Trente ans après la catastrophe, l’analyse d’un échantillon de lait produit en Biélorussie, près de la zone d’exclusion, contenait dix fois la quantité de radiation acceptée. Ce lait servirait à la production de fromages commercialisés en Russie. Des résultats inquiétants mais à confirmer.

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    C'est une information inquiétante que révèle Associated Press pour le 30e anniversaire de la catastrophe de Tchernobyl : l'agence, qui a fait analyser du lait produit près de la zone d'exclusion, indique que l'échantillon testé est contaminé. Le 26 avril 1986, lors du pire accident nucléaire de l'Histoire, où 31 personnes sont décédées, 470 villes et villages biélorusses ont été évacués ; 138.000 Biélorusses habitant près de l'usine ont été relogés et 200.000 autres, qui vivaient à proximité, ont quitté volontairement les lieux. La zone d’exclusion est interdite aux humains. Mais autour, c'est une autre affaire...

    Le lait analysé provient d'une ferme appartenant à un fermier local, Nikolai Chubenok, en Biélorussie, à 45 km au nord du site de Tchernobyl. Cette ferme produit du lait depuis 2014 et fournit deux tonnes par jour à l'usine Milkavita, dont les produits sont distribués en Biélorussie et en Russie. La Russie représente le principal marché pour les exportations de produits alimentaires biélorusses.

    Un échantillon de ce lait a été testé par le centre d'hygiène et d'épidémiologie de Minsk, qui y a trouvé du strontiumstrontium 90 en quantité dix fois supérieure à la réglementation. D'après le ministère de l'AgricultureAgriculture biélorusse, les niveaux de strontium 90 ne devraient pas dépasser 3,7 becquerelsbecquerels par kilogrammekilogramme dans les aliments et les boissons. Or, d'après le laboratoire de Minsk, l'échantillon de lait contenait 37,5 becquerels.

    Le médecin Youri Bandajevsky est un opposant au gouvernement biélorusse qui dénonce les conséquences de Tchernobyl sur les populations. Son emprisonnement a suscité une mobilisation internationale. © Wikipedia, GFDL

    Le médecin Youri Bandajevsky est un opposant au gouvernement biélorusse qui dénonce les conséquences de Tchernobyl sur les populations. Son emprisonnement a suscité une mobilisation internationale. © Wikipedia, GFDL

    Des résultats qui demandent à être confirmés

    Comment ce lait peut-il être contaminé ? Probablement parce que les vaches ont brouté de l'herbe contenant une certaine radioactivité. Mais ces résultats peuvent susciter des interrogations car ils ne sont pas publiés dans une revue scientifique et ils ne concernent qu'un échantillon isolé. D'ailleurs, l'entreprise Milkavita se défend en affirmant réaliser des tests tous les six mois, lesquels indiqueraient des traces d'isotopesisotopes radioactifs bien en dessous des limites. Responsable technique de l'entreprise, Maia Fedonchuk affirme à Associated Press : « C'est impossible. Nous faisons nos propres tests. Il doit y avoir une confusion ».

    D'autres tests doivent donc confirmer ces résultats. Mais s'ils l'étaient, il faudra prendre des mesures pour que ce lait soit retiré de la consommation. De leur côté, les autorités biélorusses semblent déterminées à soutenir l'agriculture sur leur territoire.

    Un des opposants de cette politique est Youri Bandajevsky, un chercheur biélorusse, qui a mené des travaux controversés sur les conséquences de Tchernobyl sur la santé et a été condamné en 2001 à huit années de prison pour des motifs de corruption. Il a été libéré sous la pressionpression internationale en 2006. Pour lui, c'est une catastrophe : « En Biélorussie, il n'y a pas de protection de la population contre l'exposition aux rayonnements. Au contraire, le gouvernement tente de persuader les gens de ne pas prêter attention aux rayonnements, et la nourriture est cultivée dans des zones contaminées et envoyée à tous les points du pays ».