C’est une surprise. L’un des membres d’un groupe d’animaux emblématique de l’explosion cambrienne, les anomalocarides, a été retrouvé fossilisé dans des sédiments datant de l’Ordovicien au Maroc. Ce groupe a donc vécu au moins 30 millions d’années plus longtemps qu’on ne l’imaginait, avec des individus pouvant atteindre une grande taille, qui étaient sans doute les géants des océans de l'époque.

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    Une reconstitution d'artiste de l'anomalocaride trouvé dans la formation de Fezouata au Maroc. © Esben Horn

    Une reconstitution d'artiste de l'anomalocaride trouvé dans la formation de Fezouata au Maroc. © Esben Horn

    Les schistes de Burgess au Canada sont devenus mondialement célèbres lorsqu'on y a retrouvé des fossiles d'étranges créatures, datant du Cambrien. Initialement, des animaux comme Opabinia et Hallucigenia semblaient inclassables selon les critères habituels et ce n'est que plus tard que l'on réussit à les rattacher à des animaux connus, ou simplement à interpréter leurs fossiles. Ce fut en particulier le cas avec les anomalocarides (« étrange crevette »), ou anomalocaridés, des animaux fossiles du Cambrien retrouvés en Chine, en Australie et en Amérique du Nord.

    Leurs restes fossiles, jamais complets, sont longtemps restés difficilement interprétables, leur bouche faisant penser qu'il s'agissait en fait d'une méduse tandis que leur corps était vu comme celui d'un échinoderme cousin de nos concombres de merconcombres de mer. Ce n'est que lorsque Derek Briggs et un de ses collègues ont trouvé un fossile où l'on voyait l'appendice en forme de crevette relié à la bouche que l'on compris enfin que les anomalocarides étaient des arthropodesarthropodes possédant la forme sous laquelle ils sont aujourd'hui décrits. On connaît aussi des formes apparentées comme Hurdia victoria.

    Directeur du Yale Peabody Museum of Natural History, Derek Briggs publie aujourd'hui dans le journal Nature un article faisant état d'une nouvelle découverte importante concernant ces anomalocarides.

    Un fragment du fossile d'anomalocaride décrit dans <em>Nature</em>. © Peter Van Roy

    Un fragment du fossile d'anomalocaride décrit dans Nature. © Peter Van Roy

    Fezouata, une formation de l’Ordovicien dans l’Anti-Atlas marocain

    Des restes fossilisés d'un de ces arthropodes ont été retrouvés dans des sédimentssédiments au Maroc. Ils appartiennent à un animal qui devait nager au-dessus de fonds boueux assez profonds il y a entre 488 et 472 millions d'années. Probablement pris par un glissement de terrain, ils sont parvenus jusqu'à nous, montrant certaines parties molles bien de cet animal. D'autres restes d'organismes bien conservés ont été trouvés dans la formation Fezouata d'où est extrait ce fossile. Cela va permettre d'en apprendre plus sur la faunefaune marine du début de l'OrdovicienOrdovicien.

    Déjà le spécimen analysé par Briggs et ses collègues nous indiquent que les anomalocarides ont continué à exister et à avoir un impact sur la biodiversitébiodiversité pas loin de 30 millions d'années de plus qu'on ne le pensait. Il est probable qu'il en a été de même avec d'autres groupes que l'on croyait strictement associés au Cambrien. Enfin, même si certaines découvertes en Chine laissaient penser que des anomalocarides pouvaient atteindre 2 mètres, ce fossile démontre avec certitude que ces arthropodes atteignaient au moins 1 mètre de long, ce qui en faisait sûrement de redoutables géants dans les mers de l'Ordovicien.