D'après une étude réalisée en Norvège, si la mortalité du cancer du sein diminue, ce n'est pas dû au dépistage organisé mais à l’amélioration des traitements. Ces résultats suggèrent de privilégier la surveillance par palpation des seins plutôt que par mammographie.

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    De moins en moins de femmes meurent d'un cancer du sein, et ce déclin de la mortalité touche aussi les femmes qui ne sont pas concernées par le dépistage organisé. C'est ce que montre une étude parue dans l'International Journal of Cancer et qui a suivi des femmes norvégiennes âgées de 30 à 89 ans entre 1987 et 2010. Pour rappel, en France, les femmes sont invitées à réaliser une mammographie tous les deux ans entre 50 et 74 ans.

    Les chercheurs ont examiné l'effet du dépistage organisé par mammographie sur la mortalité due au cancer du sein. Ils ont inclus 4.900 femmes dans leur analyse et les ont séparées en trois groupes :

    • celles qui étaient éligibles au dépistage organisé ;
    • celles qui ne l'étaient pas parce qu'elles étaient trop jeunes ;
    • celles qui ne l'étaient pas parce qu'elles étaient trop âgées.

    Les résultats montrent une réduction de la mortalité par cancer du sein dans les trois groupes d'âge ; chez les femmes éligibles au dépistage, la diminution de mortalité était similaire à celle des autres. Henrik Støvring, professeur à l'université d'Aarhus (Danemark), en conclut : « Le résultat important est que nous ne trouvons plus d'effet bénéfique au dépistage du cancer du sein ».

    Un risque de surdiagnostic avec la mammographie

    « Les femmes invitées au dépistage vivent plus longtemps parce que tous les patients atteints du cancer du sein vivent plus longtemps et parce que nous avons maintenant de meilleurs médicaments et une chimiothérapie plus efficace. »  Le chercheur explique que des essais cliniquesessais cliniques réalisés dans les années 1980 ont montré un effet du dépistage mais qu'ensuite les méthodes de traitement se sont améliorées, au point que le dépistage aurait désormais moins de bénéfices.

    Par exemple, une mammographie risque de révéler une petite tumeurtumeur de l'ordre de 1 mm ; or, certains de ces nodules, à croissance lente, peuvent rester présents jusqu'à la fin de la vie de la patiente sans donner lieu à un cancer mortel. « Le problème est que nous ne sommes pas actuellement en mesure de faire la différence entre les petites tumeurs cancéreuses qui vont vous tuer et celles qui ne le feront pas. » Pour éviter les surdiagnostics, le chercheur encourage la palpation régulière des seins.


    Cancer du sein : le dépistage réduit-il significativement les décès ?

    Article de Futura avec Relaxnews paru le 10 juillet 2015

    Deux études, parues simultanément cette semaine aux États-Unis et en Grande-Bretagne, remettent en cause l'intérêt du dépistage pour prévenir le cancer du sein. Elles viennent ainsi alimenter un débat qui prend de plus en plus d'ampleur entre spécialistes du monde entier.

    Une étude, menée par le professeur Philippe Autier de l'Institut of Global Public Health, en collaboration avec le professeur Peter Boyle de l'université de Strathclyde (Royaume-Uni) et l'Institut de Recherche et de PréventionPrévention International de Lyon, a été publiée dans le Journal of the Royal Society of Medicine.

    Lui et son équipe ont repris les résultats d'une célèbre étude, réalisée en Suède dans les années 1960 et 1970, qui avait servi de base aux mises en place des politiques de dépistage du cancer du sein dans plusieurs pays, dont l'Angleterre. Ces essais mettaient en évidence que l'on pouvait, grâce au dépistage, éviter 20 à 25 % des décès par cancer du sein

    Des politiques de prévention à revoir

    Après analyse, les scientifiques ont déclaré qu'ils avaient trouvé des erreurs fondamentales dans l'analyse statistique. En fait, les essais montrent que l'avantage du dépistage était faible, moins de 10 %, très loin des 20 à 25 % annoncés. De fait, ils conseillent aujourd'hui aux pays qui s'étaient basés sur ces résultats de repenser leur politique de prévention en matièrematière de dépistage du cancer du sein.

    Une prise de position qui, outre-Manche, n'a pas été partagée par tous. Notamment par le professeur Julietta Patnick, directrice des programmes de dépistage du cancer au sein du NHS (National Health Service, la Sécurité sociale britannique), qui a rappelé les résultats d'une étude de 2012 menée au Royaume-Uni. Elle avait mis en évidence que le dépistage chez des femmes de 50 à 70 ans avait réduit la mortalité de 20 %, épargnant ainsi 1.300 vies.

    Seize millions de femmes suivies

    La seconde étude a été menée par le professeur Richard Wilson de l'université Harvard à Cambridge (États-Unis). Avec son équipe, ils ont analysé les données sur le cancer issues du SEER (Surveillance, Epidemiology and End Results), impliquant plus de 16 millions de femmes âgées de 40 ans suivies de 2000 à 2010 dans 547 comtés des États-Unis.

    Les résultats, publiés dans la revue Jama Internal Medicine, confirment ceux de la première étude. « Une augmentation de 10 % des dépistages a été associée à une augmentation de 16 % des diagnosticsdiagnostics des cancers du sein, analyse le professeur Wilson. Cependant, aucun lien entre dépistage et réduction du taux de décès dus au cancer n'a été trouvé. »

    Néanmoins, la prudence s'impose. En effet, si le débat s'anime entre les partisans du dépistage et les sceptiques, le nombre d'études penchant pour l'efficacité du dépistage est toujours supérieur.