Des chercheurs de l'université d'Hokkaidō ont récemment mis au point un hydrogel capable d'imiter certaines fonctions du cerveau. Tout comme nous, il peut apprendre et oublier des informations.


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    Ainsi que l'a démontré une récente étude, l'être humain n'a pas le monopole de la cognition. Néanmoins, s'il était déjà acquis pour la plupart d'entre nous que les animaux étaient eux aussi en mesure de formuler des pensées construites, l'idée qu'un morceau d'hydrogelhydrogel soit capable d'imiter certaines fonctionnalités de notre cerveau est autrement plus exotiqueexotique. C'est pourtant le tour de force que sont parvenus à réaliser des chercheurs de l'université d'Hokkaidō.

    Un outil multifonction

    Les hydrogels sont des matériaux flexibles composés, comme leur nom l'indique, d'une part importante d'eau contenue dans une architecture de chaînes de polymèrespolymères hydrophileshydrophiles. Présentés pour la première fois au XIXe siècle, les hydrogels possèdent des qualités qui en font des alliés de taille dans des domaines aussi variés que la médecine, l'agricultureagriculture ou encore la physique quantiquephysique quantique.

    « Les hydrogels sont d'excellents candidats lorsqu'il s'agit d'imiter les fonctions biologiques car ils sont mous et aqueuxaqueux comme des tissus humains, explique Jian Ping Gong, codirectrice de l'étude dont les résultats sont parus dans la revue PNAS. Nous sommes heureux de démontrer comment les hydrogels peuvent imiter certaines fonctions mémorielles des tissus cérébraux. »

    L'hydrogel peut être utilisé dans le domaine de la santé. Ce morceau contient des nanotubes de carbone qui peuvent servir à détecter les molécules signalant le début d'une maladie. © Bryce Vickmark
    L'hydrogel peut être utilisé dans le domaine de la santé. Ce morceau contient des nanotubes de carbone qui peuvent servir à détecter les molécules signalant le début d'une maladie. © Bryce Vickmark

    Hydrogel à mémoire de forme

    L'hydrogel utilisé pour l'étude, composé à 45 % d'eau, est placé entre deux plaques de plastiqueplastique, celle du dessus ayant été préalablement évidée par endroits pour créer des formes (comme un avion) et des lettres (comme le mot GELGEL). L'ensemble est ensuite immergé dans un bain d'eau froide dans le but de le stabiliser, puis dans un bain chaud. Là, l'hydrogel peut se gorger d'eau au niveau des zones exposées (là où la plaque a été découpée), créant ainsi une impression en relief du motif sur sa surface (naissance du souvenir). De retour dans le bain froid, le motif devient opaque via un processus baptisé « frustration de structure » (consolidation du souvenir), puis l'hydrogel libère petit à petit toute l'eau qu'il a absorbée jusqu'à ce que le motif en arrive finalement à disparaître (oubli).

    Plus l'hydrogel passe de temps dans le bain chaud (ou plus le bain est chaud), plus la marque du motif se révèle de manière intense dans le bain froid, et plus elle met longtemps à disparaître. « C'est comme chez les humains, commente Kunpeng Cui, le collaborateur de Gong. Plus vous passez de temps à apprendre quelque chose, ou plus le stimulus émotionnel est intense, plus il vous faut de temps pour oublier le souvenir. »

    Le « souvenir » imprimé sur l'hydrogel est capable de résister à des variations de températures et même à un étirement physique poussé. L'hydrogel lui-même peut enregistrer plusieurs souvenirs d'intensités différentes à la fois. Les chercheurs ont en effet soumis chaque lettre du mot GEL à une exposition toujours plus importante, pour les voir ensuite disparaître de manière séquentielle une fois dans l'eau froide. « Le système de mémorisation de l'hydrogel, similaire à celui du cerveau, pourrait être exploré plus en avant pour des applicationsapplications telles que la création de messages éphémères dans le domaine de la sécurité », conclut Cui.