Une étude montre que le fer s’accumule dans les régions du cerveau d’abord concernées par la maladie d’Alzheimer, et qu’il serait au moins l’une des causes de la neurodégénérescence. Pour les auteurs, des facteurs environnementaux, comme la consommation régulière de viande rouge, riche en fer, pourraient contribuer au développement de la principale cause de démence.

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    Que sait-on réellement de la maladie d’Alzheimer ? D'abord que c'est l'un de nos adversaires les plus coriaces. Le principal facteur de risque est le vieillissement, contre lequel nos moyens de préventionprévention et de lutte sont limités dans le temps. On associe également la principale neurodégénérescence mondiale à l'accumulation de deux protéines dans et entre les neurones : les bêta-amyloïdesbêta-amyloïdes et la protéine Tau. Sont-elles la cause ou la conséquence de la démence ? Le mystère n'est pas vraiment résolu.

    Si des gènes augmentent les risques ou, au contraire, protègent de ce trouble neurologique, le rôle de l'environnement reste encore peu clair. Pourtant, des chercheurs états-uniens de l'université de Californie à Los Angeles (UCLA) suspectent notamment l'alimentation d'être l'une des causes facilitant le développement de la maladie d'Alzheimermaladie d'Alzheimer. Car le ferfer, contenu en grande quantité dans certains aliments (la viande rouge en tête), pourrait contribuer au développement de la maladie. C'est du moins ce que suggère leur recherche, publiée dans le Journal of Alzheimer’s Disease.

    Du fer plein l’hippocampe

    En tout, 99 personnes âgées ont été mises à contribution. En tout, 31 présentaient la démence, tandis que les 68 restantes, du même âge, faisaient office de contrôle. Toutes ont eu à passer une IRMIRM sophistiquée, combinant des champs magnétiqueschamps magnétiques faibles et forts, afin de détecter la présence de ferritine, protéine chargée de transporter le fer, dans deux régions du cerveaucerveau. La première (l'hippocampehippocampe) joue un rôle clé dans la mémoire et dégénère très vite dans la maladie d'Alzheimer. La seconde (le thalamusthalamus) est affectée par la pathologiepathologie seulement dans ses phases terminales.

    Les résultats montrent que le fer s'est accumulé uniquement dans l'hippocampe des malades, et qu'en plus sa présence est associée à des dommages tissulaires dans les régions concernées. Aucune observation de ce type n'a été retrouvée chez les seniors en bonne santé ni dans aucun thalamus. Les auteurs soulignent donc le rôle que pourrait jouer le métal dans l'occurrence de la démence.

    Au centre du cerveau, on trouve l'hippocampe, structure cérébrale dont la forme n'est pas sans rappeler le poisson du même nom. Cette région semble accumuler le fer, événement associé à la maladie d'Alzheimer. Y a-t-il vraiment un lien direct entre les deux ? © Heidi Cartwright, Flickr, cc by nc nd 2.0

    Au centre du cerveau, on trouve l'hippocampe, structure cérébrale dont la forme n'est pas sans rappeler le poisson du même nom. Cette région semble accumuler le fer, événement associé à la maladie d'Alzheimer. Y a-t-il vraiment un lien direct entre les deux ? © Heidi Cartwright, Flickr, cc by nc nd 2.0

    En effet, bien qu'essentiel au bon fonctionnement des cellules, le fer est nocif lorsqu'il est présent en trop forte quantité, en favorisant la formation de radicaux libresradicaux libres, capables d'endommager les tissus par leur haute réactivité. Le cerveau pourrait y être très sensible, et l'accumulation du métal dans la matièrematière grise engendrerait des maladies neurodégénérativesmaladies neurodégénératives, dont Alzheimer.

    La maladie d’Alzheimer causée par une défaillance en myéline

    L'hypothèse de George Bartzokis, l'un des auteurs de ce travail, est la suivante. D'abord, la neurodégénérescence se caractérise par la perte progressive de la gaine de myélinegaine de myéline autour des neurones. Ce tissu gras, qui entoure les axonesaxones des neurones, joue le rôle d'isolant et permet au message nerveux de mieux circuler. Lorsqu'il est abîmé, la communication est altérée, et peuvent alors se former les plaques séniles riches en bêta-amyloïdes. Celles-ci contribuent à détruire davantage de myéline, ce qui détériore encore la qualité du message. Finalement, les neurones dépérissent.

    Tout partirait donc de la myéline. Celle-ci est synthétisée par des cellules cérébrales appelées oligodendrocytes. Or, ce sont ces cellules qui présentent les taux les plus élevés en fer, et qui pourraient donc être les premières à succomber du fait de l'excédent.

    Les métaux, sources de neurodégénérescence ?

    Ainsi, une telle accumulation de fer pourrait s'expliquer par des facteurs environnementaux. Parmi les pistes envisagées par les auteurs : la consommation de viande rouge, puisqu'elle doit sa couleurcouleur à la présence du métal lié à l'oxygène. La prise de compléments alimentaires riches en fer ou une hystérectomiehystérectomie (ablationablation de l'utérusutérus) pratiquée avant la ménopauseménopause pourraient également y contribuer.

    Ces scientifiques ne sont pas les seuls à suivre avec intérêt la piste des métauxmétaux dans l'origine de la maladie d'Alzheimer. D'autres ont précédemment montré que réduire l'excédent de fer chez des souris atteintes d'une neurodégénérescence équivalente à Alzheimer réduisait les symptômessymptômes liés à la maladie. Ou bien encore une autre étude, publiée cette année, qui met en avant que les prions à l'origine de la maladie de Creutzfeld-Jakob touchaient les protéines qui interviennent dans la régulation du fer, et que c'est un dérèglement à ce niveau qui conduit à la mort des neurones. Notre cerveau pourrait donc se révéler sensible aux métaux ingurgités tout au long de notre vie.