On sait depuis longtemps qu'une alimentation trop salée est un facteur d'hypertension. Une nouvelle étude montre que l'excès sel nous rend aussi plus vulnérable aux infections. Manger deux menus de fast-foods dans la journée suffit ainsi à amoindrir significativement la réponse anti-bactérienne des cellules immunitaires.
[EN VIDÉO] Naturellement vôtre : six conseils du Dr Cocaul pour manger mieux Quels sont les bons réflexes à adopter pour améliorer son alimentation au quotidien ? Manger moins vite, privilégier les aliments bruts et bien d'autres. Pour Futura, le nutritionniste Arnaud Cocaul partage avec vous quelques conseils simples pour reprendre son alimentation en main.
L'Organisation mondiale de la Santé (OMS) préconise une consommation de 5 grammes par jour. Or, en France, la consommation moyenne de sel ajouté est de 9 g/jour en moyenne chez les hommes et de 7 g/j chez les femmes, d'après l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses). De très nombreuses études ont montré les méfaits de cet excès de sel : il favorise la rétention d'eau, l'hypertension artérielle et les maladies cardiovasculaires. Il accroît aussi le risque d'ostéoporose et de déclin cognitif chez les personnes sédentaires. Une nouvelle étude de l'université de Bonn, parue dans Science Translational Medicine, met en évidence un nouvel effet néfaste du sel : ce dernier affaiblirait le système immunitaire en le rendant plus sensibles aux infections bactériennes.
Le sel renforce la réponse immunitaire… sur la peau
De précédentes études allaient pourtant dans le sens inverse. En stimulant la production de macrophages et de lymphocytes T, le sel aiderait à lutter contre les maladies de peau parasitaires comme la leishmaniose ou l'eczéma atopique. Le sel est, par ailleurs, cytotoxique pour les bactéries. Mais, pour Katarzyna Jobin, principale auteure de la nouvelle étude, ces observations, peut-être valables pour la peau, ne peuvent pas être généralisées au niveau de l'organisme entier. « La concentration en sel est maintenue en grande partie constante dans le sang et dans les différents organes, explique la chercheuse. Dans le cas contraire, des processus biologiques importants seraient altérés ». La seule exception est justement la peau, qui fonctionne comme un « réservoir de sel » pour l'organisme.
Pour le reste, le sel en excès est filtré par le rein et excrété dans l'urine. Et c'est là que se situe le problème : la médullaire rénale, qui sert de « capteur » pour maintenir l'équilibre sanguin en sel et en eau, entraîne une accumulation de glucocorticoïdes lorsqu'on mange trop salé. Ces derniers inhibent à leur tour l'action des granulocytes neutrophiles, des cellules immunitaires qui s'attaquent aux bactéries. Bien que leur nombre reste constant, ces derniers semblent beaucoup moins efficaces -- c'est d'ailleurs pourquoi la corticostérone est utilisée comme anti-inflammatoire.
Deux gros hamburgers par jour suffisent à affaiblir les cellules immunitaires
Pour démontrer ce mécanisme, les chercheurs ont soumis des souris infectées par la Listeria à un régime riche en sel, et ont constaté que ces dernières présentaient une concentration de bactéries pathogènes 100 à 1.000 fois supérieure à celle des souris normales. Même conclusion pour les infections urinaires à E.Coli, qui guérissent également beaucoup plus lentement chez les souris nourries avec un régime très salé, note l'étude. Les chercheurs ont poursuivi leur investigation chez l'humain. Dix volontaires ont été nourris avec un régime hypersodé (6 g de sel supplémentaire par jour, l'équivalent de deux gros hamburgers) pendant une semaine. Résultat : une augmentation de corticostérone pouvant aller jusqu'à 500 %.
« Nos travaux soulignent la limite des expériences menées sur des cultures cellulaires, souligne Katarzyna Jobin. Ce n'est qu'en étudiant un organisme dans son entier que nous avons pu découvrir les circuits de contrôle complexes qui lient la consommation de sel à cette immunodéficience ». À méditer lorsque vous lirez les prochains titres tapageurs de résultats scientifiques.
- Le sel était jusqu’ici connu pour augmenter la réponse immunitaire, notamment dans les infections cutanées.
- Au niveau global, le sel semble pourtant avoir l’effet inverse, en affaiblissant l’action des granulocytes neutrophiles spécialisés dans la phagocytose des bactéries.
- Un effet dû au rein qui réagit à l’excès de sel en sécrétant des glucocorticoïdes.
Des marais salants de couleur vive Du côté d’Aigues-Mortes (Gard), le sel est exploité depuis l’Antiquité. Et depuis 1995, les salins sont inscrits à l’inventaire général du patrimoine culturel. Il s’agit là d’une production classique de sel de mer en bord de Méditerranée. De l’eau est d’abord pompée dans des bassins situés à quelques mètres au-dessus du niveau de la mer. Puis, elle circule de bassin en bassin, sa salinité augmentant au fur et à mesure jusqu’à atteindre les quelque 260 grammes par litre. La récolte se fait du côté de ce que les professionnels appellent les tables salantes, des bassins moins profonds.Ici, une algue microscopique, la Dunaliella salina, donne à l’eau une belle couleur rouge rosée. Et après la vidange de cette eau, la récolte du sel se fait mécaniquement, à l’aide de tracteurs à pelle qui bâtissent de petites montagnes de sel. © Bernard Girardin, Fotolia
Un sel à l’effet miroir Près de 11.000 km2 de sel blanc. Le salar d’Uyuni est non seulement la plus grande étendue de sel au monde, quelque part dans les Andes, au sud-ouest de la Bolivie, mais aussi la plus élevée puisque le salar d’Uyuni se situe à quelque 3.700 mètres d’altitude. Il est le résultat de l’assèchement d’un lac préhistorique.Ici, la récolte du sel se fait de façon traditionnelle. Pendant trois mois, la surface du salar est recouverte d’eau sur 30 à 40 centimètres, formant un magnifique miroir d’eau salée. Puis, les vents sèchent les lieux. Le sel est alors rassemblé en monticules pour aider à l’évaporation de l’eau et faciliter ensuite son transport. Il est ensuite séché au feu et peut être enrichi en iode.Le pouvoir salant du sel blanc du salar d’Uyuni est fort. C’est un sel riche en parfums. Il peut être utilisé comme une fleur de sel. © Lucag, Wikimedia, CC by-sa 2.5
Un sel unique, ramassé à flanc de montagne Établies à flanc de montagne, à quelque 3.300 mètres d’altitude, les salines de Maras (Pérou) sont exploitées depuis l’époque Inca. Elles sont morcelées en environ 3.000 petits bassins. Elles offrent une vue imprenable sur la Vallée sacrée. Et elles sont toujours exploitées par des familles — aujourd’hui réunies en coopérative — qui les ont reçues en héritage. Mais, depuis l’arrivée de la production industrielle de sel de mer, celles-ci ne peuvent plus vivre uniquement de la vente de ce sel.Le sel de Maras n’est ni un sel de terre ni un sel de mer. C’est un sel de rivière. Car ce sont des eaux souterraines qui déposent le sel dans les bassins, le soleil faisant ensuite évaporer ces eaux. En un mois, l’épaisseur de sel atteint environ 10 centimètres. Il est alors placé dans des sacs. © Diego Delso, Wikipedia, CC by 4.0
De la roche volcanique pour un sel noir À Hawaï (États-Unis), lorsque la pluie ruisselle le long des pentes des volcans, elle emporte avec elle de la roche noire. Celle-ci arrive ainsi jusqu’aux sites de production de sel. Résultat, après évaporation : un cristal de sel joliment noir. Aujourd’hui, de la roche noire, riche en charbon actif, est ajoutée artificiellement dans les salines pour produire ce type particulier de sel.Son origine particulière donne au sel noir d’Hawaï une saveur presque fumée. Il est conseillé de l’utiliser au moment de servir, car il fond rapidement et transmet alors sa couleur aux aliments. Il se marie très bien avec les fruits de mer.Le sel noir d’Hawaï contient moins de chlorure de sodium que le sel de table classique. Il est donc meilleur pour la santé. D’autant que le charbon actif qu’il renferme a des effets positifs sur le système digestif. © Marek Gottschalk, Fotolia
Un sel de rivière couleur pêche À l’embouchure du fleuve Murray River — le plus long d’Australie — et de la rivière Darling, est récolté un étonnant sel en flocons, plats et fins presque comme des copeaux, à la couleur orangée de pêche. Ce sel particulier est bien sûr rare, la teneur en sel des rivières étant bien moindre que celles des océans et des mers.Sa belle couleur lui vient d’une algue qui pousse dans la baie et des saumures minéralisées par d’anciens aquifères salins du bassin de Murray Darling. Des saumures riches en magnésium, en calcium et comportant un peu de potassium et d’iode.Ce sel est récolté de manière semi-artisanale. Un peu comme on extrait la fleur de sel du côté des marais salants de l’île de Ré. Et il échappe à tout raffinage.En cuisine, c’est un sel croquant apprécié sur une salade de tomates, sur un poisson grillé ou une viande blanche. © anna. q, Fotolia
Un sel rose au cœur de l’Himalaya Le sel rose de l’Himalaya — que l’on nomme aussi sel rose du Cachemire — est un sel de terre. De quoi en faire un sel exempt d’iode tout en étant riche en oligo-éléments, en fer, en potassium, en magnésium ou encore en calcium. Il est délicatement extrait à la main de roches datant de millions d’années. On le trouve dans des mines de sel, à des profondeurs variant entre 400 et 700 mètres. Ce qui lui permet d’éviter de subir des opérations de raffinage, de rester plutôt propre et pur, et d’en faire finalement l’un des sels les moins nocifs pour la santé.Ce sel, qui doit sa couleur aux oxydes de fer qu’il contient en grande quantité, est plus délicat que le traditionnel sel de table. Il convient donc de l’utiliser plutôt en assaisonnement — de viandes ou de légumes — que pour saler une eau de cuisson. © Chaded, Fotolia
Un sel extrêmement rare, teinté de bleu Le sel bleu de Perse est l’un des plus vieux et l’un des plus rares sels du monde. Il est issu du nord de l’Iran. Extrait à la main des montagnes de la province de Semman. Un sel de roche donc, un sel halite qui doit la couleur bleue de certains de ses cristaux à la présence peu banale de sylvine, un minéral à base de chlorure de potassium cristallin.Le sel bleu de Perse est riche en calcium, en magnésium, en fer et en potassium. En cuisine, il apporte une touche presque épicée et une subtile acidité. De quoi en faire le sel parfait pour assaisonner poissons, fruits de mer et plats fins tels que foie gras ou truffes. D’autant que la pointe de couleur qu’il apporte rehaussera, elle aussi, étonnamment ces plats. © Marek Gottschalk, Fotolia
Du sel au cœur de la Silicon Valley Au cœur de la Silicon Valley, dans la baie de San Francisco, les marais salants offrent aux curieux un spectacle étonnant. Ils se forment à partir d’une eau salée contenue dans les digues d’anciens terrains de marée de la rive ouest de la baie.Et, au fur et à mesure de l’évaporation de l’eau, l’œuvre de différents micro-organismes va donner des couleurs contrastées aux bassins. Des algues vertes et rouges, d’abord. Des crevettes saumures orange ensuite. Ou d’autres encore. En fin de cycle, lorsque toute l’eau s’est évaporée, il ne reste que la blancheur du sel qui est récolté mécaniquement. © Dog Searls, Wikipedia, CC by 2.0
Un sel qui se dépose en perles sur les plages Le lac Assal — situé à l’est de l’Afrique, au cœur de Djibouti — est particulier à plus d’un titre. D’abord parce qu’avec une altitude inférieure à 150 mètres sous le niveau de la mer, il représente le point le plus bas de l’Afrique. Ensuite, parce que sa partie sous l’eau est extrêmement salée. On dit même que c’est le lac le plus salé du monde. On y trouve 350 grammes de minéraux par litre d’eau. C’est dix fois plus que dans la mer. Enfin, parce qu’il présente une partie sèche constituée de plages de sel blanc.Sous l’effet des courants et des vagues, du vent et de la chaleur, ce sel se dépose en billes de tailles variables, allant de quelques millimètres à plusieurs centimètres. Un sel qui est ramassé tel quel, puis transporté à dos de dromadaires par de longues caravanes de sel.Les perles de sel de Djibouti sont particulièrement pures, non raffinées, non iodées et riches en minéraux et en oligo-éléments ainsi qu’en parfums. © truba71, Fotolia
Le sel gris de Guérande, un sel brut Le sel gris de Guérande (France) est un sel de mer brut, non lavé et non traité. Le gros sel de Guérande est récolté de manière artisanale par des sauniers aussi appelés paludiers. Il est riche en magnésium, en potassium, en calcium et en oligo-éléments. Nul besoin d’en abuser, donc, pour qu’il apporte une véritable valeur gustative.Le sel gris est plus grossier que la fleur de sel, mais c’est également un sel dit humide qui contient généralement plus de 10 % d’eau résiduelle. En raison de sa complexité minérale, il relève avantageusement le goût des viandes rouges et des légumes racines. © katrinshine, Fotolia
Des marais salants sur une île Au cœur de l’île de Noirmoutier (Vendée), les marais salants tiennent une place de taille. Ils recouvrent même un tiers de l’île. Ici, le sel est une véritable tradition. Les sauniers y perpétuent un savoir-faire ancestral de récolte artisanale. Et, à la belle saison, ils apprécient tout particulièrement faire découvrir leur travail aux curieux.Sur l’île de Noirmoutier, l’eau de mer circule dans un réseau de canaux et de bassins. L’évaporation permet alors à la concentration en sel de passer de 35 à 300 grammes par litre. Lorsque le gros sel se cristallise, il se dépose au fond de bassins en argile et les sauniers le récoltent à l’aide d’une lousse, une sorte d’écumoire. Et c’est uniquement au plus chaud de l’été que de fins cristaux de fleur de sel peuvent cristalliser à la surface de l’eau. © Thierry Ryo, Fotolia