Le Japon a trouvé une nouvelle source d’énergie pour recouvrer son indépendance : les hydrates de méthane. Ce carburant fossile repose notamment dans des sédiments marins à de grandes profondeurs. Il vient pour la première fois d’être extrait avec succès à partir d’un navire de forage.  

au sommaire


    Le gouvernement japonais a fait stopper la plupart des centrales nucléaires présentes sur son territoire, à la suite de la catastrophe de Fukushima. La production d'électricité à partir d'énergie fossile a par conséquent connu un nouvel essor, ce qui a mené le pays dans une situation économique que certains qualifient d'intenable. Le Japon doit en effet importer 95 % du gazgaz qu'il consomme, car il ne dispose pas de réserves conventionnelles.

    Ce détail a toute son importance. En effet, des prospections sismiques et des forages exploratoires ont souligné la présence d'environ 1.100 milliards de m3 de méthane au large de la côte est du pays, soit de quoi subvenir aux besoins énergétiques de la société japonaise durant 11 ans. Il ne faut cependant pas crier victoire pour autant, car le combustiblecombustible se présente sous forme d'hydrates de méthane, également appelés « glace qui brûle » ou « glace de méthane ».

    La particularité de ce méthane est d'être enfermé dans des cages faites de moléculesmolécules d'eau organisées en réseau cristallin, où il est soumis à de hautes pressionspressions et de basses températures. Bien que cette glace atypique soit connue depuis plus de deux siècles, aucune méthode ne permettait jusqu'ici de l'exploiter au sein même des sédiments marins profonds dans lesquels elle reposait. Or, la Japan Oil, Gas and Metals National Corporation (Jogmec) vient de réussir ce 12 mars 2013 à extraire du méthane de manière satisfaisante, durant un essai mené au large des péninsules d'Atsumi et de Shima.

    Le <em>Chikyu</em> est un navire de recherche japonais inauguré en 2002. Il peut théoriquement forer jusqu'à sept kilomètres de profondeur dans le plancher océanique. © Gleam, Wikimedia Commons, cc by sa 3.0

    Le Chikyu est un navire de recherche japonais inauguré en 2002. Il peut théoriquement forer jusqu'à sept kilomètres de profondeur dans le plancher océanique. © Gleam, Wikimedia Commons, cc by sa 3.0

    Indépendance énergétique fournie par les fonds marins

    Sept années d'explorations (de 2001 à 2008) et quatre années de recherches (de 2009 à ce jour) ont été requises pour localiser les sources d'hydrates de méthane exploitables et développer la technologie requise pour leur extraction. Sur site, trois forages ont été réalisés par le navire de recherche Chikyu en février et mars 2012. Seul un puits est destiné à l'extraction du combustible, les deux autres étant prévus pour la surveillance des opérations. Le puits principal a été foré par 1.000 m de fond et a atteint une profondeur de 330 m. 

    Diverses approches ont été envisagées pour extraire le gaz, mais seule l'une d'entre elles a été retenue à la suite de tests menés au Canada en 2001 et 2008 : la dépressurisation. Cette technique consiste à faire chuter la pression au sein des sédiments pour libérer le méthane. L'expérience, dont les préparatifs ont débuté le 28 janvier, devrait se poursuivre durant encore deux semaines. Le Chikyu est ensuite attendu au port de Shimizu le 26 mars. Plusieurs aspects de l'extraction suscitent une vigilance particulière : la dissociation du méthane sous l'eau, la régularité du flux et l'impact environnemental. Précisons enfin que le gaz produit est directement brûlé en surface par le biais d'une torchère installée sur le navire de forage.

    Les hydrates de méthane pourraient donc offrir une nouvelle indépendance énergétique au Japon, mais à quel prix ? Ces hydrocarbures non conventionnels sont par définition d'origine fossile, et l'on peut d'ores et déjà redouter la survenue de fuites durant leur exploitation industrielle ou leur consommation massive. En effet, le méthane et le CO2 issu de sa combustioncombustion sont d'importants gaz à effet de serre. Voilà de quoi lancer un nouveau débat, à l'image de celui qui oppose les partisans et les détracteurs du gaz de schiste. Quoi qu'il en soit, un second essai est prévu courant 2014 ou 2015. Si tout se passe bien, une plateforme d'extraction sera développée entre 2016 et 2018.