Les océanographes connaissent l'accumulation de matières plastiques dans l'océan Pacifique et dans le nord de l'océan Atlantique, tandis que Tara part étudier cette pollution en Méditerranée. Une autre expédition scientifique vient de découvrir ces déchets dans les glaces de l’Arctique, sous forme de microfragments, dont plus de la moitié proviennent... de nos vêtements. De quoi rendre un peu plus préoccupante la réduction de la banquise autour du pôle Nord.

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    Rachel W. Obbard est une physicienne mais son domaine de recherche favori en physiquephysique du solidesolide, c'est celui de la glace des régions polaires. On peut donc aussi la considérer comme une glaciologue. Avec des collègues, dont certains s'occupent de biologie et d'écologie marine, elle vient de publier un article dans Earth’s Future qui concerne une étonnante découverte que les chercheurs ont faite en analysant la composition de glaces ramenées d'expéditions en Arctique en 2005 et 2010.

    L'humanité a produit environ 300 millions de tonnes de matière plastiquematière plastique en 2012 et une partie va rejoindre la « Grande zone d'ordures du Pacifique » (ou GPGP, pour Great Pacific Garbage Patch) une zone du gyre subtropical du Pacifique nord. On connaît aussi une région d'accumulation en Atlantique et l'expédition Tara Méditerranée est essentiellement consacrée à cette pollution.

    Pour l'essentiel, ces déchets se présentent sous forme de microfragments ne dépassant pas 5 mm de long et ne disparaissent pas facilement. L'inquiétant est surtout qu'ils concentrent des polluants organiques dangereux. Comme ces microfragments peuvent être ingérés par des êtres vivants dans lesquels ils libèrent les substances qu'ils ont accumulées, ils peuvent contribuer à l'entrée dans la chaîne alimentaire de ces produits nocifs.


    Une vidéo avec des extraits de la mission Tara en Arctique en 2013. Une nouvelle expédition va étudier la pollution par les matières plastiques en Méditerranée. © Tara Expéditions, YouTube

    Des traces de nos vêtements dans la banquise

    Les travaux des chercheurs révèlent que les glaces arctiques semblent contenir une centaine de microfragments de matières plastiques par mètre cube, ce qui représente une concentration mille fois supérieure à celle du GPGP. Pour établir ce résultat, les scientifiques ont fait fondre les quatre carottes de glacecarottes de glace ramenées par des expéditions polaires. Après filtrationfiltration, les résidus ont été observés au microscopemicroscope et les microfragments qui ont été repérés ont été analysés chimiquement.

    Ils contiennent 54 % d'une fibre cellulosique recomposée chimiquement et bien connue de l'industrie textile : la rayonne. Dans l'ordre d'importance décroissante, l'analyse a montré la présence de polyester (21 %), de nylonnylon (16 %), de polypropylènepolypropylène (3 %) ainsi que de polystyrènepolystyrène, de l'acrylique et du polyéthylènepolyéthylène à hauteur de 2 % chacun.

    Il ne s'agit que d'une première estimation. Mais si elle devait se confirmer, la diminution de la banquisebanquise constatée d'année en année sous l'effet du réchauffement climatiqueréchauffement climatique devrait donc libérer les microfragments stockés temporairement dans les glaces. Nul ne peut encore prédire quels impacts ils auront sur l'écosystème et la chaîne alimentaire mais il s'agit indiscutablement d'une question à examiner de plus près.