La mort subite du sportif n’est pas un mal typiquement humain. L’autopsie de deux chimpanzés morts en pleine force de l’âge dans le zoo de Londres en 2004 et 2008 révèle qu’ils auraient tous deux succombé à un trouble ressemblant très fortement à la dysplasie ventriculaire droite arythmogène, trouble cardiaque impliqué dans plus de 20 % des décès constatés durant l’effort physique.

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    Chaque année, des drames humains se déroulent sur les terrains de sport. Le plus souvent des hommes, encore jeunes et parfois adeptes du sport de longue date, s'effondrent, à cause d'un cœur qui lâche. C'est la mort subite du sportif.

    Certains professionnels succombent même sous l'œil des caméras. En 2003, l'image du footballeur camerounais Marc-Vivien Foé est restée célèbre : le grand gaillard d'1 m 88 s'écroule tout seul sur la pelouse du stade Gerland de Lyon, les yeux révulsés. Il ne se relèvera plus. Plus récemment, en 2007, c'était le championnat de football espagnol qui était endeuillé, lorsque dans le match opposant le FC Séville au Getafe CF, le latéral droit sévillan de 23 ans Antonio Puerta tombe à terre, victime d'un arrêt cardiaque. Réanimé, il en fait d'autres dans les vestiaires et sur le chemin de l'hôpital. Malgré les efforts des médecins, il décède.

    Le jeune international espagnol a été diagnostiqué avec une pathologie cardiaque responsable de plus de 20 % des morts subites du sportif : la dysplasiedysplasie ventriculaire droite arythmogène. Le muscle cardiaquemuscle cardiaque est partiellement remplacé par du tissu fibreuxfibreux et adipeux, qui empêche le cœur de se contracter. En général tout commence dans le ventricule droit, avant de s'étendre sur son opposé. La génétique semble expliquer entre 30 et 50 % des cas, les autres causes restent inconnues, bien que l'on suspecte des virusvirus ou le régime alimentaire.

    La mort subite du sportif ne frappe pas que le football. Le cyclisme est également fortement touché, notamment dans le monde amateur. Et les chimpanzés, qui ne pratiquent aucun de nos jeux, peuvent également s'écrouler spontanément. © Chuckwaters83, Flickr, cc by sa 3.0

    La mort subite du sportif ne frappe pas que le football. Le cyclisme est également fortement touché, notamment dans le monde amateur. Et les chimpanzés, qui ne pratiquent aucun de nos jeux, peuvent également s'écrouler spontanément. © Chuckwaters83, Flickr, cc by sa 3.0

    Deux chimpanzés meurent dans des circonstances étranges…

    Si les maladies cardiovasculaires deviennent l'une des principales causes de mortalité humaine, il en va de même chez nos cousins chimpanzéschimpanzés vivant en captivité. GorillesGorilles et orangs-outans en sont également victimes. Autant dire qu'elles ne sont pas le propre de l'Homme. Pourtant, jamais on n'avait encore observé de mort subite du sportif chez des grands singes... avant 2004 et 2008. Les deux victimes sont des chimpanzés du zoo de Londres.

    Une étude publiée dans Veterinary Pathology relate le cas de ces deux demi-frères, morts à 17 et 16 ans, dans des circonstances troublantes. L'aîné a été retrouvé mort, alors qu'il paraissait en parfaite santé et que les trois examens cardiaques n'avaient décelé aucune anomalieanomalie. Quant au second, il semblait également bien se porter et ne s'était pas battu avec un congénère auparavant lorsque tout à coup il s'est effondré. Les soigneurs ont tenté la réanimation. En vain.

    La mort subite du sportif expliquée par les singes ?

    Les corps ont été autopsiés par Mary Sheppard, spécialiste de la mort subite du sportif à l'Imperial College de Londres. Ses observations font part d'une très grande similitude entre les cœurs des deux grands singes et ceux des personnes touchées par la dysplasie ventriculaire droite arythmogène, avec notamment la présence de tissu fibreux et graisseux en lieu et place du muscle cardiaque.

    Reste à déterminer la cause de la maladie. La génétique ? Les chimpanzés étaient nés du même père. La pathologie cardiaque étant autosomiqueautosomique dominante, une seule version défectueuse du gènegène émanant de leur aïeul commun pourrait expliquer le cas. L'analyse ADN n'a pas été réalisée et la réponse est peut-être à chercher ailleurs.

    La dysplasie ventriculaire droite arythmogène n'étant que partiellement connue chez l'Homme, les histoires malheureuses de ces chimpanzés pourraient nous aider à mieux définir les causes de la maladie. Et sauver des vies humaines aussi bien que simiennes.