Les récifs coralliens sont des bâtisseurs incroyables, capables de transformer des environnements pauvres en nutriments en véritables oasis de vie. Pourtant, face au réchauffement climatique et à la pression humaine, leur survie repose sur leur capacité à s’adapter. Mais peut-on vraiment espérer sauver les récifs uniquement grâce aux coraux dits « résistants » ?
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Le corail est un architectearchitecte du vivant, capable de survivre dans des conditions extrêmes grâce à une relation symbiotique avec des algues microscopiques. Cette résiliencerésilience naturelle pousse souvent à croire que certaines espèces pourront s'adapter suffisamment vite pour survivre. Pourtant, cette vision simplifiée ignore l'ampleur des changements environnementaux actuels.
Un espoir limité dans la résistance
Lors de mes missions en Indonésie, j'ai eu l'occasion de constater que les espèces massives, comme les Porites, sont effectivement plus résistantes à la chaleurchaleur, tandis que les coraux ramifiés, comme l'Acropora, succombent rapidement au blanchissement. Cependant, même ces espèces robustes ne sont pas à l'abri. La résistancerésistance n'est pas synonyme d'immortalité. Avec l'augmentation continue des températures, même les espèces les plus solidessolides finissent par fléchirfléchir.
La restauration active : un outil, mais pas une solution miracle
La réhabilitation de récifs coralliens n'est pas une fin en soi. Elle permet d'impliquer les populations locales et de recréer des habitats, mais cela ne suffira pas à inverser la tendance globale. De 2015 à 2018, dans nos projets de restauration à Flores en Indonésie, nous avons utilisé des structures métalliques pour transplanter des coraux et en moins de trois ans, ces récifs ont vu leur biodiversité augmenter de 400 %.

Mais ces succès, bien que significatifs à l'échelle locale, soulignent aussi leurs limites. On ne pourra pas restaurer les millions d'hectares de récifs perdus. Ce n'est pas réaliste. C'est pourquoi nos projets visent autant à sensibiliser les communautés qu'à restaurer physiquement les récifs. En travaillant avec les pêcheurs indonésiens, nous avons démontré qu'un écosystème pouvait renaître, mais seulement s'il était protégé sur le long terme. Les récifs sont des systèmes vivants complexes. Ils ne peuvent pas être simplement « réparés » comme un bâtiment.
Des solutions complémentaires pour construire l’avenir
Pour répondre aux défis climatiques, les scientifiques explorent aussi des approches basées sur la génétiquegénétique et la sélection assistée. Des expériences ont montré que certains coraux pouvaient héberger des algues symbiotiques plus résistantes à la chaleur, augmentant ainsi leur tolérance thermique. Cependant, ces techniques ont des limites. Créer des coraux résistants en laboratoire ne garantit pas leur survie dans la nature. Ils doivent s'intégrer dans des écosystèmes déjà endommagés.
Il est donc essentiel d'agir sur plusieurs fronts :
- Réduction des émissionsémissions de gaz à effet de serre pour limiter le réchauffement.
- Création d'aires marines protégées pour réduire les pressionspressions humaines directes.
- Restauration ciblée, mais toujours accompagnée d'une sensibilisation des populations locales.

Des récifs adaptés ou des récifs protégés ?
On ne sauvera pas les récifs uniquement avec des coraux résistants. C'est une illusion dangereuse qui détourne l'attention des causes réelles de leur déclin. Cette conviction s'est forgée au fil des années passées sur le terrain, en travaillant aux côtés des communautés locales. Les récifs coralliensrécifs coralliens sont des systèmes dynamiques et interdépendants. Leur résilience ne repose pas seulement sur la survie des coraux eux-mêmes, mais sur la capacité de l'écosystème entier - poissonspoissons, algues, éponges... - à fonctionner en harmonie.
Ce que j'ai appris, c'est que protéger un récif, c'est protéger tout un réseau de vie. Si nous ne réduisons pas la pollution ou la surpêchesurpêche, les coraux résistants ne serviront à rien.

Conclusion : c'est un défi collectif
Les récifs coralliens sont au cœur d'un paradoxe : leur résilience naturelle donne de l'espoir, mais cette résilience a des limites face aux pressions actuelles. Nous devons arrêter de penser que nous pouvons reconstruire un monde parfait. La réalité, c'est qu'il faut composer avec ce que nous avons aujourd'hui et faire le maximum pour limiter les dégâts.
La restauration corallienne est un outil puissant, mais elle ne remplacera jamais une action globale contre le changement climatique. Les récifs coralliens sont un rappel brutal de l'urgence d'agir pour protéger notre planète.
Masterclass « Comprendre le corail pour mieux le protéger » ?, par Martin Colognoli
Cette Masterclass a pour objectif de sensibiliser le plus grand nombre à la préservation des récifs coralliens. À travers quatre épisodes, elle permet de découvrir la biologie des coraux, les menaces qu'ils affrontent, mais aussi des solutions concrètes pour les protéger, le tout basé sur mes 15 années d'expérience sur le terrain. C'est un beau mélange de biologie et d'écologieécologie marine, de photographies sous-marines et d'histoires de terrain au plus près du corailcorail.
La préservation des récifs coralliens par Martin Colognoli - Masterclass en ligne. © Martin Colognoli
Ce qu’il faut
retenir
- La résistance n’est pas synonyme d’immortalité. Avec l’augmentation continue des températures, même les espèces les plus solides finissent par fléchir
- Les récifs sont des systèmes vivants complexes. Ils ne peuvent pas être simplement « réparés » comme un bâtiment.
- Dans nos projets de restauration à Flores en Indonésie, nous avons utilisé des structures métalliques pour transplanter des coraux et en moins de 3 ans, ces récifs ont vu leur biodiversité augmenter de 400 %.
- Ce que j’ai appris, c’est que protéger un récif, c’est protéger tout un réseau de vie. Si nous ne réduisons pas la pollution ou la surpêche, les coraux résistants ne serviront à rien.
- Nous devons arrêter de penser que nous pouvons reconstruire un monde parfait. La réalité, c’est qu’il faut composer avec ce que nous avons aujourd’hui et faire le maximum pour limiter les dégâts.