La mortalité liée à la Covid-19 ne se limite pas aux décès immédiatement après l’infection. La maladie augmenterait de 59 % le risque de décès dans les six mois suivants, selon une nouvelle étude. Faut-il vraiment s’attendre à une hécatombe post-Covid ?


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    Officiellement, la Covid-19 a fait plus de 100.000 morts en France. Le problème, c'est que ces statistiques ne comptabilisent que les morts immédiatement après l'infection. Or, la Covid-19 entraîne une surmortalité très importante pendant encore plusieurs mois après. Les survivants ont ainsi 59 % plus de risques de mourir dans les six mois suivant la maladie par rapport à une personne non infectée, selon une étude parue dans la revue Nature. Cela représente 8 décès supplémentaires pour 1.000 personnes.

    Quand on regarde la première phase de la maladie, on ne voit que la partie émergée de l’iceberg

    « Quand on regarde la première phase de la maladie, on ne voit que la partie émergée de l'iceberg, résume Ziyad Al-Aly, chef du service de recherche et développement du centre médical VA de Saint-Louis, qui a dirigé l'étude. Mais on commence à voir ce qu'il y a sous cet iceberg, et c'est vraiment inquiétant ». Une précédente étude avait montré que 75 % des patients souffraient encore de différents symptômes six mois après l'infection (voir ci-dessous). Pour cette nouvelle étude, les chercheurs ont analysé les données de 87.000 patients atteints de la Covid-19 issues du ministère américain des Anciens combattants, et calculé la probabilité de développer des complications à long terme potentiellement mortelles.

    75 % des patients Covid souffrent encore de symptômes six mois après la maladie. © Sara Moser ; adaptation C.D pour Futura
    75 % des patients Covid souffrent encore de symptômes six mois après la maladie. © Sara Moser ; adaptation C.D pour Futura

    La liste est impressionnante : insuffisance respiratoire, troubles neurocognitifs, anxiété, dépression, désordres métaboliques, malaises, douleurs musculaires, anémie, arythmie cardiaquearythmie cardiaque, atteinte hépatique et rénale, diabètediabète, thrombosethrombose... « Le ou les mécanismes qui sous-tendent les complications aiguës et chroniques de la Covid-19 ne sont pas entièrement clairs », admettent les auteurs. Certaines sont dues à un effet direct de l'infection virale et peuvent s'expliquer par la persistance du virusvirus dans l'organisme ou une hyperactivation du système immunitaire. « De plus, les effets indirects, comme les changements de condition sociale (réduction des contacts sociaux, solitude, etc.), économiques (perte d'emploi) et comportementaux (régime alimentaire, activité physiquephysique...) peuvent également influer sur l'état de santé et être responsables de certaines des manifestations cliniques ».

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    Un boom de la consommation médicamenteuse

    Mais le risque ne s'arrête pas là. Car tous ces patients ont recours à énormément de médicaments qui peuvent eux-mêmes engendrer des problèmes à long terme. Les auteurs ont ainsi évalué la probabilité de consommation de 380 médicaments et s'inquiètent particulièrement de l'utilisation massive d'opioïdesopioïdes (9,4 personnes qui en consomment en plus pour 1.000 personnes) ou des antidépresseurs avec un excès de consommation représentant 7,8 personnes supplémentaires pour 1.000. La prise de bronchodilatateursbronchodilatateurs, anticoagulantsanticoagulants ou beta-bloquants explose également. « Il se pourrait que l'on assiste bientôt à une flambée de suicides ou d'overdoses d'opïodes », s'inquiète Ziyad Al-Aly dans une interview à Bloomberg.

    Attention au pessimisme excessif

    Il convient cependant de ne pas sombrer dans le catastrophisme. Premièrement, la plupart des symptômes sont bénins et disparaissent d'eux-mêmes au fil du temps. Deuxièmement, rien n'indique que tous les symptômes décrits soient forcément liés à la Covid-19. Troisièmement, de nouveaux traitements pourraient arriver et réduire la gravitégravité et la fréquence des complications. Enfin, il est tout simplement possible que ces mystérieuses formes de Covid longue ne soient pas plus dramatiques que pour d'autres maladies infectieuses, mais qu'elles se remarquent plus du fait de la médiatisation de cette épidémieépidémie. « Tous ces patients seraient restés inconnus sans l'épidémie de Covid-19 », nous expliquait l’infectiologue Benjamin Davido en mai dernier.


    Covid longue : 75 % des patients toujours malades après 6 mois

    Article de Emma HollenEmma Hollen publié le 14/01/2021

    En cherchant à mieux discerner les contours de la Covid longue, les chercheurs ont fait une découverte inquiétante : un grand nombre des patients de Wuhan infectés il y a 6 mois présenteraient encore des symptômes de la maladie.

    Voilà des mois qu'ils ont été infectés, et pourtant, nombre d'entre eux présentent encore des symptômes de la maladie. À mesure que la recherche progresse, le nombre des personnes atteintes de la Covid longue continue de croître. Bien que les manifestations de ce syndromesyndrome particulier aient déjà été bien identifiées, le manque de recul dans le temps et d'études de grande envergure empêche pour l'instant les chercheurs de distinguer avec certitude ce qui définit la fin de l'infection.

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    Les résultats d'une étude longitudinale ont récemment été publiés dans la revue The Lancet et peignent un tableau inquiétant. Sur 1.700 patients wuhanais atteints par le virus entre janvier et mai, et suivis sur une duréedurée de six mois, pas moins de 76 % ont encore à recouvrer la santé. « Notre analyse indique que la plupart des patients continuent à vivre avec au moins certains des effets du virus après avoir quitté l'hôpital, et met en évidence un besoin de soins après la sortie de l'hôpital, en particulier pour ceux qui souffrent d'infections graves », explique le docteur Bin Cao, chercheur au Centre national de médecine respiratoire à Pékin.

    Les manifestations les plus fréquentes incluent une fatigue intense ou une faiblesse musculaire (63 % des cas), des troubles du sommeiltroubles du sommeil (26 %) et de l'anxiété ou de la dépression (23 %). Si les mécanismes derrière ces symptômes sont parfois difficiles à identifier et donc à quantifier, d'autres complications ne laissent, pour leur part, aucune place à l'ambiguïté. Ainsi, plusieurs personnes atteintes de formes sévères de la maladie n'ont pas encore récupéré leur pleine capacité respiratoire au bout de six mois, suggérant que les organes ont été endommagés durablement. D'autre part, chez 13 % des patients, alors que la fonction rénale était normale durant le pic de la maladie, les chercheurs ont constaté qu'elle se dégradait après la disparition des symptômes.

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    Le vaccin, meilleur remède face au doute

    Ces signes contribuent à renforcer le constat d'une Covid-19 qui s'étend sur une longue durée avec des frontières difficiles à délimiter. « La Covid-19 est une maladie si nouvelle que nous commençons tout juste à comprendre certains de ses effets au long courslong cours sur la santé des patients, poursuit Cao. Notre travail souligne l'importance de mener des études de suivi plus longues sur des échantillons plus importants afin de comprendre tout le spectrespectre des effets que la Covid-19 peut avoir sur les personnes. »

    Cao et son équipe ont également mesuré les taux d'anticorpsanticorps chez 94 patients pour constater que ceux-ci chutaient de plus de moitié au bout de 6 mois. Certaines études suggèrent pour leur part une immunitéimmunité pouvant s'étendre à 8 mois, mais quoi qu'il advienne, la conclusion à retirer de ces observations est claire : pour endiguer la propagation du virus, tout le monde devra se faire vacciner, y compris les personnes ayant déjà attrapé la maladie.

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