Environ la moitié des macaques préalablement vaccinés contre le VIS (l’équivalent simien du VIH) avant une infection ne présentaient plus aucune trace du pathogène trois ans plus tard. Une technique que les auteurs espèrent tester chez l’Homme d’ici deux ans contre le virus du Sida.

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    Après une trentaine d'années de lutte contre le VIH, le virus du Sida n'a pas encore été vaincu. Mais les efforts se concrétisent et certains vaccins chez les singes permettent d'en protéger la moitié. © A. Harrison et P. Feorino, CDC

    Après une trentaine d'années de lutte contre le VIH, le virus du Sida n'a pas encore été vaincu. Mais les efforts se concrétisent et certains vaccins chez les singes permettent d'en protéger la moitié. © A. Harrison et P. Feorino, CDC

    Découverte prometteuse présentée dans la revue Nature : des chercheurs états-uniens ont développé un vaccin contre le virus du Sida des singes (VISVIS) qui s'est révélé efficace pour 9 des 16 macaques testés. Chez eux, toute trace d'infection a disparu trois ans après la contamination. De bon augure avant d'éventuels essais chez l'Homme.

    Ce vaccin a été développé à partir d'un autre virus, le cytomégalovirus (CMV), membre très infectieux de la famille des herpèsvirus et qui se rencontre fréquemment dans la population humaine, bien que souvent inoffensif chez les individus en bonne santé. Le CMV a été génétiquement modifié pour exprimer les protéines présentées par une souche très agressive de VIS, la SIVmac239, qui tue généralement les singes dans les deux années suivant l'infection.

    Après inoculation, le vecteur vaccinal se répand dans tout l'organisme et infecte les cellules, qui présentent alors à leur surface les antigènes du VIS, que le système immunitaire s'empresse de reconnaître. Les défenses de l'organisme se mettent donc en alerte.

    Des macaques vaccinés contre le VIS, et d’autres non

    La souche pathogènepathogène a ensuite été injectée chez les macaques. Dans un premier temps, le VIS s'est propagé dans l'organisme. Mais chez la moitié des animaux, une réponse immunitaire nette est apparue. Peu à peu, le virus du Sida des singes a reculé. Un an et demi et trois ans après la contamination, les tests les plus sensibles n'ont pas détecté de traces du VIS chez les primatesprimates qui ont bien répondu au vaccin.

    Le VIH, ici en vert, descend d'une souche de VIS. Tous deux infestent et tuent de préférence les lymphocytes T CD4+, acteurs indispensables de l'immunité. Sauf si l’on inocule à l'organisme le bon vaccin... © C. Goldsmith <em>et al.</em>, CDC

    Le VIH, ici en vert, descend d'une souche de VIS. Tous deux infestent et tuent de préférence les lymphocytes T CD4+, acteurs indispensables de l'immunité. Sauf si l’on inocule à l'organisme le bon vaccin... © C. Goldsmith et al., CDC

    Les auteurs de ce travail notent la stimulationstimulation et le maintien dans le temps de lymphocyteslymphocytes T effecteurs à mémoire, capables de traquer et de détruire les cellules infectées par le virus au niveau de ses points d'entrée. Ils contribueraient fortement au succès de la vaccination, car stimulés en permanence par le CMV modifié.

    Louis Picker, chercheur à l'université de la Science et de la santé d’Oregon et ayant supervisé ce travail, ne parvient pas à expliquer le succès relatif de ce vaccin. Pourquoi 7 des 16 singes n'ont pas été protégés ? Il émet l'hypothèse que le VIS puisse être tellement pathogène qu'il se joue une lutte intense entre le virus et le système immunitairesystème immunitaire, qui est remportée environ une fois sur deux par les défenses de l'organisme. Cela reste à démontrer.

    Un vaccin à spectre assez large pour tous les variants du VIH ?

    La recherche démontre donc le potentiel d'un vecteur CMV en guise de vaccin contre le virus du SidaSida. Le concept pourrait être bientôt testé chez l'Homme. Les auteurs espèrent entamer les essais cliniques d'ici deux ans, quand ils auront montré que le virus génétiquement modifié ne représente aucun danger pour les cobayes. En parallèle, ils essaient de voir si ce vaccin prophylactique (préventif) pourrait également avoir un rôle thérapeutique chez des singes déjà infectés par le VIS.

    Bien qu'encourageante, cette annonce est à tempérer. Le VIH mute énormément, ce qui altère régulièrement la structure de ses protéines antigéniques et lui permet d'éviter la réponse immunitaire, et justifie un tel taux d'échecs. De nombreux vaccins prévoient d'utiliser des anticorps neutralisants à large spectre, et sont donc dotés d'une affinité pour de très nombreux variants viraux. Mais pour l'heure, cela ne suffit pas encore à préserver l'organisme en cas d'infection. Bien que la lutte contre le Sida progresse à grands pas, le VIHVIH nous concocte très probablement quelques mauvaises surprises qui retarderont l'échéance d'un traitement curatifcuratif ou préventif.