au sommaire
Même s'il ne représente que 0,0001 % de la composition de la Terre, l'arsenicarsenic est un élément largement répandu dans la croûte terrestre, les roches volcaniques altérées et certains sols et sédiments marins. Bien que l'arsenic soit toxique pour la plupart des êtres vivants, il existe des micro-organismesmicro-organismes non seulement y résistant, mais qui en outre le métabolisent de manière active via des réactions de méthylationméthylation, déméthylation, oxydationoxydation et réduction.
Les études phylogénétiquesphylogénétiques des enzymesenzymes impliquées dans les métabolismesmétabolismes de l'arsenic suggèrent que l'arsénite-oxydaseoxydase était présente dans le dernier ancêtre commun universel ou Luca (Last Universal Common Ancestor)) et a donc pu émerger avant la divergence entre les archéesarchées et les bactériesbactéries il y a plus de 3,4 milliards d'années.
Imagerie par microfluorescence X des stromatolites de Tumbiana à différentes échelles, du centimètre (a) à la centaine de nanomètres (c). (a) Carte de distribution du calcium montrant l’organisation en bulbes carbonatés des stromatolites étudiés. (b) Carte de distribution de l’arsenic dans l’encart (b) de la figure (a) montrant que l’un des bulbes carbonatés est particulièrement enrichi en arsenic. (c) Image RVB de la zone (c) indiquée en (b) montrant la présence de globules de matière organique enrichis en arsenic (As, rouge) associés à des sulfures (Fe, bleu) et des micro-grains de cuivre (Cu, vert). Archées et bactéries représentent deux domaines distincts de micro-organismes unicellulaires. © CNRS-Insu, Pascal Philippot
L'arsenic et l'origine de la vie
Cette évolution précoce et le fait que l'arsenic devait être particulièrement abondant sur la Terre primitive, du fait d'une forte activité volcanique, suggèrent que des métabolismes utilisant l'arsenic ont dû se développer très tôt. Pourtant, jusqu'à aujourd'hui, aucune trace de ces métabolismes n'avait été observée dans le registre sédimentaire.
Une équipe pluridisciplinaire regroupant des géologuesgéologues, des physiciensphysiciens, des biologistes moléculaires et des microbiologistes a étudié la distribution des métauxmétaux et de la matièrematière organique au sein de stromatolitesstromatolites fossilesfossiles, âgés de 2,7 milliards d'années (formation de Tumbiana, cratoncraton des Pilbara, Australie occidentale). Ces stromatolites fossiles, récoltés en 2004 dans le cadre de campagnes de forage financées par l'INSU, l'IPGP et le Labex UnivEarthS de l'université Sorbonne Paris-Cité, sont particulièrement bien préservés.
Des fossiles de tapis microbiens sous les rayons X
En utilisant des méthodes d'imagerie à différents niveaux de résolutionrésolution spatiale (de quelques centimètres à la centaine de nanomètresnanomètres), les scientifiques ont analysé des petits globulesglobules de matière organique attribués à des restes de cellules microbiennes et montré que ceux-ci contenaient presque exclusivement de l'arsenic. Or, un cycle complet d'oxydo-réduction de l'arsenic en conditions anaérobies a été décrit dans les tapis microbiens de lacs hypersalins de Californie et des Andes qui se développent à proximité de volcans et qui sont considérés comme d'excellents analogues de la Terre primitive.
Grâce à ces résultats, les chercheurs confirment que l'arsenic a pu jouer un rôle important dans l'évolution des premiers organismes vivants et que sa forme oxydée, l'arséniate (As(V)), a pu être disponible dans l'environnement plusieurs centaines de millions d'années avant l'oxygénation de la Terre. Parus dans Nature Geoscience, les résultats de l'étude menée par des chercheurs français et américains auront d'importantes implications pour la recherche de traces de vie sur d'autres planètes.