Quand, le 17 mars 2003, l'OMS a commencé à mettre en place ses plans d'urgence, l'accent fut mis essentiellement sur l'identification de l'agent étiologique du SRAS et l'élaboration d'un test diagnostique dans le cadre d'une stratégie de confinement au niveau mondial. Le progrès et les résultats en matière d'étiologie et de diagnostic seront indispensables pour détecter précocement la maladie, confirmer les cas, comprendre les modes de transmission, préparer des protocoles de soins ciblés, rechercher et développer des vaccins et appliquer des mesures de prévention spécifiques pour la maladie.

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    Afin de pouvoir prendre des mesures de santé publique sensées, il faudra aussi connaître la présence et la concentration de l'agent pathogène dans divers tissus et sécrétions ainsi que les schémas d'excrétion au cours de la maladie et de la convalescence. Tant qu'ils ne connaîtront pas l'agent étiologique de la maladie, les spécialistes de la lutte contre les maladies infectieuses devront recourir à des outils qui remontent au « moyen-âge » de la microbiologie, à savoir l'isolement et la quarantaine.

    Mise en place du réseau de laboratoires

    Le 17 mars 2003 vit la mise en place d'un réseau de 11 laboratoires de premier rang de par le monde dans le but d'accélérer l'identification de l'agent causal du SRAS. Ces laboratoires ont été choisis selon 3 critères : expertise scientifique exceptionnelle, l'existence de laboratoires du niveau de sécurité biologique III et possibilité de contribuer aux examens et aux tests nécessaires à l'identification d'un agent infectieux comme cause d'une maladie donnée. Le réseau fonctionne sur le modèle du réseau de la grippe (FluNet) et ceci nous donne une autre leçon importante, à savoir que les modèles et les réseaux mis en place pour un type d'urgence sanitaire peuvent rapidement être adaptés à d'autres urgences.

    La coopération est d'ordre virtuel. Les membres du réseau communiquent chaque jour au cours de téléconférences coordonnées par l'OMS et ont recours à un site Web sécurisé pour faire circuler des images de microscopie électronique de virus candidats et des représentations de séquences de matériel génétiquematériel génétique à fins d'identification et de caractérisation du virus, ainsi que des descriptions d'expériences et des résultats. Les secrets techniques bien gardés qui donnent à chaque laboratoire un avantage marqué sur les autres ont été immédiatement et généreusement partagés. Les laboratoires échangent aussi rapidement des échantillons provenant de malades ou d'autopsiesautopsies. Cette organisation a permis l'analyse simultanée d'échantillons provenant d'un même malade par divers laboratoires particulièrement compétents pour l'une ou l'autre méthode, les résultats étant partagés "en temps réel". Cette coopération a permis, en un temps incroyablement court, d'identifier l'agent causal et de mettre au point 3 tests diagnostiques.

    On continue à procéder à des isolements viraux chez des malades atteints de SRAS, y compris à partir des larmeslarmes et des selles. Les membres du groupe collaborateur préparent des publications sur ces divers résultats, mais il manque encore un test d'amplification géniquegénique (PCRPCR) suffisamment spécifique et sensible pour le diagnosticdiagnostic des affections aiguës.

    Un groupe similaire à visée épidémiologique, qui comprend des chercheurs de tous les sites où existent une transmission locale du SRAS, confirme la persistance de la transmission interhumaine en tant que mode de transmission principal. Aujourd'hui même, le groupe à échangé des informations concernant les enquêtes à Hong Kong afin d'identifier une source éventuellement liée au milieu physiquephysique, ce qui permettrait peut-être de mieux comprendre le groupement inhabituel de cas récemment observés à Singapour. Dans ce domaine, les questions-clés consistent notamment à identifier les moments précis au cours de l'incubation et de l'infection auxquels la transmission a lieu et si les cas asymptomatiques peuvent aussi transmettre le SRAS. Les réponses à ces questions devront permettre de mieux évaluer jusqu'à quel point le SRAS se propage, ainsi que le succès des mesures de confinement.

    Un troisième groupe, clinique, réunit 80 cliniciens originaires de 13 pays qui ont eu des cas de SRAS et apporte une information descriptive -- et malheureusement monotone -- sur l'inefficacité des traitements à base d'antibiotiquesantibiotiques ou de médicaments antivirauxantiviraux donnés ; ce groupe a commencé à mettre au point des essais cliniquesessais cliniques systématiques de la ribavirineribavirine en deux endroits. Leurs discussions ont permis de mieux comprendre certains aspects initiaux de la maladie, le traitement et l'évolution, certains indicateurs de pronosticpronostic, et les critères de guérisonguérison. Aucun traitement n'a encore montré une efficacité particulière. Les cliniciens sont tombés d'accord qu'un sous-ensemble de malades du SRAS, de l'ordre de 10%, s'affaiblissent aux alentours du 7ème jour et doivent avoir recours à des respirateurs mécaniques. La présence d'autres maladies complique souvent la prise en charge de ces malades, chez lesquels la létalité est élevée. Le fait d'être âgé de plus de 40 ans semble aussi être un facteur d'apparition de formes plus graves de la maladie.

    La Chine doit coopérer davantage

    La Chine, qui avait manifesté quelques réticences initiales à participer à l'alerte et à la riposte mondiale, s'est engagée en tant que partenaire de plein droit au sein des 3 groupes qui étudiaient le SRAS, arrivant à la conclusion que les flambées de SRAS survenues ailleurs en Asie sont liées à la flambée observée dans la province de Guangdong. Le gouvernement chinois a annoncé qu'il considérait le SRAS comme une priorité absolue, avec la mise en place d'un système d'alerte et de riposte pour toutes les maladies émergentes ou propices à causer des épidémiesépidémies, y compris au niveau de chaque province la notification quotidienne, par voie électronique, des nouveaux cas et des décès. L'ancien ministre de la santé a d'ailleurs été limogé pour inefficacité. Il faut également signaler que les autorités sanitaires ont commencé à donner des conférences de presse quotidiennes à la télévision. Ces conférences accroissent, chose importante, la prise de conscience par la population et le personnel hospitalier des symptômessymptômes, de la nécessité urgente de demander des soins et de l'importance d'une prise en charge conforme aux principes d'isolement et de la lutte ciblée contre l'infection.

    Face à l'inquiétude de la communauté internationale, le président chinois Hu Jintao a récemment exigé plus de transparencetransparence de ses propres services sanitaires dans la gestion de la crise liée à la pneumonie atypiquepneumonie atypique. Les autorités sanitaires internationales attendent avec appréhension les nouvelles statistiques en provenance de Chine, qui pourraient considérablement alourdir les bilans.

    Un avenir incertain

    Les mois et les semaines à venir nous diront si l'alerte et la riposte au niveau mondial auront permis de contenir les flambées de SRAS en cours, d'empêcher le SRAS de s'ajouter à la liste des maladies infectieuses endémiquesendémiques chez l'homme, ou encore si le SRAS restera limité à ses origines naturelles pour réapparaître en d'autres temps et d'autres lieux. Il est évident que tous les pays partagent la responsabilité de contenir l'apparition de toute maladie infectieuse nouvelle qui tend à diffuser au niveau international. Dans un monde où toutes les frontières nationales sont poreuses aux défis microbiens, il est de l'intérêt de tous que les pays partagent le plus rapidement possible l'information dont ils peuvent disposer. Ce faisant, ils permettront à leurs voisins proches ou lointains - tous voisins d'ailleurs dans notre planète en voie de mondialisation - de bénéficier de ce qu'ils auront appris.