« Bêtes de science », c’est comme un recueil d’histoires. De belles histoires qui racontent le vivant dans toute sa fraîcheur. Mais aussi dans toute sa complexité. Une parenthèse pour s’émerveiller des trésors du monde. Pour ce nouvel épisode, tournons-nous vers une toute petite bête : la fourmi de feu.


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    Des fourmis, il en existe des dizaines de milliers d'espèces. Et elles sont présentes dans pratiquement toutes les régions du monde. Certaines sont moins discrètes que d'autres. Depuis quelque temps, on parle beaucoup d'une certaine Tapinoma magnum. Une sorte de « super-fourmi » envahissante qui dévaste les cultures et résiste aux traitements classiques. En Afrique ? En Amérique du Sud ? Non, en France. En France métropolitaine. Ça a commencé en Corse. Avec le réchauffement climatique, la petite bête s'est attaquée au continent. Au pourtour méditerranéen d'abord parce que ces fourmis aiment les bords de mer, puis au Sud-Ouest. Elles ont désormais même atteint les Pays de la Loire.

    Mais celle dont nous voulons parler aujourd'hui, c'est l'une de ses cousines. Celle que les scientifiques ont baptisée Solenopsis invictaSolenopsis invicta et que l'on surnomme la fourmi de feu. Elle aussi est invasive. D'autant plus qu'elle se montre agressive. Imaginez. Elle a pris pour habitude de mordre ses proies grâce à ses puissantes mandibulesmandibules. Son objectif, c'est de s'y accrocher pour pouvoir ainsi piquer les pauvres victimes à plusieurs reprises de son dard qui ressemble à s'y méprendre à celui d'une guêpe. Leur injectant l'un des venins les plus irritants au monde. Un venin mortel pour pas mal de petits animaux.

    Le décor est planté. Toutefois, ce qui nous intéresse ici, ce sont les capacités cognitives de ces fourmis. Des capacités d'autant plus surprenantes qu'elles ne disposent que d'environ 250.000 neurones. À comparer à nos quelque 86 milliards...

    Un pont au-dessus d’une surface dangereuse

    Malgré ce « handicap », les fourmis de feufeu se montrent capables même de prouesses qui continuent de nous échapper. Alors qu'elles vivent en communautés très denses, elles savent, par exemple, éviter... la formation d'embouteillages !

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    Le secret des fourmis pour éviter les embouteillages

    Elles savent aussi former des radeaux de leurs corps pour échapper aux inondations. En se liantliant les unes aux autres de manière très coordonnée. Chaque fourmi établissant dans l'opération un contact avec pas moins de 14 de ses voisines.

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    Les fourmis construisent des radeaux en cas d’inondations

    Le tout donc, en adoptant des stratégies collectives plutôt qu'individualistes.

    Et voici que les chercheurs ont observé une autre des techniques de groupe que ces étonnantes fourmis ont développée pour contourner les obstacles mis sur leur chemin par la nature. Ou dans ce cas précis, par les scientifiques pris dans leurs expérimentations. Ils ont en effet placé entre nos fourmis de feu et quelques morceaux de saucisse, une surface collante. S'y aventurer aurait été suicidaire. Les petites bêtes auraient en effet risqué de s'y retrouvées prises au piège.

    Mais les fourmis de feu avaient la parade. Elles ont utilisé des débris trouvés aux alentours -- ici, des morceaux de verre mis à leur disposition, dans la nature, cela peut aussi bien être des morceaux de feuilles, des branchages, etc. -- pour construire comme un pont. Venant recouvrir la surface collante.

    Les chercheurs ont observé le même manège lorsqu'il s'est agi pour ces petites bêtes de franchir une surface enduite d'un puissant répulsif à fourmis. Quelques débris déplacés en groupe et le tour a été joué. Montrant une fois encore que les fourmis de feu ne sont... pas si bêtes !

    Et soulignant au passage un rôle que ces insectes jouent dans un processus que les scientifiques connaissent sous le nom de bioturbationbioturbation. Un processus qui consiste à réarranger les éléments contenus dans les sols. Améliorant la perméabilité à l'eau, mais également la fertilité de la couche arablearable.