Malgré près d`un siècle de lutte, les trypanosomoses humaines africaines ou maladies du sommeil demeurent un problème préoccupant.

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    L'Organisation mondiale de la santéOrganisation mondiale de la santé estime à 60 millions la population exposée dans 36 pays de l'Afrique et à 400 000 le nombre de nouveaux malades infectés chaque année par la trypanosomiase. En Afrique de l'Ouest et centrale, la maladie, mortelle en absence de traitement, est due à des protozoaires flagellés du genre Trypanosoma brucei gambiense. Elle connaît une ré-émergenceémergence depuis une dizaine d'années et de nouveaux moyens de lutte sont attendus. La transmission du trypanosome à l`hôte mammifèremammifère, homme et bétail, est assurée par un insecteinsecte hématophage (qui se nourrit de sang), la glossine ou mouche tsé-tsé. La détection et l'identification du parasiteparasite chez l'hôte et le vecteur sont essentielles si l'on veut lutter efficacement contre la maladie.

    Dans ce " combat ", les marqueurs moléculaires présentent un grand intérêt du fait de leur spécificité et de leur sensibilité : ils permettent de détecter et d`identifier les différents types de trypanosome circulant chez l`homme, les autres hôtes mammifères et le vecteur. Récemment, les chercheurs de l'IRDIRD ont développé des marqueurs très sensibles qui permettent de dresser une carte d'identité des trypanosomes à partir de leur génotype (l'ensemble des caractéristiques génétiques d'un individu). Ils ont par ailleurs décelé l'existence de deux souches de Trypanosoma brucei gambiense chez un même malade. L'une est-elle plus virulente que l'autre ? Les chercheurs n'ont pu encore l'établir. Par ailleurs, ils ont pu confirmer la présence de ce parasite pathogènepathogène pour l'homme dans la faunefaune domestique et, surtout, l'ont mis en évidence chez des animaux sauvages, singes (cercocèbes), petits rongeursrongeurs (rat de Gambie et athérure) et petits carnassiers (genettegenette).

    L'identification précise des parasites va permettre de les " tracer " chez l'homme et dans le réservoir animal, de suivre leur propagation et leur distribution en relation avec la virulence et la résistancerésistance aux médicaments.

    Dans l'insectarium du laboratoire commun à l'IRD et au Cirad-EMVT (Elevage et médecine vétérinairevétérinaire) du campus de Baillarguet (Montpellier), les chercheurs étudient de près la glossine. Les scientifiques sont certains d'une chose au moins : la tsé-tsé n'est pas seulement une " seringue " mais un lieu privilégié d'interactions et de sélection, conditionnant l`installation du parasite dans un environnement où il pourra se multiplier. Ils " nourrissent " donc diverses espècesespèces de tsé-tsé avec différentes espèces de parasites, infections simples ou mixtes, avant de les faire saliver pour analyser ce qu'elles " recrachent ". Toutes les glossines vont-elles transmettre les parasites ? Existe-t-il des couples préférentiels glossines-trypanosomes ? Dans la nature, la glossine peut ingérer plusieurs espèces de trypanosomes. La compétition entre différentes espèces, différentes souches de trypanosomes peut-elle compromettre (ou augmenter) la survie de certaines ? Si plusieurs génotypes différents sont hébergés chez la glossine, un seul sera-t-il sélectionné ou vont-ils être transmis tels quels ? Peuvent-ils donner " naissance ", à la suite d'une recombinaisonrecombinaison, à un nouveau génotype ? Les recherches sur les marqueurs moléculaires sont essentielles pour répondre à ces interrogations.

    Pour compléter ce " traçage " des parasites et de leurs souches les plus dangereuses, et surtout dessiner une carte de leur distribution géographique plus précise, d'autres moyens sont utilisés comme le satellite. L'image satellitaire devrait permettre de localiser les environnements propices à la rencontre, c'est-à-dire à la contaminationcontamination, entre l'homme, le réservoir animal et la glossine, et d'alerter sur le repérage des lieux dangereux. Car la lutte coûte cher et si, après avoir mieux identifié les formes des trypanosomes, l'on détermine mieux également les lieux où ils risquent d'interagir avec l'homme, l'animal et les vecteurs, la lutte sera plus efficace, mieux ciblée et donc moins onéreuse.

    Ces recherches effectuées par l'IRD en collaboration avec le Cirad, essentiellement en Afrique centrale et occidentale, constituent une approche multidisciplinaire où les trois acteurs du système de transmission de la maladie (vecteurs/parasites/hôtes) sont étudiés simultanément, en liaison avec les facteurs environnementaux et socio-économiques.