Des chercheurs britanniques ont profité de la pandémie de grippe A(H1N1) pour étudier les paramètres physiologiques préservant certaines personnes des formes sévères de la maladie. L’agressivité du virus dépend d’un type particulier de cellule immunitaire, les lymphocytes T CD8. De quoi laisser présager un vaccin universel contre toutes les autres formes de grippe.

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    L'automneautomne va s'installer et le virus de la grippe réapparaîtra progressivement. Comme tous les ans. Pour endiguer au mieux cette menace, les autorités sanitaires proposent une campagne de vaccination, essentielle pour les populations fragiles et susceptibles de déclarer des formes sévères de la grippe, voire d'en mourir. Chaque année, il faut renouveler le vaccin, car le virus modifie les protéines de surface contre lesquelles on s'immunise.

    Pour éviter ce rendez-vous annuel, mais également protéger les populations contre des souches émergentes et épidémiques, de nombreux scientifiques tentent de développer un vaccin qui préserverait de toutes les formes de la grippe. Différentes pistes ont pour l'instant été observées, mais pour l'heure, aucune n'a abouti.

    De l'autre côté de la Manche, des chercheurs de l'Imperial College de Londres ont profité des circonstances de la pandémie de grippe A(H1N1), qui a traversé le monde entre juin 2009 et août 2010, pour mener une expérience. Par chance, cette épidémieépidémie s'était révélée relativement peu mortelle, bien que le nombre de décès ait probablement été sous-évalué. Mais elle a fourni à ces Britanniques des informations sur les facteurs physiologiques et cellulaires qui permettraient de comprendre quelles populations sont les plus à même de déclencher des formes sévères de la maladie. La réponse tient en quelques mots : les lymphocyteslymphocytes T CD8, comme expliqué dans la revue Nature Medicine.

    Des lymphocytes T CD8, protecteurs universels contre la grippe

    Au début de la pandémiepandémie, des échantillons de sang et des prélèvements nasaux ont été récoltés chez 342 volontaires. Toutes les trois semaines, ces participants recevaient un e-mail auquel ils devaient répondre en décrivant leur état de santé et les symptômessymptômes éventuellement ressentis durant ce laps de temps. En cas de symptôme grippal, ils devaient envoyer au laboratoire un nouveau prélèvement nasal, pour détecter l'éventuelle présence du virus. Le suivi s'est étalonné sur deux saisonssaisons grippales.

    Les virus de la grippe présentent des protéines de surface différentes selon les sous-types. Mais dans leur cœur résident des gènes plus communs à toutes les souches, qui peuvent être ciblés par les lymphocytes T CD8. De quoi espérer un traitement universel contre la grippe. © Cynthia Goldsmith, CDC

    Les virus de la grippe présentent des protéines de surface différentes selon les sous-types. Mais dans leur cœur résident des gènes plus communs à toutes les souches, qui peuvent être ciblés par les lymphocytes T CD8. De quoi espérer un traitement universel contre la grippe. © Cynthia Goldsmith, CDC

    Les résultats montrent que la sévérité des symptômes dépend du taux initial de lymphocytes T CD8, ces globules blancsglobules blancs chargés d'éliminer les cellules infectées. Plus les participants en avaient, plus la grippe était bénigne, l'inverse se vérifiant également.

    Les auteurs suggèrent donc qu'aider les individus à produire davantage de lymphocytes T CD8 préserverait des formes graves de la grippe A(H1N1), et même au-delà. Si les vaccins classiques se focalisent sur les protéines de surface variables, ces cellules immunitaires ciblent également le cœur du virus, beaucoup moins changeant d'un variant à l'autre. De cette façon, les scientifiques pensent pouvoir développer prochainement un traitement préventif universel contre la grippe.

    Une solution imparfaite… mais mieux que rien

    Pour Ajit Lalvani, qui a supervisé ce travail, ce vaccin pourrait être prêt dans cinq ans, d'après ce qu'il confie à la BBC. Les chercheurs disposent du savoir-faire nécessaire pour stimuler la production de lymphocytes T CD8 chez les individus. Cependant, le défi est de taille car il faudra concevoir un produit capable d'assurer la production sur le long terme.

    Bien que le concept soit intéressant, un tel vaccin ne sera probablement jamais assez puissant pour épargner la population mondiale de la grippe, mais il abaisserait la gravitégravité et donc la mortalité de cette maladie contagieuse. Une bonne chose quand on constate que régulièrement, des formes épidémiques et dangereuses émergentémergent dans le monde. Rappelons-nous de la grippe A(H5N1), apparue en 1997 et qui, depuis 2003 a tué 378 des 637 personnes qu'elle a infectées (taux de mortalité de 59 %). En mars dernier, c'est en Chine qu'une nouvelle épidémie commençait, avec cette fois une souche A(H7N9), qui n'avait jamais touché l'Homme. En quelques mois, elle a conduit à la mort 44 personnes sur les 135 infectées. Et ce n'est peut-être qu'un début. Toute solution, même partielle, est donc bonne à prendre.