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    Légende historique de la France du Moyen Âge, l'histoire du vase de Soissons est racontée par Grégoire de Tours dans son Histoire des Francs. Il la situe vers 486, au cours de la guerre livrée par Clovis Ier, roi des Francs saliens, au Romain Syagrius, et peu de temps après la prise de Soissons, sa capitale.

    Baptême de CLovis. © G.Garitan, <em>Wikimedia commons</em>, CC by-sa 4.0

    Baptême de CLovis. © G.Garitan, Wikimedia commons, CC by-sa 4.0

    Les soldats enlevèrent d'une église un vase d'une taille et d'une beauté extraordinaires. L'évêque de Reims demanda à Clovis la restitution de cet objet auquel il tenait. Le roi invita alors le messager de Saint-Rémi à le suivre jusqu'à Soissons.

    Saint-Rémi demande à Clovis la restitution du vase de Soissons. © DP

    Saint-Rémi demande à Clovis la restitution du vase de Soissons. © DP

    C'est à Soissons, la ville dont Clovis a fait son camp principal, que se joue la scène centrale. L'armée est rassemblée autour du butin. Le roi demande de lui céder le vase en plus de sa part. Les hommes semblent d'accord, mais un soldat impulsif frappe le vase de sa hache en s'écriant : « Tu ne recevras que ce que le sort t'attribuera vraiment ! »

    Le roi avala l'affront, nous dit Grégoire, mais « garda sa blessure cachée dans son cœur ». L'évêque récupéra son vase cabossé. Au bout de l'année, ayant convoqué l'armée, Clovis reconnut le soldat insolent. Sa tenue laissant à désirer, il la jeta à terre. Le soldat se baissant pour la ramasser, et le roi Clovis lui brisa le crânecrâne d'un coup de hache en disant : « Ainsi as-tu fait au vase de Soissons ! »

    Clovis I<sup>er</sup> et le vase de Soissons. <em>Grandes Chroniques de France</em>, XIV<sup>e</sup> siècle. © Bibliothèque nationale de France, DP

    Clovis Ier et le vase de Soissons. Grandes Chroniques de France, XIVe siècle. © Bibliothèque nationale de France, DP

    Grégoire de Tours n'a certainement pas inventé l'anecdote, mais il en fait une histoire édifiante. On retrouve ce thème hagiographique ailleurs dans Grégoire de Tours : les détenteurs de biens d'Église paraissent jouir du bien mal acquis, avant de succomber à la vengeance d'un saint lésé à l'anniversaire de leur méfait. Chacune de ces étapes met en évidence la progression du roi vers le salut.

    L'histoire du vase de Soissons a un autre intérêt : elle constitue un document sur la vie militaire des armées franques. Les militaires touchaient une solde et une part de butin selon leur grade ou leur ancienneté, ce qui change quelque peu du « quelque soit ce qu'un vainqueur prend à l'ennemi, il lui appartient de plein droit ». Il semble que Clovis ait, par son autorité, maintenu dans son armée un usage de collectivisation du butin et de son partage.