L’Australie est le plus petit continent au monde mais joue pourtant un rôle essentiel dans le climat. En 2011, l’île a été majoritairement responsable du retrait des mers. À l’échelle mondiale, le niveau des océans a diminué de 7 mm du fait de la combinaison de trois événements atmosphériques en action sur l’Australie.

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    Les glaciers et calottes polaires se retirent, l'océan se réchauffe donc se dilate. Une combinaison responsable d'une augmentation moyenne de 3 mm par an du niveau des mers. Le problème est grave, car dans certaines régions du monde, cette hausse est de l'ordre de 15 cm : les littoraux se retrouvent submergés et les roches s'érodent. Pourtant, étrangement, au cours de l'année 2010-2011, le niveau moyen de la mer a cessé d'augmenter, et a même diminué de 7 mm. Si aujourd'hui les océans ont repris leur ascension des côtes, ce phénomène tout à fait inhabituel a fait l'objet de nombreuses recherches.

    Pareil recul des mers a d'abord été attribué aux conditions La Niña particulièrement intenses que la Terre a connues à cette période. Durant un événement La NiñaLa Niña, la ceinture tropicale de l'océan Pacifique est plus froide, et l'atmosphère apporte plus de précipitations que la moyenne en Amérique du Sud, en Australie et dans le sud de l'Asie. Néanmoins, dans l'histoire, jamais un événement La Niña aussi fort n'avait provoqué, à lui seul, un tel recul des mers. Une équipe du National Center for Atmospheric Research (NCAR) suggère dans une nouvelle étude parue dans les Geophysical Research Letters que l'Australie, plus petit continent du monde, est en grande partie responsable du recul des mers.

     <br />Le projet satellite Grace (<em>Gravity Recovery and Climate Experiment</em>) a permis d’élaborer cette carte, qui donne les variations de la masse de l’Australie entre juin 2010 et février 2011. Les zones en vert et bleu représentent les plus fortes augmentations de la masse, provoquées par des précipitations excessives. Les courbes de niveau indiquent différentes élévations de la surface terrestre. © NCAR, Nasa, JPL
     
    Le projet satellite Grace (Gravity Recovery and Climate Experiment) a permis d’élaborer cette carte, qui donne les variations de la masse de l’Australie entre juin 2010 et février 2011. Les zones en vert et bleu représentent les plus fortes augmentations de la masse, provoquées par des précipitations excessives. Les courbes de niveau indiquent différentes élévations de la surface terrestre. © NCAR, Nasa, JPL

    En conditions normalesconditions normales, le Pacifique tropical est plus chaud à l'ouest qu'à l'est, et génère une zone de convection atmosphérique dans l'ouest de la ceinture tropicale. Cette dernière apporte humidité et précipitations dans toute la région. En 2010-2011 et durant 18 mois, la très forte La Niña a modifié cette configuration, la zone d'humidité s'est déplacée plus à l'ouest, et la circulation atmosphérique mondiale s'est vue perturbée. La Niña a apporté plus de précipitations que la moyenne dans le nord de l'Amérique du Sud, en Australie et dans le sud-est de l'Asie.

    L’outback d’Australie était sous les eaux

    Néanmoins, les pluies extraordinaires survenues en Australie sont plutôt des conséquences de la modification de la circulation générale, que de La Niña directement. Il a plu au total 300 mm de plus que la moyenne, et cela résulte de la modification de trois composantes atmosphériques. D'après l'article, l'humidité, déplacée vers l'ouest dans le Pacifique durant La Niña a été prise dans la circulation australe et a influé sur le Southern Annular Mode (SAM). Le SAM caractérise les variations des centres d'action atmosphériques entre les moyennes et les hautes latitudeslatitudes. Dans sa phase positive, le SAM est associé à de plus hautes pressionspressions que la normale aux moyennes latitudes, et de plus basses pressions aux hautes latitudes (55° S à 70° S).

    En 2011, cette circulation a apporté l'humidité dans le centre de l'Australie, et a donc amplifié le régime de précipitations. Par la suite, des niveaux élevés d'humidité de l'océan Indien dus au mode de variabilité climatique propre à ce bassin (Indian Ocean Dipole) ont rencontré l'humidité provenant de La Niña, ce qui a renforcé de plus belle le taux d'humidité dans l'intérieur du continent.

    Le centre de l'Australie, dit l'outback, est vaste et entouré par des montagnes côtières. La basse altitude de cette zone et l'absence de ruissellement de rivières à l'ouest, ont fait que la plupart des fortes pluies de 2010-2011 sont restées intérieures et se sont donc moins jetées dans les océans. Bien que de l'eau se soit évaporée dans le désert, une grande partie a coulé dans le sol sec et granulairegranulaire du plateau occidental, ou a rempli le bassin du lac Eyre dans l'est.

    La hausse du niveau de la mer s’est accélérée

    « Il n'y qu'en Australie que l'atmosphère peut transporter ces fortes pluies tropicales sur une aussi grande superficie, sans qu'elles n'arrivent à se frayer un chemin vers l'océan », commente John Fasullo, auteur principal de la publication. Grâce à la conjonctionconjonction d'événements atmosphériques et à sa géographie, ce petit continent a réussi, à lui seul à faire reculer les mers de façon historique.

    Aujourd'hui, les schémas atmosphériques ont repris leurs structures moyennes, et le niveau de la mer a recommencé à grimper. Il semble que la montée des eaux se soit même accélérée. D'après le NCAR, les mers montent de 10 mm par an ! L'avancée est énorme, car il faut garder en tête qu'il s'agit d'une moyenne globale, traduisant que dans certaines régions les océans montent beaucoup plus que dans d'autres.