Éviter ou retarder certains cas de démences serait possible en agissant sur des facteurs modifiables tels que la pollution de l’air. Des chercheurs ont voulu aller plus loin et étudié l’impact de trois polluants liés au trafic routier sur les performances cognitives afin d'obtenir des données précises sur ce facteur de risque qu'est l'altération de la qualité de l'air.


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    Les effets nocifs des polluants atmosphériques sur la santé, même à de faibles niveaux d'exposition sont bien documentés. De récentes recherches ont notamment suggéré qu'en plus d'accroître le risque de développer des maladies cardiovasculaires et pulmonaires, la pollution de l'airair pourrait accélérer le déclin cognitif, un des symptômes annonciateurs d'une pathologie neurodégénérative comme la maladie d'Alzheimer et d'autres démences.

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    Cette carte de la pollution réserve quelques surprises, y compris des bonnes !

    Depuis quelques années, la pollution de l’air est ainsi reconnue comme un facteur de risque « modifiable » de la démence, c'est-à-dire sur lequel il est possible d'agir via des changements dans la réglementation qui encadre les niveaux de pollution tolérés. 40 % des cas de démences pourraient être ainsi évités ou retardés. Cependant, aucune étude ne s'est jusqu'alors intéressée simultanément à plusieurs types de polluants et à leurs potentiels effets respectifs sur les différents domaines de la cognition.

    Des chercheurs de l'Inserm, de l'université de RennesRennes 1 et de l'École des hautes études en santé publique (EHESP) à l'Irset ont étudié comment le niveau d'exposition aux polluants atmosphériques impacte les performances cognitives. Les résultats de l'étude suggèrent un lien entre une exposition à de plus fortes concentrations de polluants et un niveau plus faible des performances cognitives, lien qui diffère selon les polluants. Ils font l'objet d'une publication dans The Lancet Planetary Health.

     Les résultats de tests cognitifs d’un large échantillon de personnes révèlent que différents polluants liés au trafic routier altèrent les performances cognitives. © KaYann, Adobe Stock
     Les résultats de tests cognitifs d’un large échantillon de personnes révèlent que différents polluants liés au trafic routier altèrent les performances cognitives. © KaYann, Adobe Stock

    Dresser des cartes d'exposition

    Une étude ayant révélé qu'une baisse des performances cognitives pouvait survenir dès l'âge de 45 ans appuyée sur les données de plus de 61.000 participants de la cohortecohorte épidémiologique Constances, âgés de 45 ans et plus. 

    Tous ont participé à une série de tests mesurant leurs performances cognitives dans trois grands domaines de la cognition : la mémoire, la fluidité d'expression orale (ou fluence verbale) et la capacité à prendre des décisions. Les chercheurs ont établi un score des performances cognitives pour chacun des tests, en tenant compte du sexe, de l'âge et du niveau d'étude de chaque participant.

    Le saviez-vous ?

    La cognition gouverne aussi les fonctions exécutives, c'est-à-dire l'ensemble de processus cognitifs : raisonnement, planification, résolution de problèmes etc. qui nous permettent de nous adapter au contexte, aux situations nouvelles.

    Pour mesurer l'exposition de chaque participant à la pollution, l'équipe de recherche a utilisé des cartes dites « d'exposition » qui estiment la concentration de polluants à l'adresse du domicile. Ces cartes prennent en compte plusieurs variables comme la densité du trafic routier ou encore la proximité du domicile aux routes. Trois polluants liés au trafic routier ont été considérés dans le cadre de l'étude : les particules finesparticules fines de diamètre inférieur à 2,5 micronsmicrons (PM2,5), le dioxyde d'azoteazote (NO2) et le carbone suie.

    La pollution de l'air affecte les performances cognitives

    En croisant les résultats des tests cognitifs avec le niveau d'exposition aux trois polluants atmosphériques, l'étude indique que l'exposition à de plus grandes concentrations de ces polluants serait associée significativement à un plus bas niveau de performances dans les trois domaines cognitifs étudiés. Pour les participants les plus exposés, les chercheurs ont constaté une différence allant de 1 à près de 5 % du score des performances cognitives par rapport aux participants moins exposés.

    « Les capacités les plus impactées sont la fluence verbale et les fonctions exécutives, précise Bénédicte Jacquemin, la chercheuse Inserm qui a dirigé ces travaux. Le dioxyde d'azote et les particules PM2,5 impactent d'avantage la fluence verbale, tandis que le carbonecarbone suiesuie a un plus grand impact sur les fonctions exécutives. »

    Elle conclut : « La prochaine étape de nos recherches consiste à observer l'évolution dans le temps des fonctions cognitives de ces adultes, afin de voir si l'exposition à la pollution est aussi associée à une baisse du fonctionnement cognitif avec le temps, baisse qui peut refléter les premiers signes de démences, tant de la maladie d’Alzheimer que d'autres formes de démences du sujet âgé. »

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