Des rats adolescents soumis à de fortes quantités d’alcool dans des pratiques imitant le binge drinking deviennent plus portés sur la boisson que leurs congénères une fois adultes. De plus, du fait des effets neurologiques de l’alcool, ils portent des séquelles dans le cerveau à long terme. Des résultats extrapolables à l’Homme ?

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    L'addiction à l’alcool concerne environ cinq millions de Français. Il est aujourd'hui très préoccupant de constater que la consommation d'alcoolalcool se banalise de plus en plus chez les plus jeunes, développant des pratiques dangereuses telles que le binge drinking (boire massivement et très rapidement). 

    Dans le cadre du projet européen AlcoBinge coordonné par l'équipe de Mickaël Naassila (université de Picardie Jules Verne, Inserm), les chercheurs ont exploré chez le rat les effets à long terme des intoxications alcooliques répétées au cours de l'adolescence (vers 30 à 40 jours après sa naissance) sur la prédisposition et la motivation à consommer de l'alcool pouvant créer une addiction à l'âge adulte.  

    Les résultats publiés dans la revue Neuropharmacology montrent que les intoxications répétées à l'adolescence, alors que le cerveau n'a pas fini sa maturation, entraînent une perte de contrôle de la consommation d'alcool à l'âge adulte, et provoquent des modifications neurologiques à long terme.

    Chez les adolescents, l'alcool est d'abord bu dans des situations festives. C'est le cadre du <em>binge drinking</em>. De ces habitudes naissent parfois plus tardivement des pratiques addictives issues de cette consommation adolescente. © The Suss Man, Flickr, cc by nc nd 2.0

    Chez les adolescents, l'alcool est d'abord bu dans des situations festives. C'est le cadre du binge drinking. De ces habitudes naissent parfois plus tardivement des pratiques addictives issues de cette consommation adolescente. © The Suss Man, Flickr, cc by nc nd 2.0

    Des rats qui deviennent portés sur la boisson

    D'un point de vue comportemental, l'étude dirigée par Mickaël Naassila démontre que les rats adultes exposés à des ivresses alcooliques tôt dans l'adolescence sont plus vulnérables à l'alcool, perdant le contrôle de leur consommation. En effet, ces derniers sont moins sensibles aux propriétés aversives et spécifiques du liquideliquide

    Toujours d'un point de vue comportemental, les chercheurs de l'Inserm ont étudié la motivation des rats adultes à consommer de l'alcool. Les chercheurs ont montré, pour la première fois et après plusieurs expériences sur la récompense, que les rats adultes ayant été exposés précocement à l'alcool faisaient preuve d'une motivation excessive pour obtenir l'élixirélixir

    Conséquences à long terme sur le cerveau

    D'un point de vue neurologique, l'intoxication alcoolique répétée au cours de l'adolescence provoque également des modifications dans le cerveau. Les chercheurs ont démontré qu'une sous-région bien précise du noyau accumbensnoyau accumbens (zone cérébrale qui joue un rôle primordial dans le comportement addictif) est moins réactive, à long terme, à une nouvelle exposition à l'alcool. Ce qui pourrait expliquer la plus grande vulnérabilité des rats face à la boisson.

    Bien que menées chez le rat, ces expériences confirment que les intoxications alcooliques répétées à l'adolescence (qui miment le binge drinking) rendent les sujets adultes plus vulnérables à l'alcool et induisent des neuroadaptations à long terme.