Alors que l'opportunité de limiter le réchauffement climatique se réduit, le consortium Carbon Mapper fait le pari de déployer une constellation hyperspectrale pour mesurer rapidement et précisément les émissions de gaz à effet de serre à travers le monde. Cette constellation, c’est Planet qui la fournira. Elle aura pour but de repérer en temps réel les sources d’émissions importantes de méthane et de dioxyde de carbone de façon à en « accélérer la réduction ». Les explications de Jeffrey Guido, directeur de Tanager, la constellation hyperspectrale de Planet.


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    Après avoir dévoilé Pelican en avril, une constellationconstellation à haute résolutionrésolution prévue pour 2023, Planet a profité de la 73e édition du Congrès international d'astronautiqueastronautique qui s'est tenue à Paris en septembre pour présenter Tanager. Contrairement à Pelican et aux satellites déjà en service qui fonctionnent dans le visible, Tanager est une constellation hyperspectrale. Sa mise en service est également prévue en 2023. Cette nouvelle constellation capable de fournir des données hyperspectrales avec une résolution de 30 mètres dans plus de 400 bandes spectrales vise à « améliorer la compréhension des émissions mondiales de méthane et de dioxyde de carbone (CO2) et d'en accélérer la réduction », souligne Planet.

    Au-delà des signatures de méthane et de CO2, les données hyperspectrales de Planet seront utiles à des dizaines d'autres applicationsapplications et indicateurs environnementaux nécessaires à la surveillance étroite de la santé de la planète.

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    L'imagerie hyperspectrale offre en effet un vaste éventail de perspectives car elle divise le spectrespectre en une multitude de bandes spectrales, ce qui permet aux analystes d'examiner des phénomènes dans de nombreuses couleurscouleurs différenciées qui échappent généralement à la perception visuelle humaine. Les données hyperspectrales ont cela d'intéressant qu'elles sont utiles à une très large variété de domaines et présentent un immense potentiel pour des applications dans des secteurs tels que l'agriculture, la défense et le renseignement, l'énergieénergie, le gouvernement civil et l'exploitation minière. Bien utilisées, elles peuvent également révéler et prévenir des risques sociaux, environnementaux et climatiques avec un niveau de détail sans précédent.

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    Cette constellation sera le « bras armé » du consortium Carbon Mapper qui fait le pari de repérer, localiser, quantifier et suivre les émissionsémissions ponctuelles et les fuites de méthane et de dioxyde de carbone (CO2).

    En rendant les données recueillies sur les émissions accessibles au public, l'objectif de Carbon Mapper est, d'une part, de permettre aux gouvernements de surveiller le respect des pactes internationaux et d'autre part, de contraindre les décideurs politiques et les « fuiteurs » à mettre en place des mesures d'atténuation. L'intérêt de ces mesures n'est pas seulement économique. Limiter les émissions de ces deux gazgaz, particulièrement le méthane, un puissant gaz à effet de serre, s'avère très efficace pour lutter contre le réchauffement.

    Planet annonce de nouveaux détails sur sa constellation hyperspectrale, Tanager. © Planet

    La parole à Jeffrey Guido, directeur de mission de la constellation hyperspectrale de Planet.

    Futura : Quelle est la principale raison de lancer une constellation hyperspectrale ?

    Jeffrey Guido : La mission de Planet est d'utiliser l'espace pour aider la vie sur terre. Le développement et l'exploitation d'une constellation de satellites hyperspectraux avancés, capables de détecter les émissions de gaz à effet de serre, soutiennent notre mission. De plus, nous voyons une opportunité commerciale d'aider les gouvernements et les entreprises privées à identifier et arrêter les fuites de méthane et autres gaz à effet de serre. Au fur et à mesure de notre transition vers une économie mondiale durable, le besoin de données précises et opportunes pour suivre et atténuer les sources d'émissions de gaz à effet de serre deviendra impératif pour les stratégies de conformité, de risque et d'investissement des entreprises commerciales.

    Futura : Vous ne vous focalisez pas seulement sur les gaz à effet de serre ?

    Jeffrey Guido : Au-delà des signatures de méthane et de CO2, l'offre hyperspectrale commerciale de Planet vise à fournir aux clients des données pour des dizaines d'autres applications et indicateurs environnementaux nécessaires à la surveillance étroite de la santé de la planète. La technologie des capteurscapteurs hyperspectraux des satellites, mise au point par le Jet Propulsion LaboratoryJet Propulsion Laboratory (JPL) de la NasaNasa, offrira une résolution de 30 m et une gamme spectrale complète d'infrarougesinfrarouges à ondes courtes et de bandes de 5 nm de large de haute précision. Cette offre hyperspectrale est conçue pour aider les organisations à comprendre les changements sur terre et en mer, des zones côtières aux forêts en passant par les zones urbaines, etc.

    Futura : Avez-vous identifié un besoin particulier non couvert par les satellites ou constellations existants ?

    Jeffrey Guido : Ce n'est pas vraiment la façon dont nous envisageons notre mission. La lutte contre le changement climatiquechangement climatique et les émissions de méthane en particulier est un défi énorme et systémique qui nécessitera les efforts d'un grand nombre d'organisations dans l'industrie, les gouvernements et les institutions non gouvernementales. Cela dit, l'aspect le plus unique de notre offre hyperspectrale est la coalition Carbon Mapper qui a été constituée pour assurer une surveillance permanente, exploitable et transparente des émissions de méthane et de dioxyde de carbone (CO2) à l'échelle des installations dans les secteurs et régions clés du monde. Cette coalition est composée d'entreprises privées, d'agences du secteur public et d'institutions non gouvernementales afin de surmonter collectivement certains obstacles de longue date au déploiement à grande échelle de systèmes opérationnels de surveillance des gaz à effet de serre. Nous espérons que ce type d'arrangement pourra être reproduit dans d'autres domaines pour aider à résoudre d'autres défis urgents.

    Le saviez-vous ?

    L’Europe ne peut évidemment pas se permettre d’être dépendante de données étrangères pour la surveillance des émissions licites et illicites de méthane et autres gaz à effet de serre. L’entreprise française Absolut Sensing développe actuellement, en partenariat avec l’ESA, la constellation GESat qui fournira « un service de surveillance quasi-temps réel » des émissions de méthane d'origine industrielle avec une résolution inédite.

    Futura : Votre constellation aura-t-elle une ou plusieurs caractéristiques qui la différencieront de la concurrence ?

    Jeffrey Guido : Les satellites Tanager captureront le méthane à un niveau très faible (100 kgkg/h). La charge utile hyperspectrale très sensible de Planet a une plage spectrale de 400 à 2.500 nm avec des bandes de 5 nm. Ce système très sensible sera le meilleur de sa catégorie et permettra un grand nombre d'applications dans de nombreuses industries, au-delà des seules émissions de méthane.

    Futura : Pourquoi avez-vous décidé d'utiliser la technologie des capteurs hyperspectraux, mise au point par le JPL plutôt qu’en développer une nouvelle ?

    Jeffrey Guido : Ce spectromètrespectromètre imageur du JPL est basé sur une technologie très mature utilisée par de nombreux instruments aéroportés réussis et un instrument similaire récemment lancé pour le projet EMIT (Earth surface Mineral dust source InvesTigation) de la Nasa. L'équipe du JPL a travaillé en étroite collaboration avec notre équipe pendant la constructionconstruction des deux premiers satellites hyperspectraux, fournissant un soutien pendant les essais du satellite et la mise en service et la validation des données après le lancement.

    Futura : Planet a-t-il envisagé de développer dans le futur son propre instrument pour répondre à ses besoins ?

    Jeffrey Guido : Oui. Planet s'appuiera sur le transfert de connaissances du JPL pour construire les futurs capteurs hyperspectraux.

    Futura : Que faut-il comprendre quand vous dites que « l'objectif de l'offre hyperspectrale de Planet est d'aider les clients à révéler les risques sociaux, environnementaux et climatiques avec des détails sans précédent et de démontrer l'engagement de Planet à préserver la biodiversité et à accélérer l'action sur le changement climatique dans le cadre du consortium Carbon Mapper » ?

    Jeffrey Guido : La science hyperspectrale offre un large éventail d'applications possibles, et Planet étudie des cas d'utilisation aussi divers que les cicatricescicatrices de brûlures d'incendies de forêt, la surveillance de la prolifération d'algues nuisibles, le soutien des pratiques agricoles et le suivi de la capture du carbone.