20 % des écosystèmes risquent de s'effondrer dans les prochaines décennies, et certains d'ici 2030, alors que les scientifiques pensaient jusqu'à maintenant que cela n'aurait pas lieu avant la fin du siècle. La disparition de ces écosystèmes est en effet capable de s'accélérer subitement à cause d'un paramètre qui était sous-estimé jusqu'à maintenant : les phénomènes météo extrêmes.


au sommaire


    L'effondrementeffondrement d'une partie des écosystèmes naturels va se produire bien plus tôt que prévu : non pas à la fin du siècle, mais plutôt d'ici 2050, voire même pour certains, d'ici 2030.

    Qu'est-ce que l'effondrement d'un écosystème ? C'est par exemple, lorsque la forêt tropicale se transforme en savane ou en terre agricole. Ou bien encore, lorsque la savane se transforme en désert. Ces changements de régime qui se mettent en place progressivement ont été identifiés dans 20 types différents d'écosystèmes.

    Un effondrement de certains milieux naturels 80 % plus tôt

    Les auteurs d'une étude, parue dans Nature Sustainability le 22 juin estiment qu'au niveau mondial, 20 % des écosystèmes risquent de s'effondrer, et/ou de se transformer en quelque chose de complètement différent. Rien d'étonnant compte-tenu de la destruction des terres, de l'augmentation de la population humaine, et du changement climatique, sauf que cet effondrement n'était pas attendu avant la fin du siècle. Mais les scientifiques expliquent que les phénomènes météométéo extrêmes représentent un stressstress sur la biodiversité qui a été sous-évalué jusqu'à maintenant : l'effondrement de certaines zones naturelles pourrait en fait avoir lieu 80 % plus tôt ! Et ces écosystèmes ne fonctionnent pas de manière isolée : l'effondrement de l'un d'entre eux impacte forcément les autres, car les interactions sont nombreuses, au niveau du climatclimat et de la biodiversité. C'est ce qu'on appelle un effet feedback.

    L'impact des phénomènes météo violents, comme des pluies diluviennes, n'a jusqu'à maintenant pas été assez pris en compte dans les risques d'effondrement des milieux naturels.  © basilsmith, Pixabay
    L'impact des phénomènes météo violents, comme des pluies diluviennes, n'a jusqu'à maintenant pas été assez pris en compte dans les risques d'effondrement des milieux naturels.  © basilsmith, Pixabay

    La météo est souvent responsable de l'accélération d'une catastrophe déjà en cours

    Pour établir de telles conclusions, les chercheurs ont simulé la réponse de ces zones naturelles à l'évolution prévue de l'activité humaine et du climat. Car la rapidité de l'effondrement d'un milieu dépend toujours de plusieurs facteurs : les scientifiques ont par exemple étudié le lac Chilika en Inde. En temps normal, les pêcheurs n'attrapent que les poissonspoissons adultes et le stock de poissons se maintient sans trop de pressionpression. Mais lorsque la nourriture manque, les pêcheurs attrapent alors aussi les tout jeunes poissons, créant un déséquilibre qui impacte la reproduction. Et dans ce cas, il suffit d'une vaguevague de chaleurchaleur ou d'un autre phénomène météo extrême pour créer un véritable désastre naturel. Les simulations ont montré que la conjonctionconjonction de plusieurs facteurs, parmi lesquels des phénomènes météo soudains et violents, mène alors à un effondrement précoce.

    Une chaleur anormale, ou une sécheresse, peut précipiter un écosystème fragilisé vers la fin. © JodyDellDavis, Pixabay
    Une chaleur anormale, ou une sécheresse, peut précipiter un écosystème fragilisé vers la fin. © JodyDellDavis, Pixabay

    L'étude montre que pour 15 % des écosystèmes qui s'effondrent de manière précoce, c'est un phénomène météo violent qui a précipité la zone naturelle vers sa destruction.


    La destruction de la biodiversité au rythme actuel mènera à un effondrement total des écosystèmes

    Article de Nathalie MayerNathalie Mayer, écrit le 1er mars 2023Les leçons du passé sont parfois sans concession. Et celle que les chercheurs viennent d'apprendre d'une extinction de masseextinction de masse qui s'est jouée il y a plus de 250 millions d'années est on ne peut plus claire. Détruire la biodiversité au rythme où nous le faisons actuellement mènera à un effondrement total des écosystèmes.

    À plusieurs reprises dans son histoire, notre Terre a connu des épisodes d’extinction de masse. Lorsqu'une météoritemétéorite a frappé notre Planète, il y a quelque 66 millions d'années, effaçant les dinosauresdinosaures de la surface de la Terre par exemple. Mais l'extinction la plus importante s'est produite il y a environ 252 millions d'années. Elle est connue sous le nom d'extinction PermienPermien-|b4b3232d82defc20a01f767759e7e340| Les scientifiques s'accordent sur ses causes -- une forte activité volcanique suivie d'un pic de dioxyde de carbonedioxyde de carbone (CO2). Mais, jusque-là, ils ne comprenaient toujours pas bien comment cette extinction et l'effondrement biologique qui a suivi se sont déroulés.

    Voir aussi

    Pourquoi les changements climatiques conduisent toujours à des extinctions de masse

    Dans l'espoir d'en apprendre plus, une équipe internationale de chercheurs a analysé les écosystèmes marins avant, pendant et après cet épisode d'extinction de masse. Les résultats de ces travaux révèlent que la perte de biodiversité pourrait être le signe avant-coureur d'un effondrement écologique plus dévastateur. Une conclusion pour le moins préoccupante compte tenu du taux de perte d'espècesespèces que nous connaissons aujourd'hui. Il dépasse en effet celui qui a été observé lors de l'extinction de masse Permien-Trias.

    Les chercheurs ont travaillé sur des fossiles du sud de la Chine, une région qui correspondait alors à une mer peu profonde. Une région riche en fossilesfossiles qui peuvent être datés très précisément. Ce que les chercheurs ont fait, c'est qu'ils ont classé les espèces dans des groupes exploitant les ressources de manière similaire. De quoi analyser les relations proie-prédateur et déterminer les fonctions remplies par chacun.

    La redondance, secret de l’équilibre des écosystèmes

    « Malgré la perte de plus de la moitié des espèces de la Terre au cours de la première phase de l'extinction, les écosystèmes sont restés relativement stables », rapporte Yuangeng Huang, chercheur à l'Université des géosciences de Chine, dans un communiqué de l’Académie des sciences de Californie (États-Unis). Les interactions entre les espèces n'ont diminué que légèrement dans la première phase de l'extinction. Elles ont en revanche chuté de manière significative dans la deuxième phase, provoquant la déstabilisation des écosystèmes. « Les écosystèmes ont été poussés à un point de basculement dont ils ne pouvaient pas se remettre », poursuit Huang.

    Les chercheurs expliquent le phénomène par une analogieanalogie économique. Lorsque plusieurs entreprises proposent le même service, la disparition de l'une d'entre elles ne met pas en péril l'économie dans son ensemble. Puisque les autres prennent le relais. De même dans un écosystème, une certaine redondance fonctionnelle permet à des espèces de prendre le relais d'espèces éteintes. Au cours de la première phase de l'extinction de masse Permien-Trias, c'est principalement la redondance fonctionnelle qui a diminué. Mais il restait suffisamment d'espèces pour remplir les fonctions essentielles à la survie des écosystèmes. Lorsque des perturbations environnementales (réchauffement climatiqueréchauffement climatique et acidification des océans) se sont ajoutées à cela, les écosystèmes ont finalement manqué de cette résistancerésistance renforcée, ce qui a conduit à un effondrement écologique brutal.

    De quoi alerter sur la nécessité de prendre en compte le besoin de redondance fonctionnelle dans nos stratégies de conservation. « Nous perdons actuellement des espèces à un rythme plus rapide que lors de tous les événements d'extinction passés de la Terre. Il est probable que nous soyons dans la première phase d'une autre extinction de masse plus grave, conclut Huang. Nous ne pouvons pas prédire le point de basculement vers un effondrement total, mais il se produira inévitablement si nous n'inversons pas la perte de biodiversité ».