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    La garancegarance appartient à la vaste famille des Rubiacées (la famille du café, du quinquina, de l'ipéca et du gardénia par exemple).

    Boutons de la plante <em>Rubia peregrina</em>. © Thongchai-tjn, Shutterstock

    Boutons de la plante Rubia peregrina. © Thongchai-tjn, Shutterstock

    Famille : Rubiaceae
    Genre : Rubia
    EspèceEspèce : Rubia peregrina L.

    La plante <em>Rubia peregrina.</em>

    La plante Rubia peregrina.

    Garance : la plante, ses fleurs, ses fruits et ses racines

    - Plante herbeuse, vivace, pourvue d'un rhizomesrhizomes épais, elle donne naissance à des tiges annuellesannuelles, couvertes de feuilles verticillées, oblongues lancéolées, fortement denticulées, légèrement épineuses sur les bords.
    - Les fleurs, d'un blanc jaunâtre, sont disposées en cymes composées, axillaires et terminales.
    - Les fruits sont des baies noires, de la grosseur d'un pois.
    - Les racines contiennent la matière colorante rouge, qu'on a baptisée l'alizarine.
    - Habitat : terres en friche, taillistaillis.
    - Floraison : mai à juillet.

    En herboristerie, la garance est connue pour être cholagogue, antilithiasique, emménagogue, apéritive, astringente, diurétiquediurétique, laxative.

    Garance feuille © Wikipedia

    Garance feuille © Wikipedia

    Pour souligner son importance voici quelques mots tirés d'un Petit Robert de 1979 :

    Alizari n. m. (1827; mot gréco-turc, probabl. arab al-usâra "jus, extrait"). Racine de la garance.
    Alizarine n. f. (1839; de alizari). Matière colorante d'un beau rouge, extraite autrefois des racines de garance, aujourd'hui obtenue par synthèse.
    Garançage n. m. (1671; de garance). Techn. Action de teindre à la garance.
    Garance n. f. (XIe; lat. médiév. warantia, frq. °wratja).
    1°) Plante herbacée (Rubiacées) des régions chaudes et tempérées, dont la racine rougeâtre (V. Alizari) fournit une matière colorante rouge (V. Alizarine, purpurine).
    2°) Teinture tirée de cette plante. Appos. Couleur de cette teinture, rouge vif. Les pantalons garance de l'ancienne infanterie de ligne.
    Par un glissement classique du w/v vers le g, warantia devint "garantia", et enfin "garance", en français. C'est l'origine des mots garant, garantie, parce que le prix de la garance était fixé et contrôlé par l'Etat.
    - Garancer v. tr.; conjug. placer (XIVe; de garance). Techn. Teindre avec la garance.
    - Garancerie n. f. (1872; de garance). Techn. Lieu où l'on opère le garançage des étoffes.
    - Garanceur n. m. (1671; de garance). Techn. Ouvrier qui fait le garançage.
    - Garancière n. f. (XVIe; de garance). Vx. Champ semé de garance.
    - Purpurine n. f. (1839; "poudre de bronze", 1731; de purpurin). Chim., Techn. Une des matières colorantes extraites de la garance.

    Couleur garance

    Couleur garance

    Garance : fabrication du colorant à partir de la racine

    - Ces substances chromatiques se fixent en dessous de l'écorce, dans l'aubier. S'il restait beaucoup d'écorce après le blutage, la garance était dite "robée" (mauvaise). A l'inverse, elle était "non robée".
    - Les racines (même les fanes ?) contiennent d'autres colorants : la xanthopurpurine, jaune orangé, la rubiadine, rouge etc. - Solubles dans l'eau, ces colorants ont colorent en rouge les os des animaux ou des hommes qui les mangent.
    - La racine de garance contient d'autant plus de colorants différents qu'elle est âgée, jusqu'à 19 colorants. La racine âgée d'un an n'en contient que quatre. Mais tous sont construits sur la molécule d'anthraquinone.
    - L'anthraquinone (c'est le composé laxatif !) est une molécule composée de 14 atomes de carbonecarbone, arrangés en hexagone, très semblable à l'alizarine.

    Image du site Futura Sciences
    Formule de l’anthraquinone

    - L'alizarine est le principal colorant de la racine de garance et a pratiquement la même formule à deux ou trois groupes OH près.

    Formule de l’alizarine

    Formule de l’alizarine

    - La purpurine, deuxième colorant en importance dans la racine de garance a aussi une formule semblable. La purpurine est d'avantage rouge que l'alizarine, mais elle a le défaut de moins bien résister à la lumièrelumière.

    Ces colorants sont présents sous forme libre ou sous forme de glycoside.

    La racine fraîche est impropre pour la teinture comme pour la préparation de pigmentspigments. Il faut la sécher, puis la battre pour en détacher la terre et enfin la rober. Le robage consiste à écraser la racine sèche pour en détacher les radicellesradicelles, les parties d'écorce inutiles, et pour la broyer grossièrement.

    Il va encore falloir hydrolyser les glycosides soit séparer le colorant du sucresucre en « démontant » le glycoside. Au contraire d'une teinture naturelle, la garance ne se mêlait aux fibres qu'avec du calcairecalcaire et un mordant, souvent l'alunalun. Les premières recettes précises datent du XVIIIe siècle.

    La garance dans l'histoire

    La garance est attestée depuis quatre millénaires en Inde, en Perse ou en Egypte. Dioscoride la mentionne et Pline (Hist. Nat.livre XIX, 17) utilise un de ses noms latins : Rubia (rouge). Les Gaulois, eux, la mélangeaient avec le bleu du pastel pour un beau violet.

    Les Carolingiens utilisent le terme warentia, mot apparenté au francique warjan, wratja, wraihja (goth), du verbe wreihan, protéger. De ce rouge, les peintres firent une belle laque et naguère, le mélangeaient à l'aluminealumine pour obtenir du rose. L'huile de linlin de grains à fibre pressée à froid convient au broyage de la laque de garance. Cette huile donne un film souple et dur, et convient bien au polissage.

    En 1860, le Vaucluse produit près de la moitié de la production mondiale de garance ! L'autre partie de l'actuelle France productrice de garance est l'Alsace. Hélas, la production s'effondre lors de la synthèse, en 1869, de l'alizarine, le principe ayant été découvert en 1826/1827, par Pierre Robiquet (1780-1840).

    Robiquet (Pierre), chimiste, né à RennesRennes en 1780, fut successivement attaché au service de la marine et des armées, devint professeur à l'école de pharmacie, puis administrateur de cet établissement où il introduisit de grandes améliorations, et fut admis en 1833 à l'Institut. Il découvrit plusieurs principes chimiques importants : l'asparagineasparagine (1805), la cantharidine (1810), la caféinecaféine (1821), l'alizarine et la purpurine, principes colorants de la garance (1826, 1827), l'orcine et le variolarin (1829), l'amygdaline (1830), la codéine et l'acideacide méconique (1834), et se distingua à la fois par la hardiesse le l'esprit, l'habileté de l'expérimentation et la fidélité des observations. On lui doit de précieux mémoires, dans les Annates de physiquephysique et de chimiechimie, le Journal de pharmacie, et le Recueil des savants étrangers.(Dictionnaire biographique ImagoImago mundi)

    Le caractère protecteur de la garance antique est peut-être dû au fait que le rouge est couleur du pouvoir, du roi, de l'armée, qui est chargée de défendre un pays.

    C'est de drap garance aussi que, sous l'ancien régime, étaient revêtus les trois régiments irlandais, et les onze régiments suisses de ligne au service de France, alors que le régiment des gardes suisses, approchant le roi, portait un uniforme écarlate, plus coûteux.

    Napoléon eut quatre régiments suisses vêtus de garance qui, en 1812, allèrent joncher les rives de la Bérézina.

    La Restauration, enfin, reprit l'ancienne tradition : le teint garance distinguait les quatre régiments suisses de ligne, et le rouge écarlate les deux régiments suisses de garde.

    Avant de caractériser le pantalon militaire français, le rouge garance a donc été une marque distinctive des Suisses. Supprimés en France en 1830, les « Suisses rouges » subsistèrent au service des Bourbons de Naples jusqu'en 1859. Mais là, leur uniforme était rouge écarlate, et non garance. Notons aussi que l'armée française utilisait encore l'alizarine au début de la première guerre mondiale (1914-1918) pour teindre les pantalons et les képis de ses uniformes....

    L'uniforme de la guerre de 1914

    L'uniforme de la guerre de 1914

    Aujourd'hui il s'en vend encore, sous forme de racines séchées, dans les bazars de villages reculés de l'Afghanistan, par exemple (renseignements extraitS de l'article : La garance de Walter Zurbuchen, Revue du Vieux Genève nº 5, 1975).

    Les associations : la Garance voyageuse et Couleur garance

    Pour terminer citons deux associations qui s'occupent de plantes... et qui portent le nom de garance...qui, en plus, cherchent à faire connaître notre patrimoine botaniquebotanique oublié de nos autorités, il faut bien le dire haut et fort !

    • La Garance voyageuse (1901) a pour buts :

    - d'étudier, d'informer et sensibiliser le public vis à vis du monde végétal
    - de protéger les plantes et leurs biotopesbiotopes par toutes les procédures légales.
    - de coopérer, conseiller et participer à la mise en place de modèles d'aménagements écologiques.
    - d'entreprendre toutes études, recherches ou démarches relatives aux objectifs.
    La revue c'est : parler des plantes avec des mots simples : http://www.garancevoyageuse.org/

    • Couleur garance (1901)

    Ses objectifs sont de :
    - contribuer au développement des couleurs végétales ;
    - partager des connaissances de ce domaine.

    Afin d'atteindre ses objectifs, l'association crée et anime le Jardin Conservatoire consacré aux plantes tinctoriales et le Centre de ressources de la couleur végétale, en plein développement. http://www.couleurgarance.com/.