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    Simulation de la submersion de la ville de New York. Lors de grandes marées et de tempêtes, cette ville peut déjà se retrouver sous les eaux (ses digues ne font que 1,5 m de haut). La hausse du niveau des mers pourraient augmenter la fréquence avec laquelle les inondations surviennent. © Cherrylynx, CC

    Simulation de la submersion de la ville de New York. Lors de grandes marées et de tempêtes, cette ville peut déjà se retrouver sous les eaux (ses digues ne font que 1,5 m de haut). La hausse du niveau des mers pourraient augmenter la fréquence avec laquelle les inondations surviennent. © Cherrylynx, CC

    Comment peser les océans ? Une mesure de pressionpression en un seul point de la planète devrait suffire, démontrent des scientifiques. De quoi mieux comprendre l'augmentation du niveau des mers. Mais ce n'est pas simple à réaliser...

    Le niveau des océans augmente pour le moment d'environ 3 mm par an. Cette élévation peut être liée à deux phénomènes importants. Tout d'abord, la planète se réchauffe à sa surface, ce qui provoque une dilatation thermique des eaux océaniques. Elles prennent donc plus de volumevolume mais leur massemasse reste inchangée. Les mers montent également suite à l'arrivée d'eau provenant entre autres de la fonte des glaces. Dans ce cas, la masse des océans augmente.

    Pour comprendre la contribution relative de ces deux phénomènes, il est primordial de déterminer la masse des océans avec précision, mais comment faire ? Les chercheurs ont actuellement accès à de nombreuses technologies (satellites, bouées dérivantes, marégraphes, etc.), mais les réponses qu'ils apportent ont bien souvent été déterminées à l'aide de modèles et d'estimations. Or, ceux-ci peuvent contenir un certain nombre d'incertitudes. Pourtant, selon des chercheurs du National Oceanography Centre britannique (NOCS) et de l'University of Newcastle, une simple mesure pourrait suffire.

    Les masses d'eau exercent une force sur le plancher océanique et donc une pression. Selon un article publié dans Geophysical research letters (GRL) par Chris Hughes, une simple mesure de ce paramètre, grâce à la pose d'un seul capteurcapteur adapté, permettrait d'estimer avec une précision inégalée à ce jour la masse des océans puis de suivre ses variations au cours du temps. Derrière cette solution simple en apparence se cachent néanmoins de nombreuses contraintes, à commencer par le choix du site.

    Élévation récente du niveau de la mer (en cm) selon les marégraphes (en noir) et l'altimétrie satellite (en rouge). Selon les modèles, le niveau des océans pourrait monter de 30 cm à 1 m d'ici la fin du siècle. © Robert A. Rohde, <em>Wikimedia common</em>, CC by-nc-sa 2.5

    Élévation récente du niveau de la mer (en cm) selon les marégraphes (en noir) et l'altimétrie satellite (en rouge). Selon les modèles, le niveau des océans pourrait monter de 30 cm à 1 m d'ici la fin du siècle. © Robert A. Rohde, Wikimedia common, CC by-nc-sa 2.5

    La masse des océans se mesure en un seul point

    Le capteur de pression doit idéalement être positionné dans une région où les eaux profondes sont relativement calmes et à distance du littoral. Les mouvementsmouvements d'eau perturbent en effet les mesures. En combinant des résultats issus de modèles océaniques et terrestres, un seul site correspondant aux critères requis a été trouvé. Il se situe à plus de 4.000 m de fond dans le centre du Pacifique tropical. Ce choix a été validé sur le terrain.

    Des dizaines de capteurs de pression ont été mis en place dans le Pacifique en 2001 dans le cadre du U.S. National Tsunami Hazard Mitigation Program, y compris à proximité du site de prédilection. Ils servent normalement à détecter des mouvements d'eau de fond pouvant occasionner des tsunamis. Selon les données récoltées par ces équipements et les calculs développés par Chris Hughes, près de 6.000 milliards de tonnes d'eau seraient ainsi arrivées dans les océans entre fin mars et fin septembre 2011. L'élévation de leur niveau a été estimée à 1,7 cm (elle s'est réduite les six mois suivants), ce qui est en accord avec d'autres mesures...

    Il existe un « mais » qui compromet l'utilisation de cette nouvelle technique sur le long terme, l'objectif principal. Aucun capteur n'est suffisamment sensible ni, surtout, résistant dans le temps pour réaliser cette mesure. La hausse actuelle du niveau des océans provoque sur le fond une élévation de pression de quelques pascals par an. Or, la pression ambiante s'élève à environ  40 millions de pascals. L'appareil de mesure doit donc être d'une sensibilité extrême !

    La théorie et la méthodologie établies par Chris Hughes pour mieux comprendre la problématique de l'élévation du niveau des océans semblent donc prometteuses, mais elles ne deviendront utilisables qu'à une seule condition : des ingénieurs doivent relever le défi et concevoir le capteur de pression idéal...