À la fin du Crétacé, l’Antarctique était recouvert de forêts verdoyantes et de fougères. Mais cette région accueillante a aussi connu des « paléo-incendies » ravageurs, sans doute déclenchés par les éruptions volcaniques.


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    Difficile d'imaginer qu'il y a plusieurs millions d'années, les étendues glacées de l'Antarctique étaient le théâtre de gigantesques incendies de forêt. Durant le Crétacé (-145 à -65 millions d'années), la période la plus chaude de l’histoire de la Terre, on trouvait des palmiers en Alaska et l'Antarctique était recouvert de forêts verdoyantes de conifères, de fougèresfougères et plantes à fleurs. L'endroit était pourtant loin d'être un paradis. Selon une étude publiée en octobre dans la revue Polar Research, l'île de James RossRoss, à l'extrême ouest actuel du continent antarctique, aurait connu des incendies ravageurs durant le Campanien (entre 83 et 72 millions d'années).

    Des forêts de conifères inflammables

    Les chercheurs ont étudié des restes de charbon de bois provenant de plantes fossiles recueillies lors d'une expédition en 2015-2016 dans la partie nord-est de l'île James Ross. Ces fragments de charbon extrêmement fins (les plus gros ne mesurent que 19 à 38 millimètres) ont été analysés au microscopemicroscope et ils proviendraient de gymnospermesgymnospermes brûlées, probablement issues d'une famille botaniquebotanique de conifères appelée Araucariacées. « Cette découverte montre que les grands incendies au Crétacé étaient plus fréquents qu'on ne l'imaginait auparavant », atteste Flaviana Jorge de Lima, paléobiologiste à l'Université fédérale de Pernambouc à Recife au Brésil, et auteure principale de l'étude. En 2015, une précédente étude menée à partir de charbon de bois avait déjà montré que l'Antarctique occidental avait connu des feux de forêt importants.

    L’île James Ross, à l’extrême ouest de l’Antarctique, a commencé à se séparer du supercontinent Gondwana autour de 130 millions d’années. © Google Earth
    L’île James Ross, à l’extrême ouest de l’Antarctique, a commencé à se séparer du supercontinent Gondwana autour de 130 millions d’années. © Google Earth

    Les volcans, principale cause des paléo-incendies en Antarctique

    Évidemment, ces incendies n'ont pas été déclenchés par de quelconques dinosauresdinosaures malveillants. De nombreux phénomènes naturels peuvent provoquer des incendies, comme la foudrefoudre ou les « orages secs ». Mais c'est ici plutôt les volcansvolcans qui seraient en cause, d'après les auteurs de l'étude. « L'Antarctique a connu une intense activité volcanique causée par la tectonique des plaquestectonique des plaques au cours du Crétacé, fait remarquer Flaviana Jorge de Lima. Il est probable que cette activité volcanique soit à l'origine du paléofeu de forêt qui a créé le charbon de bois rapporté ici. ». Il est toutefois peu probable que ces incendies aient pu se propager à des échelles très importantes, du fait de la faible teneur en oxygène de l'atmosphèreatmosphère à l'époque (entre 10 % et 15 % contre 21 % aujourd'hui). Or, il faut théoriquement au moins 15 % d’oxygène pour que le feufeu se propage. De plus, avec l'éclatement du supercontinentsupercontinent GondwanaGondwana, l'Antarctique s'est retrouvé relativement isolé du reste des terresterres.

    Il n'empêche que les incendies de forêt étaient sans doute fréquents et répandus au cours du Crétacé tardif. De nombreuses preuves ont été documentées dans l'hémisphère nordhémisphère nord, ou dans ce qui est aujourd'hui la Tasmanie, la Nouvelle-Zélande et l'Argentine. La végétation luxuriante et le climatclimat plus chaud ont certainement augmenté l'inflammabilité des forêts à cette époque. Peut-être un aperçu de ce qui nous attend avec le réchauffement climatiqueréchauffement climatique. On observe ainsi depuis 40 ans un allongement de 20 % de la saison des incendies au niveau mondial, avec pour conséquence plus de surfaces brûlées.