Interrogée par Futura-Sciences – dont elle est la marraine –, Isabelle Autissier nous explique pourquoi elle a voulu être la nouvelle présidente de WWF France. La biodiversité et la protection des milieux côtiers seront sa priorité. Copenhague ? « Un désastre ».

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    Navigatrice du grand large, femme de mer, écrivain, ingénieure agronome, chroniqueuse à la radio, Isabelle Autissier a de multiples étiquettes. Récemment, on l'a vue à la vice-présidence du Grenelle de la mer et elle figure au sein du Conseil consultatif des TAAF, les Terres australes et antarctiques françaises. On repère son nom également à la Fondation de France et à la Fédération internationale des ligues des droits de l'homme et parmi les parrains de Futura-Sciences.

    Elle vient d'ajouter une nouvelle casquette à sa collection en devenant présidente de la branche française du WWF, le World Wide Fund, une ONG internationale qu'on ne présente plus.

    Celle qui est devenue en 1991 la première femme à boucler un tour du monde en solitaire à la voile est avant tout une femme d'action et d'engagement. Comme on le voit dans cet entretien qu'elle a accordé à Futura-Sciences, son guide est d'abord la passion de la nature en général et de l'océan en particulier, avec une préférence marquée pour le grand sud. D'ailleurs, à peine nommée au WWF France, elle repart vers l'Antarctique, pour y entraîner des alpinistes dans une expédition « qui ne laissera aucune trace ». Bon vent !

    Le panda du WWF a élu Isabelle Autissier. © WWF

    Le panda du WWF a élu Isabelle Autissier. © WWF

    Futura-Sciences : Comment devient-on présidente du WWF France ?

    Isabelle AutissierIsabelle Autissier : Voilà deux ans que je fais partie du conseil d'administration. Et j'ai présenté ma candidature à la présidence car la définition des tâches à accomplir me convenait bien.

    FS : Vous verra-t-on dans les médias en tant que présidente ?

    Isabelle Autissier : Oui, cela fait partie des attributions. Je mouillerai ma chemise... Mais je ne serai pas la seule. D'ailleurs, je n'y tiens pas. C'est un travail d'équipe.

    FS : 2010 sera l'année de la biodiversité. Le WWF France mettra-t-il l'accent sur cette question ?

    Isabelle Autissier : Bien sûr. La biodiversité est un thème central au WWF. C'est même son quotidien. Je pense que le plus gros du travail à faire est d'expliquer cette notion. La biodiversité, c'est compliqué. Il faut faire comprendre que cette question est à prendre dans sa globalité. Nous devons dire que la disparition d'espècesespèces est un phénomène important, pour l'environnement mais aussi pour l'homme. Il faut expliquer par exemple que la protection des espèces est d'abord celle des milieux, menacés par la pollution, l'accaparement des espaces, etc. Nous devons arrêter de les dégrader.

    FS : Quels seront vos priorités à la tête de la partie française ?

    Isabelle Autissier : En France, un des problèmes les plus importants est celui de l'eau et, notamment, des pesticidespesticides, pour lesquels le pays est champion du monde. Les estuairesestuaires et les lagunes sont très menacés. On l'a vu en Bretagne, l'accumulation d'algues sur les côtes, à cause des nitrates déversées en mer, c'est un problème sérieux, et même de santé publique.
    Nos actions iront dans deux directions, la protestation mais aussi les explications. Nous devons aller vers une agriculture raisonnéeagriculture raisonnée, vraiment raisonnée, qui sera sans danger pour l'environnement et qui fera vivre l'agriculteur.

    FS : Comment jugez-vous la conférence de Copenhague ?

    Isabelle Autissier : C'est un désastre. Quelques mois auparavant, on a senti les prémices de cet échec. Les Etats ne sont pas arrivés avec des propositions construites. On fustige les Etats-Unis et la Chine mais l'Europe n'a pas eu une attitude encourageante. C'est inutile de rejeter la faute sur l'un ou sur l'autre. La conclusion, c'est que l'on perd un temps énorme. La réduction du réchauffement est une affaire complexe et longue. Si on veut réduire l'augmentation de température à 2°C avant la fin du siècle, comme le souhaitent les scientifiques, ce n'est pas en se réveillant en 2099 qu'on réussira. Une maison, une usine, c'est construit pour trente ans...

    FS : Dans les prochains jours, vous ne serez pas dans les bureaux du WWF puisque vous partez en expédition. Où irez-vous ?

    Isabelle Autissier : Ma vie, c'est de faire du bateau... Mon métier, c'est de naviguer. Nous partons en Antarctique pour une expédition très sud, avec trois marins et trois alpinistes. C'est une expédition mer-montagne... Ces deux domaines sont très complémentaires. Nous partons à la découverte de la nature et nous montrons en même temps qu'on peut faire beaucoup de choses dans la nature sans laisser aucune trace !