystème qui affecteront les générations actuelles et futures", écrivent-ils. "Que l'on regarde les résultats d'expérimentations en laboratoires ou des études portant sur l'ensemble des océans, on fait le même constat, à savoir que la productivité et la stabilité de tout l'écosystème marin diminuent", explique Boris Worm, un biologiste à l'université d'Halifax (Nouvelle-Ecosse), un des co-auteurs.

    À ce stade, "29% des espèces de poissonspoissons et de crustacéscrustacés sont en passe de disparaître", précise Boris Worm ajoutant que "les prises de pêche de ces espèces ont diminué de 90%" ces dernières années. La morue de l'Atlantique nord a déjà atteint le point de non-retour et est considérée comme quasiment éteinte. "Si cette tendance se poursuit, tous les stocks de poissons et de crustacés pourraient être épuisés d'ici 2048", a ajouté Boris Worm.

    La pêche intensive et la pollution menace la sécurité alimentaire

    Cette recherche effectuée pendant quatre ans révèle également que la disparition d'une seule espèce accélère le dérèglement de l'ensemble de l'écosystème. À l'inverse, toute espèce qui retrouve un taux normal de reproduction contribue à la santé et à la stabilité des océans ainsi qu'à leur capacité d'absorber des chocs comme la pollution et le réchauffement du climatclimat.

    Ces scientifiques expliquent que la perte de biodiversitébiodiversité réduit profondément la capacité des océans à produire des poissons et crustacés, à résister au développement des parasitesparasites comme certaines alguesalgues ainsi qu'à produire de l'oxygène et à filtrer les substances polluantes.

    "L'océan est un grand recycleur, il absorbe les égoûts et les recycle en substances nutritives, il retire les toxines de l'eau, produit de la nourriture et transforme le dioxyde de carbonedioxyde de carbone (CO2) en élément de nutrition et en oxygène", souligne Steve Palumbi, un biologiste de l'université Stanford (Californie, ouest) et co-auteur de ces travaux. Pour cette étude, les chercheurs ont fait la synthèse de toutes les données couvrant mille ans d'histoire marine, celles provenant d'études dans 48 zones marines protégées et des statistiques mondiales sur la pêche de 1950 à 2003."Toutes ces données montrent aussi qu'il est possible d'inverser les tendances actuelles avant qu'il ne soit trop tard", estiment les auteurs de l'étude, déplorant toutefois "que seul 1% des océans soit protégé actuellement"."Les instances politiques nationales et internationales, Nations Unies ou OCDEOCDE, ont toujours repoussé la mise en place de mesures de protection à plus tard, invoquant systématiquement qu'un flou scientifique persistait. Là ce nouveau rapport est sans appel. Va-t-on attendre, à l'instar de la morue, que les espèces des grands fonds et le thon rougethon rouge aient disparu de la planète ? Il est tant que les discussions se transforment en action politique à court terme avec des moratoires sur la pêche des espèces les plus menacées et à long terme avec la mise en place de réserves marines" raconte Aurèle Clémencin de la campagne Océan de Greenpeace.

    L'actualité à venir

    Les campagnes contre la sur-exploitation du thon rouge et contre les techniques de pêche destructrices, surtout le chalutage des grands fonds marins, continuent avec un actualité brûlante en ce mois de novembre : le moratoire sur le chalutage doit être décidé entre le 17 et le 22 novembre lors de l'Assemblée Générale des Nations Unies où l'Union européenne a une position plus qu'hésitante poussée par l'Espagne, et les mesures de gestion du thon rouge de Méditerranée vont être discutée à Dubrovnick du 17 au 26 novembre, où l'on attend des états membres une réduction drastique des quotas. Ces deux organisations internationales ne peuvent rester sourdes aux conclusions de cette étude parue dans Science.