Des découvertes récentes suggèrent que les origines de la schizophrénie pourraient remonter aux tout premiers instants de la vie. Des chercheurs ont identifié des altérations génétiques survenant potentiellement durant la gestation précoce. Ces résultats ouvrent de nouvelles perspectives sur la compréhension et la prévention de ce trouble neurologique complexe.


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    La schizophrénie, un trouble mental affectant environ 1 personne sur 300 dans le monde, a longtemps été considérée comme le résultat d'une interaction complexe entre gènes et environnement. Toutefois, une étude publiée dans la revue Cell Genomics, en juillet 2023, apporte un éclairage nouveau sur les origines de cette maladie, suggérant que ses racines pourraient être plantées bien avant la naissance.

    Les mutations précoces : une piste prometteuse

    Une équipe de chercheurs dirigée par Eduardo Maury de la Harvard Medical School a réalisé une analyse génétique approfondie sur près de 25 000 individus, avec ou sans schizophrénie. Leur objectif ? Identifier des altérations génétiques potentiellement liées à ce trouble neurologique.

    Les scientifiques ont mis en lumièrelumière deux gènes particulièrement intéressants :

    • NRXN1 : impliqué dans la transmission des signaux entre les cellules cérébrales.
    • ABCB11 : connu pour coder une protéine hépatique.

    Ces gènes présentaient des variations du nombre de copies (CNV), une forme d'erreur génétique où des portions d'ADN sont soit dupliquées, soit supprimées. Le plus passionnant ? Ces mutations semblent survenir in utero, durant les premiers stades du développement embryonnaire.

    Des travaux de recherche sur la schizophrénie montrent des mutations somatiques (et non héréditaires) qui semblent survenir <em>in utero </em>durant le développement embryonnaire. © Visions, iStock
    Des travaux de recherche sur la schizophrénie montrent des mutations somatiques (et non héréditaires) qui semblent survenir in utero durant le développement embryonnaire. © Visions, iStock

    Une nouvelle perspective sur l'hérédité

    Traditionnellement, on estimait que 80 % des cas de schizophrénie étaient liés à des facteurs génétiques hérités des parents. Cette étude suggère en revanche qu'une partie non négligeable des cas pourrait être due à des mutations somatiquessomatiques, c'est-à-dire acquises après la conception.

    Chris Walsh, généticiengénéticien à l'Hôpital pour enfants de Boston et coauteur de l'étude, explique : « Nous observons des mutations qui ne sont pas héritées des parents ». Cette découverte bouleverse notre compréhension de l'origine de la schizophrénie et ouvre de nouvelles pistes de recherche.

    Type de mutation

    Caractéristiques

    Impact potentiel

    Héritée (germinale)

    Présente dans toutes les cellules

    ~80 % des cas de schizophrénie

    Acquise (somatique)

    Présente dans certaines cellules uniquement

    Pourcentage à déterminer

    Implications pour le diagnostic et le traitement

    Ces découvertes pourraient avoir des répercussions significatives sur la prise en charge de la schizophrénie :

    1. DiagnosticDiagnostic précoce : la détection de ces mutations pourrait permettre d'identifier les individus à risque bien avant l'apparition des symptômessymptômes.
    2. Traitements ciblés : une meilleure compréhension des mécanismes génétiques pourrait conduire à des thérapiesthérapies plus personnalisées.
    3. PréventionPrévention : à long terme, ces connaissances pourraient ouvrir la voie à des stratégies de prévention dès la grossessegrossesse.

    Il convient de noter que les mutations du gène ABCB11 ont été observées chez des patients ne répondant pas aux traitements antipsychotiquesantipsychotiques classiques. Cette information pourrait s'avérer cruciale pour adapter les approches thérapeutiques.

    Vers une compréhension globale de la schizophrénie

    Bien que prometteuses, ces découvertes ne constituent qu'une pièce du puzzle complexe qu'est la schizophrénie. D'autres facteurs, tels que les traumatismes de l'enfance ou certaines infections virales, jouent probablement un rôle dans le développement de ce trouble.

    Des recherches antérieures avaient déjà mis en évidence l'importance des processus développementaux précoces. Des études sur des organoïdes cérébraux (mini-cerveaux cultivés en laboratoire) avaient notamment suggéré qu'une division et une différenciation désorganisées des cellules cérébrales pouvaient être à l'origine de la schizophrénie.

    Ces nouvelles découvertes s'inscrivent donc dans un corpus de recherche en pleine expansion, ouvrant des perspectives fascinantes pour la compréhension et le traitement de ce trouble neurologique complexe.