Pour limiter le réchauffement climatique à +1,5 °C au-dessus des moyennes préindustrielles, nous devons réduire nos consommations d’énergies fossiles. Mais comment faire si la production continue d’augmenter ? Si la production explose, même ? C’est la question que posent les 425 projets colossaux d’extraction pointés du doigt aujourd’hui par des chercheurs. De véritables « bombes à carbone » entre les mains des géants des énergies fossiles !


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    « Notre addictionaddiction aux énergies fossiles est en train de nous tuer. » Les mots sont crus. Sans détour. Ce sont ceux qu'Antonio Guterres, le secrétaire général des Nations unies (ONU), prononçait le 1er avril dernier. Il appelait alors à des « efforts urgents et transformateurstransformateurs de la part de tous les pays pour éliminer le charbon et arrêter l'expansion de l'exploration pétrolière et gazière afin de maintenir le réchauffement à 1,5 °C », soulignant que la production de charbon, de pétrolepétrole et de gazgaz au cours de la prochaine décennie devrait être réduite de plus de moitié si nous envisagions de sauver notre climatclimat.

    Quelques mois plus tôt, la Banque européenne d'investissement annonçait mettre fin à tout soutien de projets liés aux énergies fossilesénergies fossiles. L'Agence internationale de l'énergie (AIE), quant à elle, plaidait pour un arrêt immédiat des investissements fossiles et une vingtaine de pays s'engageaient, à l'occasion de la 26e Conférence des Parties sur le Climat (COP26), à arrêter les financements publics de projets d'énergies fossiles à l'étranger. Le monde semblait avoir enfin pris la bonne voie.

    Mais voici que, aujourd'hui, une étude menée par des chercheurs de l’université de Leeds (Royaume-Uni) remet tout en question. Elle ne présente pas moins de 425 projets conduits par les plus grands noms des énergies fossiles. Des projets qui, pris dans leur ensemble, pourraient être à l'origine de l'émissionémission de plus de 646 milliards de tonnes de dioxyde de carbonedioxyde de carbone (CO2). De véritables « bombes à carbonecarbone » réparties dans 48 pays du monde. Des « bombes à carbone » parce que 646 milliards de tonnes, c'est comme si nous faisions exploser le budget carbone dont nous disposons si nous espérons limiter le changement climatique à 1,5 °C.

    Des bombes à désamorcer d’urgence

    Au Canada, aux États-Unis, en Australie. En 2020, pas moins de 60 % de ces projets produisaient déjà du gaz ou du pétrole. Les grands noms des combustiblescombustibles fossiles que sont Shell, Gazprom, ExxonMobil, BP, PetroChina, Petrobras, ConocoPhillips ou encore ChevronChevron envisagent de continuer à investir plus de 100 millions de dollars par jour d'ici 2030 pour les maintenir et développer ceux qui manquent encore à l'appel.

    Le saviez-vous ?

    Selon les chercheurs de l’université de Leeds (Royaume-Uni), seuls les projets capables d’être à l’origine de l’émission de plus d’un milliard de tonnes de dioxyde de carbone (CO2) au cours de leur durée de vie « méritent » le qualificatif de « bombe à carbone ». Au regard de cette définition, les gisements offshore de gaz de North Field (Qatar) remportent la palme des nouvelles « bombes à carbone » au monde. Les États-Unis sont ceux qui concentrent le plus de ces « bombes à carbones ». Pas moins de 22 d’entre elles pour des émissions potentielles de 140 milliards de tonnes de CO2. Plus de quatre fois ce que le monde entier émet en une année !

    Tout ceci alors même que tous les volets du 6rapport du Groupe intergouvernemental d’experts sur l’évolution du climat (Giec), publiés ces derniers mois, confirment que nos émissions de carbone doivent impérativement diminuer pour préserver nos chances d'un avenir vivable sur Terre. Et qu'une étude du service national de météorologiemétéorologie britannique, le Met Office, en lien avec l'Organisation météorologique mondiale (OMM) montre que les risques d'atteindre au moins une fois la barre des 1,5 °C de réchauffement -- par rapport à l'ère préindustrielle -- dans les cinq années à venir n'ont jamais été aussi importants. Ils s'élèvent désormais à 50 %.

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    Mais alors, de quoi s'agit-il ? D'une sorte de « dissonance cognitive » qui empêche les entreprises de changer de position, et ce, malgré les risques encourus ? D'une forme de « déni de la réalité du réchauffement climatique et de ses causes » ? Ou tout simplement d'une cupidité incontrôlée et d'un « mépris total envers les communautés les plus vulnérables aux changements climatiques » de la part des grands noms des énergies fossiles ?

    Pas sûr qu'il nous reste du temps pour trancher. En effet, pour éviter le scénario catastrophe, nous devons diviser nos émissions de CO2 par deux d'ici 2030. Et en réponse à l'urgence climatique, désamorcer un maximum de ces « bombes à carbone » pourrait bien devenir rapidement une priorité absolue. Pour cela, les chercheurs de l'université de Leeds suggèrent des études individualisées qui permettront d'inclure aux stratégies toutes les dimensions de la question. Avec l'espoir d'une meilleure efficacité.