Jusqu’à présent, les chercheurs dataient aux années 1990, l’accélération de la hausse du niveau des océans. Mais de nouveaux travaux suggèrent qu’une nette accélération a commencé à apparaître à partir de la fin des années 1960.


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    La montée globale du niveau de la mer, certains la vivent déjà. Sur la côte est américaine par exemple, lorsque la maréemarée atteint son apogéeapogée, certaines rues les plus basses sont désormais inondées. Il y a même une expression pour pareille situation : les « inondations d'une journée ensoleillée ». En cause : la fontefonte des glaces du Groenland et de l'Antarctique notamment, conséquence du réchauffement climatique.

    Depuis le début des années 1990, des satellites mesurent avec une bonne précision, le niveau des océans sur notre planète. C'est ainsi que les chercheurs ont pu constater une montée des eaux. Une montée qui depuis, n'a eu de cesse de s'accélérer.

    Il restait cependant difficile de déterminer quand le phénomène avait commencé, dans quelle région et par quel processus. Car avant les données fournies par le satellite Topex/Poséidon à partir de 1992, les informations en la possession des chercheurs étaient trop imprécises et partielles, ne reposant que sur quelques centaines de marégraphes situés le long des côtes.

    Dans l'espoir d'estimer de manière bien plus précise les niveaux des mers à partir des données de ces marégraphes, une équipe internationale de chercheurs a opté pour une approche nouvelle afin de reconstruire les niveaux de la mer depuis 1900. Cette reconstruction a permis de retrouver les valeurs fournies par les observations satellites. De quoi prouver son efficacité. Et donner du crédit à son principal résultat : la hausse accélérée du niveau des océans a débuté dans les années 1960.

    Dans l’hémisphère sud, l’intensification et le léger décalage des vents d’ouest ont entraîné une augmentation beaucoup plus rapide de la hausse du niveau de la mer dans le Pacifique Sud par rapport à la moyenne mondiale. Cependant, par la circulation des masses d’eau, l’élévation du niveau de la mer ralentit dans la région au sud des vents d’ouest. © Université de Siegen
    Dans l’hémisphère sud, l’intensification et le léger décalage des vents d’ouest ont entraîné une augmentation beaucoup plus rapide de la hausse du niveau de la mer dans le Pacifique Sud par rapport à la moyenne mondiale. Cependant, par la circulation des masses d’eau, l’élévation du niveau de la mer ralentit dans la région au sud des vents d’ouest. © Université de Siegen

    Le rôle de la dilatation de l’eau

    Notez que la hausse du niveau de la mer ne se fait pas de la même manière partout sur le Globe. L'eau y est en effet inégalement distribuée par des variations du champ de gravitégravité, la circulation des océans ou encore des régimes de vents puissants. « Nous avons constaté que la hausse la plus importante se situait dans l'hémisphère sud, et plus précisément encore, du côté subtropical du Pacifique sud, à l'est de l'Australie et de la Nouvelle-Zélande », précise Sönke Dangendorf, chercheur à l'université de Siegen (Allemagne).

    Un niveau qui augmente cinq fois plus vite que la moyenne.

    Ici, la hausse du niveau des océans semble se produire cinq fois plus rapidement que la moyenne. Le résultat, probablement, de changements dans le régime des vents d'ouest de l'hémisphère sud -- qui ont connu une forte intensification et une modification de positionnement --, les fameux quarantièmes rugissants. Car lorsque les vents s'intensifient, la quantité de chaleurchaleur atmosphérique absorbée par l'océan augmente. L'eau se dilate et le niveau monte.

    Ces résultats soulignent l'importance du rôle de la dilatationdilatation de l'eau dans la vitessevitesse de montée du niveau des océans. Extrapolés sur le futur, ils pourraient pousser les chercheurs à revoir leurs estimations. Ainsi l'ampleur de l'élévation du niveau de la mer pourrait être deux fois plus importante d'ici 2100 que prévu jusqu'alors.


    Réchauffement : la montée des océans largement sous-estimée ?

    Le réchauffement climatique suivrait actuellement les tendances prévues par le GiecGiec, mais pas la hausse du niveau des mers. Des populations pourraient se retrouver les pieds dans l'eau avant l'heure ! 

    Article de Quentin Mauguit paru le 29/11/2012

    Image du site Futura Sciences
    Le Groupe intergouvernemental d'experts sur l'évolution du climat (Giec) est une organisation ouverte à tous les pays membres de l'ONU. Elle synthétise les informations fournies par des laboratoires du monde entier sur les impacts de l'Homme sur le climat. Elle ne réalise pas de recherches et n'en commande pas. © Kirsten Spry, Flickr, cc by nc sa 2.0

    Depuis 1988, un groupe intergouvernemental d'experts, le Giec, se charge de récolter des informations scientifiques sur l'évolution passée et future de notre climatclimat. Régulièrement, leurs données sont compilées puis présentées par le biais de rapports. Quatre éditions ont déjà été publiées (1990, 1995, 2001 et 2007), et une cinquième devrait voir le jour en 2014. 

    Ces documents se veulent prospectifs puisqu'ils fournissent des résultats de projections. Ainsi, selon les 3e et 4e éditions (respectivement nommées TAR et AR4), la TerreTerre serait amenée à se réchauffer d'environ 0,2 °C par décennie d'ici 2027, sur la base de plusieurs scénarios d'émissionsémissions de gaz à effet de serre. Simultanément, la montée du niveau des mers devrait se poursuivre à la vitesse de 2 mm par an, d'après des projections dites « centrales ». Mais qu'en est-il réellement ? 

    Avec le recul, il est maintenant possible de confronter ces résultats avec des données concrètes. C'est en substance ce qu'ont fait des chercheurs du Potsdam Institute for Climate Impact Research (Allemagne), du Tempo Analytics (États-Unis) et du Laboratoire d'études en géophysique et océanographie spatiales (France). Globalement, le réchauffement climatique suivrait relativement bien la tendance définie dans le passé. En revanche, le niveau des océans s'élèverait 60 % plus vite que prévu !

    La courbe rouge caractérise l’augmentation mesurée par satellite du niveau des mers en cm en fonction du temps. Elle est comparée aux données récoltées par des marégraphes (en orange). Les traits bleus et verts correspondent aux projections établies par le Giec, respectivement dans ses 3<sup>e</sup> et 4<sup>e</sup> rapports, sur la base de différents scénarios d’émissions de gaz à effet de serre. Les océans montent bien plus vite que prévu. © Adapté de Rahmstorf <em>et al.</em> 2012, ERL
    La courbe rouge caractérise l’augmentation mesurée par satellite du niveau des mers en cm en fonction du temps. Elle est comparée aux données récoltées par des marégraphes (en orange). Les traits bleus et verts correspondent aux projections établies par le Giec, respectivement dans ses 3e et 4e rapports, sur la base de différents scénarios d’émissions de gaz à effet de serre. Les océans montent bien plus vite que prévu. © Adapté de Rahmstorf et al. 2012, ERL

    Une fonte des calottes glaciaires sous-estimée

    Cinq jeux de données de températures terrestres et océaniques mesurées entre 1990 et 2011 ont été utilisés pour suivre l'évolution passée du réchauffement climatique. Lors des calculs, les valeurs moyennes ont été transformées en vue de supprimer l'influence des éruptions volcaniqueséruptions volcaniques (événements associés à la libération d'aérosolsaérosols), des variations du rayonnement solairerayonnement solaire et de la survenue d'épisodes El Niño. Ces trois facteurs peuvent en effet modifier le climat à court terme. Ainsi, la Terre se réchaufferait actuellement de 0,16 °C par décennie, une valeur en accord avec plusieurs projections du Giec.  

    Les marégraphes ne permettant pas d'étudier la hausse du niveau des mers avec précision, les chercheurs se sont appuyés sur des données satellite pour parvenir à leurs fins. Les océans se seraient ainsi élevés de 3,2 mm par an ces 5 dernières années, soit bien plus que les 2 mm par an initialement prévus. Les projections sur le long terme publiées par le Giec pourraient donc se révéler biaisées vers le bas. Ce groupe d'experts a néanmoins précisé dans son dernier rapport que les valeurs fournies ne tenaient pas compte d'une « évolution dynamique rapide de l'écoulement glaciaire », c'est-à-dire d'une importante fonte des calottes glaciaires et des glaciersglaciers

    L'étude a été publiée dans la revue Environmental Research Letters (ERL). Selon Stefan Rahmstorf, ces résultats « montrent une fois encore que le Giec est loin d'être alarmiste et que, en réalité, il a sous-estimé les risques possibles du réchauffement climatique dans certains cas ». Quoi qu'il en soit, les chiffres sont préoccupants pour de nombreuses populations côtières. De grandes surfaces habitées pourraient en effet se retrouver sous l'eau plus tôt que prévu, les océans risquant de monter d'ici 2100 au-delà des 17 à 60 cm initialement avancés.