Il aura fallu aux chercheurs de longs mois de travail minutieux pour toucher au but. Mais leur patience a été récompensée. Ils sont parvenus à analyser des traces d’eaux de pluie plus anciennes que les dinosaures. Et à partir de là, ils ont réussi à retracer la topographie de surface de la Bretagne pour nous emmener dans un vertigineux voyage dans le temps… et l’espace.


au sommaire


    En analysant les eaux de pluie, les chercheurs peuvent aisément remonter à des données relatives à la pollution atmosphérique. Mais ils peuvent également réussir à reconstruire tout un pan de l'histoire -- et même de la géographie -- d'une région. C'est ce que montrent des travaux menés par une équipe internationale (France, Royaume-Uni et Allemagne) sur des échantillons d'eaux de pluie prélevés en Bretagne, eaux de pluie dissimulées dans des roches granitiques échouées sur la côte, entre Brest et Nantes.

    Pour estimer l'âge de ces traces d'eaux de pluie, les chercheurs ont d'abord eu recours à une méthode très classique de datation radiométrique. Résultat : ces pluies se sont abattues sur la région il y a environ 300 millions d’années.

    Et ce sont ensuite des analyses, par spectrométrie de massespectrométrie de masse notamment, qui ont permis aux scientifiques d'en apprendre plus sur « l'altitude et la latitude » sous lesquelles ces pluies sont tombées. De quoi confirmer qu'à la fin du Carbonifère, le Massif armoricain se situait... au niveau de l'équateur, au cœur de la chaîne varisque formée par le rapprochement de deux continents qui allait donner la Pangée, positionné à une altitude proche de celle des Alpes mais dont il ne reste aujourd'hui que peu de reliefs.

    Des scientifiques examinant des roches originaires de la ceinture varisque sur la presqu’île de Quiberon (Bretagne). © Camille Dusséaux, Université de Plymouth
    Des scientifiques examinant des roches originaires de la ceinture varisque sur la presqu’île de Quiberon (Bretagne). © Camille Dusséaux, Université de Plymouth

    Des eaux de pluie à l’origine de la radioactivité naturelle locale

    Les chercheurs ont également tiré une autre information intéressante de cette étude. Il y a entre 320 et 300 millions d'années, l'eau de pluie qui tombait sur la chaîne varisquechaîne varisque a lixivié (filtré) le minerai d’uranium du granite qui composait les montagnes. Puis, elle l'a transporté jusqu'au continent où il a été fixé par les sédiments que sont par exemple les schistesschistes noirs.

    Ce processus a permis de créer les gisementsgisements d'uraniumuranium, encore exploités récemment en France, mais aussi ceux d'oxydes d'uranium, eux-mêmes à l'origine de la formation de radon, un élément naturellement radioactif qui constitue la principale source de radioactivitéradioactivité à laquelle un Homme moyen est exposé.

    L’eau de pluie pourrait être à l’origine de processus importants

    « Cette étude montre comment la géochimie des isotopesisotopes et une pétrographie minutieuse des minérauxminéraux formés profondément dans la TerreTerre peuvent éclairer les conditions de surface, même avant que les dinosauresdinosaures ne parcourent la Terre, conclut Catriona Menzies, chercheur en géosciences à l'université d'Aberdeen (Écosse). De telles infiltrations profondes d'eau de pluie ont été trouvées dans d'autres montagnes, anciennes comme plus récentes. Cela suggère que l'eau de pluie pourrait être à l'origine de processus importants tels la distribution des ressources minérales ».