Les poissons exploités à des fins commerciales migrent bien vers le nord depuis plusieurs décennies. Le coupable vient d’être identifié grâce à la création d’un nouvel indice : le MTC (mean temperature of the catch). Il était déjà sur le banc des accusés, puisqu’il s’agit du réchauffement climatique !

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    Le terme « saumon du Pacifique » rassemble cinq espèces du genre Oncorhynchus : les saumons rose, rouge, quinnat ou royal (en photo), kéta et coho. Ils seraient de plus en plus pêchés en mer de Béring, ce qui trahit leur migration vers le nord. © Pacific Northwest National Laboratory

    Le terme « saumon du Pacifique » rassemble cinq espèces du genre Oncorhynchus : les saumons rose, rouge, quinnat ou royal (en photo), kéta et coho. Ils seraient de plus en plus pêchés en mer de Béring, ce qui trahit leur migration vers le nord. © Pacific Northwest National Laboratory

    Depuis une quarantaine d'années, de nombreux pêcheurs en mer du monde entier ont fait le même constat : la composition de leurs prises de poissons a progressivement changé. Le rouget de vase (Mullus barbatus) a par exemple fait son apparition sur le littoral britannique, là où la température de l’eau aurait normalement dû le repousser. Mais comment l'expliquer ? Le réchauffement climatique et la surpêche sont bien évidemment accusés des pires maux, encore faut-il prouver leur culpabilité.

    En effet, constater que des poissons et des invertébrés marins migrent à de plus hautes latitudes ou descendent en profondeur ne suffit pas pour établir des liens de cause à effet. Problème : jusqu'ici, aucun indice ne mettait en corrélation la composition en poissons d'une zone de pêche avec divers facteurs environnementaux. C'est pourquoi Daniel Pauly de l'université de Colombie-Britannique (Canada), et d'autres de ses collaborateurs, viennent de créer un indice, le MTC, pour mean temperature of the catch (ou température moyenne de prise).

    Ce paramètre se calcule en faisant la moyenne des températures de préférence des espècesespèces pêchées, puis en la pondérant par le nombre de prises annuellesannuelles recensées dans la zone géographique considérée. L'indice peut ainsi être défini à une échelle globale, régionale ou locale. De 1970 à 2006, le MTC a augmenté de 0,19 °C à l'échelle de la planète, ce qui signifie qu'un plus grand nombre d'espèces aimantaimant les eaux chaudes ont été prélevées.

     
    Cette vidéo représente l'augmentation (de jaune à rouge) et la diminution (en bleu) des températures à l'échelle globale, depuis 1880, en se fondant sur la moyenne de la période 1951-1980. © Nasa

    Le réchauffement explique seul la migration des poissons

    Durant les analyses, seule l'augmentation de la température des eaux de surface a affiché une corrélation avec le nouvel indice. Le réchauffement climatique est donc bien responsable de la migration vers le nord des poissons ! Ainsi, ni la pressionpression de la pêchepêche, et donc la surpêche, ni les changements dans les paramètres océanographiques (courant, etc.) n'expliquent les résultats obtenus.

    À une plus petite échelle, dans les régions non tropicales du globe, l'indice a augmenté de 0,23 °C par décennie. Les espèces de poissons pêchées voilà 40 ans ont donc fait route au nord, pour poursuivre leur vie dans des eaux offrant une température plus satisfaisante, tout en laissant la place à des congénères provenant du sud.

    Le MTC a également augmenté sous les tropiques, vraisemblablement en raison de la fuite des espèces subtropicales qui apprécient les eaux chaudes... mais pas trop. Or, aucune autre espèce ne va combler les places laissées vacantes au sein des écosystèmesécosystèmes. Cette situation est problématique, car des zones de pêche vont progressivement s'appauvrir, d'autant plus que la surpêche y est importante, alors que de nombreuses populations en dépendent. Selon l'article paru dans la revue Nature, il serait temps de réduire les effets du réchauffement climatique, afin de préserver l'économie et la sécurité alimentaire de ces populations côtières.