La récente description de nouvelles espèces de vers marins permet de mieux connaître la biodiversité marine dans des lieux pourtant censés avoir été passés au peigne fin ! Une belle opportunité pour un biologiste marin de donner des noms de stars à ces espèces afin de sensibiliser le public aux « vers spaghetti ».


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    Une étude récemment parue dans le journal Zootaxa a permis de décrire neuf nouvelles espèces de Terebellidae, des vers marins (annélides polychètes) plus vulgairement connus sous le nom de « vers spaghetti », en raison de leurs tentacules buccaux qui leur permettent de fouiller le sédiment pour se nourrir.

    Vue d'artiste du ver spaghetti <em>Loimia ramzega</em>. « Ramzeg » signifie « gigantesque » en breton car l'espèce a été découverte dans le Finistère. © Lisa Miroglio
    Vue d'artiste du ver spaghetti Loimia ramzega. « Ramzeg » signifie « gigantesque » en breton car l'espèce a été découverte dans le Finistère. © Lisa Miroglio

    Le premier auteur de cette dernière publication du « Spaghetti Project » est Nicolas Lavesque, ingénieur de recherche au CNRS, qui prépare une thèse à la station marine d'Arcachon où il se livre à la taxonomietaxonomie. Sa passion pour les vers marins lui vient en partie de la rencontre avec la spécialiste mondiale de ce groupe, le Dr Pat Hutchings, qui travaille en Australie. Cet intérêt pour ce groupe peut pourtant être difficile à comprendre car, comme Nicolas Lavesque le dit, lorsque des collègues passent au laboratoire, ils lui disent « Ah mais c'est moche ces bestioles ! ». Lui en fait abstraction car ce qui l'attire particulièrement chez ces espèces c'est qu'elles « sont présentes dans tous les océans, de l'Antarctique à l'Arctique, des estuaires aux abysses » et que « dès qu'on fouille un peu le sédiment, on voit que ce sont elles qui dominent, en nombre d'espèces et aussi souvent en abondance ».

    Dès qu'on fouille un peu le sédiment, on voit que ce sont elles qui dominent

    Nicolas Lavesque rappelle que ces vers ont également un rôle très important dans les réseaux trophiques et qu'ils peuvent présenter « une diversité de formes incroyable, ce qui est passionnant ». Il existe par exemple des annélides polychètes dont le corps se transforme complètement à la Pleine LunePleine Lune, ce qui leur permet de remonter dans la colonne d'eau et qui « explosent dans l'eau pour libérer leurs gamètesgamètes ».

    Découvrir et nommer une espèce

    Lorsqu'il décrit une nouvelle espèce, Nicolas Lavesque met un point d'honneur à ce que celle-ci soit définie par des critères génétiquesgénétiques et morphologiques. Ces derniers peuvent par exemple concerner « le segment du corps à partir duquel se trouvent les premières soies [qui ressemblent à de longs poils, ndlr] et le nombre et la forme des branchies ». À la question « quelle est ta réaction quand tu te rends compte que tu es en train d'observer une nouvelle espèce ? », il répond qu'à « la première, on est hyperexcité, on saute partout dans le labo, c'est un peu comme un enfant qui reçoit le jouet dont il a toujours rêvé et au bout de la 31e espèce, on est toujours aussi excité, ça ne change pas ! ».

    <em>Lanice kellyslateri</em> est l'une des nouvelles espèces de vers marins décrites cette année. © Nicolas Lavesque
    Lanice kellyslateri est l'une des nouvelles espèces de vers marins décrites cette année. © Nicolas Lavesque

    Au cours de sa thèse de trois ans, Nicolas Lavesque et ses collaborateurs ont découvert 31 nouvelles espèces de vers spaghetti, dont plusieurs en rade de Brest et dans le Bassin d'Arcachon. L'aspect étonnant est que ces vers ont été découverts « en France, dans des endroits extrêmement bien connus, que les naturalistes ont étudiés depuis le XIXe siècle ». Parmi les noms qui ont été donnés à ces nouvelles espèces, on remarque ceux de Lanice kellyslateri, inspiré du surfer Kelly Slater, de Terebella banksyi, dédié à l'artiste Banksy, de Pista miosseci inspiré du chanteur brestois Miossec et Paramphitrite dragovabeci dédié au joueur du stade brestois Drago Vabec.

    L'espèce <em>Pista miosseci</em> a été nommée d'après le nom du chanteur brestois Miossec. © Nicolas Lavesque
    L'espèce Pista miosseci a été nommée d'après le nom du chanteur brestois Miossec. © Nicolas Lavesque

    Pour conclure, on retiendra ceci de l'entretien avec Nicolas Lavesque : « Avec le réchauffement climatiqueréchauffement climatique on parle de modification importante de la biodiversité, ce qui est vrai à 200 % mais pour bien évaluer ce problème, encore faut-il bien connaître cette biodiversitébiodiversité. En effet, toutes ces nouvelles espèces que nous venons de décrire ont probablement toujours été là, elles étaient juste mal identifiées. »

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