Des chercheurs allemands publient dans Nature un protocole de greffe d’un cœur de cochon génétiquement modifié chez le babouin. En obtenant une survie allant jusqu’à 195 jours, ils permettent de se rapprocher un peu plus des applications médicales à l'Homme.


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    La transplantation cardiaque est parfois le seul traitement possible pour des personnes souffrant d'une insuffisance cardiaque grave et chez qui les autres traitements ont échoué. En France, en 2016, il y a eu 477 greffes de cœur et 576 nouveaux patients ont été inscrits sur liste d'attente, d'après l'agence de biomédecine. Comme les donneurs sont peu nombreux, des chercheurs réfléchissent à la possibilité d'utiliser des cœurs d'animaux comme le cochon et donc de pratiquer des xénogreffes, c'est-à-dire des greffes entre espècesespèces différentes.

    Cette nouvelle étude a été menée par l'université de Munich, entre février 2015 et août 2018. Ce n'est pas la première fois qu'un cœur de porc est greffé sur des babouins mais, comme le notent les auteurs, « Malgré 25 années de recherches approfondies, la survie maximale d'un babouin après remplacement du cœur par une xénogreffe de porc n'était que de 57 jours et ceci n'a été atteint, à notre connaissance, qu'une seule fois. »

    Des modifications génétiques pour éviter le rejet de la greffe

    Quatorze cœurs de jeunes porcs ont été greffés sur 14 babouins adultes. Les animaux donneurs ont subi des modifications génétiques afin de ne pas exprimer des moléculesmolécules susceptibles de provoquer un rejet et d'empêcher des réactions immunitaires. Plusieurs protocolesprotocoles ont été testés pour perfectionner la technique, comme décrit sur CNN. Les babouins qui ont le mieux survécu ont eu des anti-hypertenseursanti-hypertenseurs car les cochons ont une pressionpression sanguine plus basse que les babouins ; ils ont aussi eu un traitement qui évite que le cœur grossisse car les cœurs greffés avaient tendance à gagner du poids. Parmi les cinq babouins qui ont suivi ces traitements particuliers, un a vécu 182 jours et un autre 195.

    D'autres travaux doivent être faits pour savoir si ces cœurs de porc génétiquement modifiés peuvent être greffés chez l'Homme, en tenant compte des problèmes de rejet liés aux xénogreffes.


    Des cochons OGM pour transplanter des organes

    Article paru le 14 août 2017

    L'entreprise eGenesis a annoncé avoir obtenu 37 petits cochons génétiquement modifiés en vue d'obtenir des organes transplantables chez l'Homme. Un rétrovirus porcin qui pouvait être gênant pour des greffes a été retiré du génomegénome du cochon grâce à une technique d'édition génomiqueédition génomique.

    Transplanter des organes de cochon pour pallier le manque de donneurs, pourquoi pas ? Le porc possède des organes de taille proche de celle de l'Homme. Cependant, la technique ne serait pas forcément sans risque. En particulier, certains scientifiques s'inquiètent de la présence chez le cochon de rétrovirus, les PERV (Porcine Endogenous Retrovirus). Les gènesgènes de ces rétrovirus endogènesendogènes, qui témoignent d'infections anciennes, sont disséminésdisséminés dans le génome du cochon. On peut se demander si ces virusvirus pourraient infecter un humain qui recevrait le cœur ou le reinrein d'un cochon.

    Une entreprise américaine, qui s'est donné comme objectif de produire des organes de cochons pour des greffes, affirme avoir résolu ce problème : en utilisant la technique d'édition génomique CRISPRCRISPR, les chercheurs ont créé plusieurs dizaines de petits cochons apparemment en bonne santé et sans trace de gènes de PERV.

    Pour cette nouvelle recherche parue dans Science, l'entreprise a travaillé avec des scientifiques danois et chinois. Le système CRISPR a été appliqué sur des cellules de tissu conjonctif de fœtusfœtus de cochon. Pour obtenir les petits cochons, les chercheurs ont utilisé une technique de clonageclonage : ils ont introduit les noyaux des cellules modifiées par CRISPR dans des ovocytesovocytes récupérés dans des ovairesovaires de truies provenant d'un abattoir chinois. Les cellules œufs ont donné des embryonsembryons qui ont ensuite été implantés dans l'utérusutérus d'une truie.

    L’outil d’édition du génome CRISPR-Cas9 agit comme des ciseaux moléculaires qui peuvent découper des gènes. © Mopic, Fotolia
    L’outil d’édition du génome CRISPR-Cas9 agit comme des ciseaux moléculaires qui peuvent découper des gènes. © Mopic, Fotolia

    Des interrogations sur la dangerosité des rétrovirus PERV

    D'après les résultats, les petits cochons génétiquement modifiés étaient en bonne santé. Les tissus des 37 cochons ont été testés et ils semblaient dépourvus de PERV. Toutefois, supprimer le problème PERV n'est pas suffisant pour envisager des greffes : d'autres modifications génétiques seront probablement nécessaires pour que les organes de cochon ne soient pas rejetés par le système immunitairesystème immunitaire humain.

    Le saviez-vous ?

    En France, en 2016, d'après l'agence de biomédecine, plus de 5.800 greffes ont été réalisées, dont plus de la moitié sont des greffes de rein. 22.000 patients ont été en attente d'une greffe d'organe.

    En réalité, les scientifiques ne savent pas vraiment si les particules virales de PERV pourraient infecter les humains et causer des maladies humaines. D'après Sciencemag, des scientifiques ont déjà implanté des cellules de pancréaspancréas de cochon chez des patients diabétiquesdiabétiques sans avoir de problème avec PERV. Mais il s'agissait d'un petit nombre de cellules. La greffe de gros organes pourrait poser bien plus de problèmes.

    Comme le risque lié aux PERV est incertain, des scientifiques se demandent si ces expériences étaient vraiment indispensables pour obtenir des organes prêts à transplanter. Ainsi, Muhammad Mohiuddin, un chirurgien de l'université du Maryland à Baltimore, qui travaille aussi avec une entreprise (United Therapeutics) pour développer des cœurs de cochons prêts à implanterimplanter, émet des doutes : « En ce moment, je ne pense pas que nous soyons très préoccupés par PERV ». L'étape d'édition génomique qui vise à supprimer les gènes PERV rend plus complexe le processus et ajoute un coût supplémentaire...


    Science décalée : des mini-cochons OGM comme animaux de compagnie

    Article de Marie-Céline Jacquier paru le 4 octobre 2015

    L'institut de génomique chinois BGI a annoncé qu'il allait vendre des petits cochons génétiquement modifiés comme animaux de compagnie au prix de 1.600 dollars. Au départ, ces animaux avaient été créés pour la recherche scientifique.

    Un chien, un chat, c'est trop banal à votre goût ? Alors, essayez le micro-cochon génétiquement modifié : ces animaux adorables ont été « construits » pour la recherche mais se retrouvent maintenant sur le marché comme animaux de compagnie. En effet, les cochons sont souvent utilisés dans les expériences génétiques, car ils sont plus proches de l'Homme que des souris ou des rats, ce qui en fait des modèles d'étude pour des maladies humaines. Mais leur taille importante fait qu'ils coûtent plus cher que des rongeursrongeurs et nécessitent de plus grosses doses de médicaments lors des études.

    Ici, les micro-cochons présentés à Shenzhen, pèsent environ 15 kgkg, soit le même poids qu'un chienchien de taille moyenne et sont une version modifiée du cochon de Bama, un cochon chinois de petite taille. Les cochons de Bama « naturels » pèsent entre 35 et 50 kg, tandis qu'un cochon de ferme avoisine plutôt les 110 kg.

    BGI a présenté ses micro-cochons tout mignons lors d’un sommet à Shenzhen en Chine. © BGI, Nature
    BGI a présenté ses micro-cochons tout mignons lors d’un sommet à Shenzhen en Chine. © BGI, Nature

    Pour créer ce modèle réduit de cochon de Bama, les scientifiques en ont cloné à partir de cellules provenant de fœtus de Bama. Mais avant de les cloner, ils ont utilisé le système TalenTalen (TranscriptionTranscription activator-like effector nuclease), qui sert à inactiver des gènes. Talen utilise une protéineprotéine qui s'associe à l'ADNADN et guide une enzymeenzyme vers un gène pour le couper. Grâce à cela, il a été possible de désactiver une des deux copies du gène du récepteur de l'hormonehormone de croissance (GHR) dans les cellules d'un fœtus de Bama. En l'absence du récepteur de l'hormone de croissance, les cellules ne reçoivent pas le signal de croissance pendant le développement de l'animal, ce qui permet d'obtenir des cochons minuscules.

    Ensuite les scientifiques ont croisé les clonesclones de micro-mâles avec des femelles de taille normale. Environ la moitié de la portée ainsi obtenue était des micro-cochons. Les scientifiques expliquent que le fait de croiser les micro-mâles avec des femelles normales était préférable au clonage répété des animaux pour éviter des problèmes de santé. D'après l'institut de génomique chinois BGI qui a réalisé ces expériences, il n'y a pas eu d'effets secondaires sur la santé des 20 cochons de seconde génération ainsi obtenus.


    Cette vidéo montre un élevage en Chine de cochons nains de Bama. © CCTV

    Des manipulations génétiques qui soulèvent des questions éthiques

    La décision de commercialiser ces micro-cochons a surpris un généticiengénéticien danois, Lars Bolund, qui avait aidé BGI dans son programme de recherche génétique sur cochons. Dans Nature, il admet que les micro-cochons ont volé la vedette lors du sommet de Shenzhen : « Les gens étaient attachés à eux. Tout le monde voulait les tenir ».

    Mais ces petits cochons en tant qu'animaux de compagnie soulèvent de nombreuses interrogations. Par exemple, que fera un micro-cochon s'il est enfermé dans un appartement sans pouvoir creuser dans la terre ? Fera-t-il des dégâts, sera-t-il abandonné ? Et quelles maladies risque-t-il de développer ?

    Ces animaux génétiquement modifiés posent à nouveau la question du contrôle éthique à exercer sur de telles expériences. L'institut de génomique BGI, déjà connu pour des expériences révolutionnaires dans le domaine génétique, souhaite dans un premier temps « mieux évaluer le marché ». Yong Li, directeur technique de la plateforme de science animale à BGI, explique : « Nous prévoyons de prendre les commandes des clients et de voir quelle est l'ampleur de la demande ». D'après BGI, les profits qui seraient tirés de la commercialisation des micro-cochons seraient réinvestis dans la recherche.

    La voie semble aussi toute tracée pour créer des chiens et des chats génétiquement modifiés...