Des œuvres d’art multicolores ont été publiées dans une revue scientifique ! En réalité, il s'agit de cerveaux de drosophiles, ornés par les chercheurs de protéines fluorescentes, exprimées seules ou en association pour donner à chaque neurone une teinte particulière.

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    Ce spectacle multicolore est fourni par un ganglion cérébral de drosophile passé dans les mains de chercheurs américains (méthode dBrainbow). © Stefanie Hampel, Nature methods

    Ce spectacle multicolore est fourni par un ganglion cérébral de drosophile passé dans les mains de chercheurs américains (méthode dBrainbow). © Stefanie Hampel, Nature methods

    Vert, jaune, violet, rouge, bleu... Toutes ces couleurscouleurs à priori absentes des cerveaux des animaux se retrouvent aujourd'hui mélangées dans les 100.000 neurones du cerveau de drosophile, formant un tableau digne d'un peintre contemporain. Loin d'être dénuée de tout intérêt scientifique, cette technique permet de déterminer le rôle de chacune de ces cellules.

    Alors comment ont-ils pu réaliser une telle beauté ? La technique de base, appelée Brainbow (jeu de mot en anglais rassemblant les mots « arc-en-ciel » et « cerveau ») fut pour la première fois utilisée en 2007. Jeff Lichtman et Joshua Sanes du Harvard Brain Center avaient créé des souris transgéniquestransgéniques dont les neurones avaient été rendus multicolores grâce à l'insertion de gènes codant pour des protéines fluorescentes.

    GFP and co

    La plus connue de toutes, la GFP, produit de la fluorescence dans le vert. Elle provient de médusesméduses naturellement fluorescentes et est souvent utilisée en biologie cellulaire en fusionfusion avec des protéines d'intérêt pour visualiser leur localisation ou leur interaction avec d'autres protéines. Les progrès de la biologie moléculairebiologie moléculaire ont permis la modification des propriétés de fluorescence de la GFPGFP pour lui faire émettre de la lumièrelumière dans d'autres couleurs. Ainsi sont nées des protéines rouges, bleues, jaunes, orange... 

    C'est en modulant aléatoirement l'expression de ces gènes et donc la quantité relative de chaque couleur dans chaque neurone, qu'ils ont pu obtenir une grande quantité de nuances différentes, chaque cellule arborant une teinte issue d'un mélange des trois ou quatre couleurs de base (un peu comme les palettes de couleurs sur un ordinateurordinateur).

    Le ganglion cérébral de drosophile peut porter diverses couleurs, notamment grâce à la technique Flybow. © Iris Salecker, <em>Nature methods</em>

    Le ganglion cérébral de drosophile peut porter diverses couleurs, notamment grâce à la technique Flybow. © Iris Salecker, Nature methods

    Deux techniques pour une même finalité

    Cette technique a été adaptée par une équipe du Howard Hughes Medical Institute à Ashburn (États-Unis) à un InsecteInsecte, la mouche Drosophila melanogaster, sous le nom de dBrainbow. Dans chaque cellule de la mouche, deux copies d'un groupe de trois gènes colorés (bleu, vert et rouge) sont insérées. Grâce à l'intervention aléatoire d'une enzymeenzyme appelée recombinase, seul un des trois gènes par groupe peut être exprimé. Cela laisse donc une possibilité de six couleurs, nées du mélange des deux couleurs exprimées.

    D'un autre côté, une équipe du National Institute for Medical Research à Londres, a également développé une technique, Flybow, permettant l'expression aléatoire des protéines colorées en fonction des cellules. Deux paires de gènes sont chacune sur une cassette d'ADNADN, qui peut se retourner ou être éliminée grâce à l'activité d'une autre recombinase (Flp-FRT). Seul le gène positionné en première position sur l'ADN (derrière le promoteur) sera exprimé.

    Si les recombinases agissent assez tôt dans le développement du système nerveux, la couleur adoptée par une cellule sera transmise à ses cellules filles. Chaque structure cérébrale, née des divisions cellulaires successives des neurones, possédera alors la même couleur. 

    Ces travaux publiés tous deux dans la revue Nature methods permettent ensemble d'espérer une meilleure compréhension du fonctionnement complexe des réseaux de neurones. Par exemple, ces techniques appliquées à des drosophilesdrosophiles portant des mutations dans certains gènes permettront de comprendre leur implication dans le fonctionnement cérébral.