Si les fourmis sont globe-trotteuses, les araignées sont également connues pour être de grandes voyageuses. Elles parcourent des centaines de kilomètres, traversent des étendues d'eau, et sont souvent les premières espèces à coloniser de nouveaux territoires.

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    Les scientifiques connaissent depuis longtemps un moyen de locomotion fort spécial dont les araignéesaraignées usent : à l'aide de leurs fils de soie, elles « sautent en parachuteparachute » et se laissent emporter par le ventvent. Mais les modèles développés jusque là n'expliquaient pas comment elles pouvaient couvrir de si grandes distances. Aujourd'hui, ce mystère est en passe d'être résolu...

    Deux araignées <em>Erigone</em> <br />Celle du bas, avec son abdomen tourné vers le haut et son fil de soie déployé, n'attend plus qu'une bourrasque pour prendre son envol !<br />(Crédits : Rothamsted Research)

    Deux araignées Erigone
    Celle du bas, avec son abdomen tourné vers le haut et son fil de soie déployé, n'attend plus qu'une bourrasque pour prendre son envol !
    (Crédits : Rothamsted Research)

    Des araignées adeptes du saut en parachute

    On connaît les araignées pour leur soie, plus résistante que l'acier et à haut coefficient d'absorption des oscillations. Il s'agit d'un matériau à « auto-mémoire de forme », qui n'a besoin d'aucun apport extérieur pour retrouver sa configuration initiale. La soie des araignées leur permet de tout faire, y compris de partir en voyage ! En effet, lorsqu'elles désirent voir du pays, ces petites créatures de quelques milligrammes grimpent sur un brin d'herbe, tendent leur abdomen vers le haut et laissent voleter un fil de soie dans les airsairs. La finesse de ce dernier fait qu'il subit une grande frictionfriction, se comporte comme un « parachute », et que, à la moindre bourrasque, l'araignée peut être emportée.

    Les chercheurs avaient déjà élaboré des modèles mathématiques pour estimer la distance que ces animaux pouvaient parcourir à l'aide de ces « parachutes ». Mais les simulations ne permettaient pas d'expliquer comment ils parcouraient des centaines de kilomètres et traversaient les mers pour atterrir sur des terres isolées, ni pourquoi on les retrouvait à de très hautes altitudes, allant même jusqu'à narguer les avions.

    Un nouveau modèle qui prend en compte la flexibilité des fils de soie

    Des chercheurs du Rothamsted Research ont souligné une faille dans ces modèles : ils ne prenaient pas en compte la flexibilité des fils de soie, mais les considéraient comme des lignes rigides et tendues, au bout desquelles les araignées étaient suspendues telles des parachutistes. Ils soulignent que cette hypothèse est correcte si l'on se place dans le cas d'un écoulement calme - dans ce cas les araignées ne volent que sur quelques mètres, mais qu'elle est erronée dès lors que l'on place les « voyageuses » dans un flux d'air turbulent.

    L'équipe a repris les équationséquations des modèles antérieurs en y intégrant la flexibilité des fils de soie, et traité ces derniers davantage comme des "yo-yo" que comme des lignes dont la longueur restait constante. Les résultats des simulations concordent avec ce que l'on observe dans la nature et suggèrent un point important : prises dans un écoulement turbulent, les araignées ne contrôlent ni où elles vont, ni la distance qu'elles parcourent. Ainsi, elles peuvent s'échouer en pleine mer comme sur la terre ferme !

    Parallèlement à ces travaux théoriques publiés dans la revue Biology Letters, les chercheurs sont actuellement en train de mesurer la flexibilité réelle des fils de soie, afin d'intégrer ces valeurs à leur modèle, et comptent placer des araignées en soufflerie, dans un flux turbulent, pour valider les calculs. En tout cas, par leurs prouesses aériennes, ces animaux n'ont pas fini de nous surprendre !