La cigarette électronique, un outil pour cesser de fumer ? Les autorités sanitaires françaises viennent de rejeter l’idée au moment même où le Royaume-Uni assume pleinement ce choix, des divergences qui témoignent d’incertitudes persistantes après des années de polémique.


au sommaire


    Les cigarettes électroniques « ne peuvent pas à ce jour être présentées comme des outils de réduction des risques liés au tabac », résume, dans un avis paru cette semaine, le Haut conseil de santé publique (HCSP), l'un des organismes guidant les politiques de santé en France. C'est la dernière réponse en date à un vieux questionnement : jusqu'où ces « vapoteuses » marquent-elles un progrès par rapport aux cigarettes classiques ?

    Contrairement à ces dernières, les cigarettes électroniquescigarettes électroniques ne contiennent ni goudron ni monoxyde de carbone, les deux principaux éléments à l'origine des innombrables cancers et maladies cardio-vasculaires liés au tabagisme. Mais, le plus souvent, elles sont chargées en nicotine, la substance à l'origine de l'addiction au tabac. Et leur vapeur contient des particules finesparticules fines dont on ignore encore les effets à long terme.

    Voir aussi

    Cigarette électronique : un risque de cancers et de maladies cardiaques

    À cause de ce statut incertain, les vapoteuses sont, depuis plusieurs années, à l'origine de polémiques qui opposent parfois plusieurs instances. En 2019, l'Académie française de médecine avait par exemple défendu les cigarettes électroniques contre l’Organisation mondiale de la santé, l'OMS, qui les jugeait « incontestablement » nocives.

    Pas un outil pour les médecins

    Tout ne fait pas débat. Il n'y a guère de doute quant au fait que les vapoteuses sont nettement moins dangereuses que les cigarettes traditionnelles. Inversement, il y a un large consensus pour estimer qu'il ne faut pas considérer les cigarettes électroniques comme un produit « innocent » de consommation courante. On doit donc les déconseiller à un non-fumeur.

    Mais, entre ces deux extrêmes, figure toute une gamme de questionnements irrésolus. Par exemple, chez les jeunes, la cigarette électronique réduit-elle le risque de commencer à fumer ou pousse-t-elle au contraire à franchir le pas ? Ou encore, la question abordée cette semaine par les autorités sanitaires françaises : faute de mieux, doit-on proposer à un fumeur de vapoter pour le sortir de son addiction ? Non, disent-elles, et c'est un durcissement. Dans leur précédent avis, cinq ans plus tôt, elles jugeaient que la cigarette électronique pouvait « être considérée comme une aide » pour réduire sa consommation. Les autorités sanitaires n'excluent certes pas que la cigarette électronique puisse aider certains fumeurs à s'en sortir au cas par cas, mais elles se refusent à en faire un outil pour les médecins.

    La cigarette électronique, venue de Chine, est en plein essor en France et connaît déjà plus de 1,5 million d'adeptes, appelés « vapoteurs », qui l'utilisent le plus souvent pour se sevrer du tabac. © Ibrahim Ba'him, picasaweb, cc by sa 3.0
    La cigarette électronique, venue de Chine, est en plein essor en France et connaît déjà plus de 1,5 million d'adeptes, appelés « vapoteurs », qui l'utilisent le plus souvent pour se sevrer du tabac. © Ibrahim Ba'him, picasaweb, cc by sa 3.0

    Une situation contraire au Royaume-Uni

    Cette position contrastecontraste avec la situation britannique. Le Royaume-Uni est en effet parti pour devenir le premier pays où des cigarettes électroniques pourront être prescrites médicalement et, donc, partiellement remboursées par le système de santé. C'est la conséquence d'une mesure prise en octobre 2021 par le gouvernement britannique afin de permettre dans les faits aux fabricants de cigarettes électroniques de faire approuver leurs vapoteuses par le régulateur des produits de santé.

    Cette décision a, là encore, provoqué de vives divisions dans le monde scientifique et médical. Le gouvernement l'a justifiée par l'état des études scientifiques en cours. Mais, paradoxalement, c'est aussi l'argument employé en France par le Haut conseil de santé publique pour ne pas recommander la vapoteuse aux fumeurs qui cherchent à s'arrêter.

    Des études peu concluantes

    Qui croire ? En réalité, les études sur le sujet peinent à se montrer concluantes dans un sens ou l'autre, alors même qu'elles se sont accumulées ces dernières années. Il y a des preuves « modérées » que la cigarette électronique est plus efficace pour arrêter de fumer que d'autres traitements, comme les substituts à la nicotine, selon une organisation très respectée dans le monde scientifique, Cochrane, qui compile de nombreuses études sur un même sujet et actualise régulièrement ses conclusions. Mais celles-ci restent prudentes et d'autres travaux du même type se montrent encore moins affirmatifs.

    « Nous n'avons pas trouvé de données solidessolides qui établissent un lien entre la cigarette électronique et le fait d'arrêter de fumer », jugeaient en novembre les auteurs d'une étude publiée dans la revue Tobacco Prevention & Cessation. Ce travail compile, comme celui de Cochrane, plusieurs dizaines d'études préalables. Les auteurs admettent qu'une partie de celles-ci tendent à établir un lien entre vapoteuse et arrêt du tabagisme. Mais ces études sont « systématiquement » de faible qualité, concluent-ils.


    La cigarette électronique n’est pas un médicament

    Article de Janlou Chaput publié le 9 octobre 2013

    Les députés européens ont tranché hier au Parlement de Strasbourg : la cigarette électronique ne sera pas vendue en pharmacie, mais bien dans les boutiques spécialisées, car il ne s'agit pas d'un médicament. En parallèle, la législation antitabac a été renforcée.

    Ils sont 7 millions en Europe et plus de 1,5 million rien qu'en France. Les adeptes de la cigarette électronique pourront toujours acheter leurs aides au sevrage tabagique dans les bureaux de tabac et les boutiques spécialisées, et pas en pharmacie, comme le préconisait un projet de loi débattu au Parlement européen de Strasbourg. Ce mardi 8 octobre, la majorité des eurodéputés a voté pour que l'on ne considère pas l'e-cigarette comme un médicament.

    Ces produits, dont l'innocuité n'a pas été prouvée, contiennent de la nicotine, moléculemolécule associée à la dépendance tabagique. Mais à la différence de la cigarette classique, ils sont exemptés de goudrons et autres particules solides qui contribuent à la toxicitétoxicité du tabac. Ils restent cependant interdits aux mineurs et toute publicité est prohibée.

    La cigarette électronique reste cantonnée aux magasins spécialisés, et n'ayant pas le statut de médicament, est interdite de vente dans les pharmacies. © Idé
    La cigarette électronique reste cantonnée aux magasins spécialisés, et n'ayant pas le statut de médicament, est interdite de vente dans les pharmacies. © Idé

    La cigarette électronique oui, le tabac non !

    Ces mesures ont été votées dans le cadre plus large d'une nouvelle législation antitabac, qui va globalement se durcir. Ainsi, à l'avenir, 65 % des paquets de cigarettes seront recouverts par des messages d'avertissement (contre les 75 % qui avaient été demandés), tandis que la marque se retrouvera tout en bas. Les cigarettes fines, dites « slim », pourront toujours être commercialisées. En revanche, les cigarettes aromatisées sont amenées à disparaître dans les trois prochaines années, à l'exception du menthol qui obtient un sursis de huit ans.

    Le vote s'est tenu après des mois de campagne des lobbies du tabac pour convaincre les eurodéputés d'aller dans le sens de leurs intérêts et de vider le projet de sa substance. Ils ont voulu repousser le vote de quelques mois, après les futures élections européennes de 2014.

    Désormais, il revient aux 28 pays impliqués d'analyser le texte soumis. Dans le meilleur des cas, ces mesures ne pourront être mises en place avant 2017, pour lutter contre un fléau qui emporte chaque année 700.000 Européens.