La déforestation modifie la composition de l'atmosphère et détraque le climat, non seulement au niveau local, mais aussi global. Les forêts permettent de produire de la pluie, en plus de jouer un rôle de climatiseur. Lorsqu'elles sont détruites, les répercussions météorologiques se produisent sur des milliers de kilomètres.


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    C'est désormais une certitude, le lien entre la végétation et la météométéo ne fonctionne pas seulement dans un sens. La présence de végétation ainsi que son état de santé influencent aussi la météo, et à plus grande échelle, le climat. La déforestation a un impact direct sur celui-ci et sur le cycle de l'eau : en modifiant la composition de l'atmosphère, elle bouleverse son fonctionnement.

    Les forêts génèrent de la pluie sur des continents entiers

    Car l'eau de pluie ne provient pas seulement de celle qui s'évapore des océans : c'est le cas sur les côtes, mais beaucoup moins dans l'intérieur des terres. Comme le précise l'Université Yale, « chaque arbre est une fontaine, en absorbant l'eau du sol avec ses racines et en la rejetant sous forme de vapeur dans l'atmosphère ». Le mécanisme, multiplié par des millions d'arbres, créent « des rivières d'eau » dans le ciel. Celles-ci forment les nuagesnuages qui ensuite relâchent de la pluie.   

    La déforestation génère de la sécheresse là où les arbres sont coupés, mais elle influence aussi la météo sur des milliers de kilomètres. Les trois plus grandes forêts tropicalesforêts tropicales du monde ont un impact majeur sur le climat dont personne, ou presque, ne parle : la forêt amazonienne, le bassin du Congo, et le sud-est de l'Asie. Si ces trois grandes forêts sont maltraitées, leur puissance sur le cycle de l'eau est suffisamment grande pour perturber le climat et l'agricultureagriculture de près de la moitié de la Planète, selon une étude publiée dans World Resources Institute.

    Les forêts provoquent les précipitationsprécipitations, et sans ces arbres, le climat ne serait plus tropical, mais désertique. Selon l'Université des Pays-Bas, un tiers de l'eau qui tombe sur la forêt amazonienne provient de la transpirationtranspiration des arbres. Et cette pluie circule dans l'atmosphère, en Argentine, dans les Caraïbes et jusqu'au midwest des États-Unis : la déforestation de la forêt amazonienne aggrave donc le risque de sécheressesécheresse aussi loin que dans le centre des USA ! Des chercheurs pensent qu'en Afrique, la déforestation peut contribuer à assécher le Nil, et qu'en Asie, elle peut impacter un phénomène aussi vaste que la moussonmousson. Au Sahara, 40 % des pluies seraient liées à la végétation, et dans la région du Sahel, ce chiffre monte jusqu'à 90 % selon le Cifor.

    Les zones déforestées produisent moins de pluie, or cette pluie qui voyage sur de grandes distances est aussi nécessaire aux pays voisins. © Bernhard_Schuermann, Pixabay
    Les zones déforestées produisent moins de pluie, or cette pluie qui voyage sur de grandes distances est aussi nécessaire aux pays voisins. © Bernhard_Schuermann, Pixabay

    Les forêts refroidissent les basses couches de l'atmosphère

    Les émissions de carbone issues de la déforestation comptent pour environ 10 % du réchauffement climatiqueréchauffement climatique. Mais se priver des arbres revient à se priver de climatiseurs naturels : chaque arbre coupé a son importance, tant son pouvoir refroidissant est grand. Leur importance est capitale, dans les forêts tropicales, en campagne, comme en pleine ville. Dans les forêts tropicales, des différences de 3 à 10 °C ont été constatées entre les zones boisées et les zones déboisées. L'eau transpirée chaque jour par un seul arbre à un effet équivalent à celui de deux climatiseurs classiques pour habitation par jour, selon une étude publiée dans Science Direct.

    La conservation et la restauration des écosystèmes essentiels, comme les forêts tropicales, les tourbièrestourbières, les mangrovesmangroves et les prairies pourraient contribuer à la limitation de la hausse de la température mondiale de 2 °C, à hauteur de 23 %.


    Déforestation : ce n’est pas seulement une question de carbone

    Ce lundi 21 mars, le monde célébrait la Journée internationale des forêts. Pour rappeler à tous l'importance de préserver ces écosystèmesécosystèmes. Aujourd'hui, des chercheurs soulignent que ce n'est pas qu'une question de stockage de carbonecarbone. La déforestation menace de faire basculer tout un équilibre.

    Article de Nathalie MayerNathalie Mayer, écrit le 22 mars 2022

    Les forêts sont peut-être nos meilleures alliées face au réchauffement climatique. Car elles absorbent une part non négligeable du dioxyde de carbonedioxyde de carbone (CO2) présent dans notre atmosphère. Mais l'affirmation pourrait bientôt devoir se conjuguer au passé. Car avec la déforestation, les forêts -- notamment celles des régions tropicales -- commencent à libérer plus de CO2 qu'elles n'en stockent.

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    La forêt amazonienne n'est plus un puits de carbone

    Et ce n'est pas le seul problème que pose la déforestation au climat. Loin de là nous apprennent aujourd'hui des chercheurs de l’Alliance pour le développement de systèmes agricoles et alimentaires durables et résilients. Ils ont étudié comment la déforestation dans les tropiquestropiques influe sur une série de facteurs biophysiques. Des facteurs tels que l'albédoalbédo, la configuration des ventsvents, la distribution locale de la chaleurchaleur et même la composition des nuages ou les cycles de l'eau.

    Le saviez-vous ?

    Selon un récent rapport de l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), la forêt a perdu, entre 2000 et 2020, presque 100 millions d’hectares !

    Des facteurs qui, eux-mêmes, ont des effets sur le bien-être des sociétés humaines, sur la pauvreté, sur l'agriculture et sur la capacité des pays concernés à nourrir leurs populations. Le tout avec pour objectif d'apporter aux décideurs politiques des données solidessolides quant aux avantages, économiques notamment, de prévenir la déforestation. Car rappelons que quelque 1,6 milliard de personnes dans le monde dépendent directement des forêts, que ce soit pour leur alimentation, pour s'abriter, pour leur énergieénergie ou pour y trouver des remèdes ou des revenus.

    Les chercheurs se sont notamment intéressés à la redistribution locale de la chaleur. Car un peu comme un parapluie permet à la personne qui le tient de rester au sec, les cimes des arbres savent disperser la chaleur. La distribuer vers les hauteurs. Sans forêt, en revanche, plus rien n'empêche les rayons du soleil de toucher directement le sol.

    Cycle de l’eau et albédo

    Les chercheurs ont aussi analysé les conséquences de la déforestation sur le cycle de l’eau. Un autre facteur qu'ils jugent particulièrement important. Une fois les arbres coupés, en effet, la pompe qui transfère l'eau de la surface vers les airsairs disparaît. Le régime des précipitations change.

    Il change aussi parce que les forêts constituent une importante source de composés organiques volatilscomposés organiques volatils biogéniques (COVB). Ces derniers sont impliqués dans la formation des nuages. Moins de COVB à cause de la déforestation et vous aurez moins de gouttelettes d'eau dans les nuages. Des nuages qui deviendront ainsi par ailleurs moins brillants et réfléchiront de fait moins d'énergie solaire vers l'espace. Jusqu'alors, les chercheurs pensaient que les différents effets biophysiques se compensaient. Mais ces nouveaux travaux montrent au contraire à quel point la déforestation réduit l'effet globalement refroidissant des nuages.

    Ils confirment la nécessité de mettre en œuvre d'urgence une gestion plus durable des forêts. Aussi bien dans les tropiques qu'ailleurs dans le monde. Comme le rappelait déjà Antonio Guterres, le secrétaire général de l'ONU, ce lundi 21 mars 2022, à l'occasion de la Journée internationale des forêts. « Il est temps de voir une action concrète et crédible sur le terrain. »