Souvent, l'humain est honnête. Mais lorsque les enjeux sont considérés trop importants, cette honnêteté semble s'évaporer.


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    L'humain ne supporte pas l'injustice, n'est-ce pas ? Les inégalités, les arnaques, les vols... Et pourtant, ils continuent. Les scandales financiers affluent. Les chercheurs en psychologie auraient-ils mal cerné notre esprit ? Non, répondent trois scientifiques par une publication dans Nature human behaviour, le diable se cache simplement dans les détails. L'humain serait honnête avec d'autres individus mais n'hésiterait pas à voler une foule. Vicieux.

    « Les mêmes personnes ont fait preuve d'égoïsme dans les grandes décisions à fort impact affectant un grand groupe, et de générosité dans les petites interactions bilatérales à faible enjeu », résume Carlos Alós-Ferrer, l'un des auteurs. Dans leur expérimentation, 640 étudiants ont participé au Big Robber, un jeu où un voleur peut obtenir un gain personnel en s'appropriant les revenus d'un grand groupe de victimes.

    En l'occurrence, les étudiants étaient répartis en groupes de 32 personnes, dont la moitié avait le rôle de « voleur » potentiel. Chacune d'entre elles étaient rémunérées avec la même somme d'argentargent... Mais plus de la moitié des voleurs ont escroqué autant que possible. Environ une centaine d'euros. Presque personne n'a refusé de participer à l'arnaque. En tout, plus de 80 % des participants désignés « voleurs » ont pris au moins 30 % des gains d'autrui.

    Moralement, ce serait plus simple de voler un groupe qu'une personne. © adragan, Adobe Stock
    Moralement, ce serait plus simple de voler un groupe qu'une personne. © adragan, Adobe Stock

    100 euros, le seuil de la tentation

    Lors des jeux bilatéraux à faible enjeu financier, les étudiants ont pourtant fait preuve d'un comportement prosocial. Ils partageaient volontiers 10 € avec une personne inconnue, même si celle-ci n'était pas en position de réagir. Moralement, il semblerait que ce soit plus simple pour l'humain de nuire à un groupe d'individus qu'à une seule personne, aussi paradoxal que cela puisse paraître. « Ce comportement est apparu spontanément au sein de notre population étudiante, sans différences significatives dues au sexe ou au domaine d'études », précise Carlos Alós-Ferrer.

    Avec une pointe de cynisme, ce chercheur considère que « les racines des scandales d'entreprise semblent être en chacun de nous ». Mais il s'agirait d'une forme de compromis. Le vol de 100 € à une seule personne entraîne une inégalité flagrante, tandis que le vol de 10 € à 10 personnes rapporte la même somme tout en lésant moins les victimes. Ce qui compenserait notre aversion à l'inégalité. « Dans des situations économiquement pertinentes, de nombreux décideurs humains pourraient être disposés à infliger un préjudice important à un nombre relativement important de personnes pour leur gain personnel, à condition que ce gain soit d'une ampleur suffisante, soutient Carlos Alós-Ferrer. Dans les sociétés occidentales, 100 € pourraient déjà suffire. »

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