Favorisant la perte de poids, ces nouveaux médicaments prescrits pour combattre l'obésité entraîneraient une reprise de poids à l'arrêt du traitement. Après l'observation de 670 patients traités par tirzepatide, molécule présente dans le Zepbound, une étude en conclut que cette dernière conduit à une dépendance sur le long terme.

 


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    Une nouvelle génération de médicaments contre l'obésité suscite depuis des mois l'engouement de millions de patients et du secteur pharmaceutique -- mais soulève une question : que se passe-t-il en cas d'arrêt de ces traitements ? Selon une étude publiée lundi dans le Journal of the American Medical Association (Jama), une partie importante du poids perdu sous traitement revient une fois qu'il est mis fin à celui-ci, indiquant que ces nouvelles moléculesmolécules pourraient créer une forme de dépendance de long terme.

    L'étude a été menée avec le tirzepatide, une molécule du laboratoire américain Eli Lilly présente dans le Zepbound, approuvé en novembre aux États-Unis comme traitement contre l'obésité, maladie dont environ 40 % des adultes souffrent dans le pays.

    Le Zepbound fait partie, avec Wegovy, Mounjaro et Ozempic notamment, de la récente vaguevague de médicaments qui affolent le secteur pharmaceutique et nourrissent les espoirs de millions de malades à travers le monde avec leur propriétés très attractives : ils soignent le diabète de type 2, font maigrir et peuvent être utilisés pour traiter l'obésité. Ces médicaments imitent une hormone sécrétée par les intestins, GLP-1 (abréviation de glugaco-like peptide 1) qui stimule la sécrétion d'insuline et réfrène l'appétit en procurant une sensation de satiété.

     Le Wegovy est autorisé pour les personnes en obésité sévère ou avec un surpoids accompagné de comorbidité. © Mauricio, Adobe Stock
     Le Wegovy est autorisé pour les personnes en obésité sévère ou avec un surpoids accompagné de comorbidité. © Mauricio, Adobe Stock

    La moitié du poids perdu… puis repris

    Dans l'étude publiée lundi, une cohortecohorte de 670 patients a d'abord pris une dose de Zepbound en injection hebdomadaire, leur faisant perdre en moyenne 21 % de leur poids après 36 semaines. Ils ont ensuite été séparés en deux groupes : l'un continue de recevoir du Zepbound, l'autre un placeboplacebo.

    Au bout de 88 semaines (plus d'un an et demi), ceux qui ont reçu le placebo ont regagné près de la moitié du poids perdu, avec un poids tout de même 10 % plus faible qu'au tout début du traitement. Le groupe avec du Zepbound a lui continué de perdre du poids, avec une massemasse corporelle 25% plus faible qu'au début. 

    La cohorte était composée de patients en Argentine, au Brésil, à Taïwan et aux États-Unis, avec une moyenne d'âge de 48 ans, environ 70 % de femmes et un poids au début de 107 kilo en moyenne. Ils ont tous reçu des conseils pour manger moins et faire de l'exercice. Ces résultats « mettent en évidence le besoin de poursuivre le traitement pour prévenir une reprise de poids et s'assurer d'une baisse continue de poids », ce qui apporte d'importants bénéfices cardiaques, écrivent les auteurs.

    Un traitement continu pour cette maladie chronique qu'est l'obésité

    Leur publication montre, comme l'avaient déjà fait 4 autres essais cliniques, qu'avec cette nouvelle génération de médicaments, « du poids est repris de manière importante » en cas d'arrêt du traitement, résument-ils. « Les patients, les soignants et le public ne comprennent pas toujours que l'obésité est une maladie chronique qui demande un traitement continu, ce qui signifie que le traitement doit être stoppé quand les objectifs de perte de poids sont atteints », a déclaré Jeff Emmick, un responsable du laboratoire Eli Lilly, dans un communiqué de réaction à l'étude. Eli Lilly vend le Zepbound à 1 060 dollars par mois aux États-Unis -- un prix élevé, rarement remboursé par les assurances santé du pays.

    Cette nouvelle génération de médicaments augmente le risque de problèmes gastro-intestinaux. Et même s'ils sont rarement graves, ces effets secondaires pourraient peut-être, selon des experts, finalement outrepasser les bénéfices du traitement si celui-ci doit être administré sur le long terme.


    Ce médicament a permis à des patients obèses de perdre jusqu'à 15 % de leur poids

    Article de Julie KernJulie Kern, publié le 22 mars 2023

    Le Wegovy est un médicament injectable qui a permis à des patients obèses de perdre en moyenne 15 % de leur poids de corps. Si ce traitement a l'airair miraculeux, des incertitudes persistent sur ses effets à long terme.

    Près d'un Français sur deux est en surpoidssurpoids ou en obésité selon une étude récente coordonnée par l'Inserm. Un problème de santé publique dont l'incidenceincidence augmente de façon inquiétante chez les jeunes. La prise en charge de l'obésité commence par une modification du mode de vie pour espérer diminuer le poids de 10 % et ainsi limiter l'apparition de complication. Un objectif difficile à atteindre pour certaines personnes, les médecins peuvent alors proposer une chirurgiechirurgie ou la prise de certains médicaments. 

    Le Wegovy est autorisé en Europe depuis peu pour soigner l'obésité ou le surpoids accompagné de problème de santé. Il a fourni des résultats impressionnants lors de plusieurs essais cliniques, permettant aux patients de perdre environ 15 % de leur poids après plus d'un an de traitement. Mais des questions demeurent sur les risques qu'engendre l'utilisation du Wegovy sur le long terme. Est-ce une injection « miracle » pour lutter contre l'obésité ?

    Comment fonctionne le Wegovy ?

    Le Wegovy contient du sémaglutide (dosé à 2,4 mg), la même molécule contenue dans l'Ozempic, un antidiabétiqueantidiabétique vanté pour ses propriétés minceur sur TikTokTikTok. Il est aussi produit par le même fabricant, Novo Nordisk. Le sémaglutide, un agonisteagoniste des récepteurs GLP-1, augmente la sensation de satiété tout en diminuant la prise alimentaire et les sensations de manque chez les patients traités.

    Plusieurs études cliniquesétudes cliniques ont été conduites pour estimer l'efficacité du Wegovy. Objectif : que les participants perdent au moins 5 % de leur poids. Selon les études, 67 à 86 % des personnes avec un IMCIMC supérieur à 30 ou compris entre 27 et 30 avec des comorbiditéscomorbidités ont réussi à perdre au moins 5 % de leur poids, avec des moyennes comprises entre 10 et 16 %. Le même résultat n'a été obtenu que pour 30 à 40 % des participants placés sous placebo. La plupart des patients ont expérimenté des effets secondaires modérés comme des maux de tête, de la fatigue, des nausées et des maux de ventre. Des effets secondaires plus rares, mais plus graves, ont aussi été identifiés : des pancréatites, des calculs biliairescalculs biliaires, des problèmes rénaux, une augmentation du rythme cardiaque au repos ou encore un trouble de la vision, particulièrement chez les diabétiquesdiabétiques.

    Le Wegovy est vendu sous forme de stylo prêt à l'emploi et s'administre par injection sous-cutanée. © Novo Nordisk
    Le Wegovy est vendu sous forme de stylo prêt à l'emploi et s'administre par injection sous-cutanée. © Novo Nordisk

    Des incertitudes qui persistent malgré l'efficacité du Wegovy

    Malgré ces bons résultats, des incertitudes persistent sur les effets à long terme du Wegovy. Il a été testé pendant 68 semaines au maximum dans les essais cliniques, et les données manquent pour connaître ses effets sur le plus long terme. Les conséquences de l'arrêt du traitement sur le poids (certains patients ont repris les kilos perdus) et les comorbidités sont encore mal comprises.

    La balance bénéfice-risque est tout de même positive, ce qui a conduit l'Agence européenne du médicament à délivrer une AMMAMM au Wegovy. En France, la Haute Autorité de santé s'est prononcée en faveur de son remboursement sur ordonnance pour les personnes de moins de 65 ans en obésité sévère (IMC supérieur à 35) et qui n'ont pas réussi à perdre du poids avec une prise en charge nutritionnelle. En revanche, l'avis de remboursement est défavorable pour les personnes ayant un IMC inférieur à 35. Cet avis est valable deux ans et sera mis à jour avec la publication de données d'un essai clinique en cours visant à estimer la santé cardiovasculaire des participants.