En observant la coordination des mâles et femelles troglodytes lorsqu'ils effectuent des chants, des chercheurs se sont aperçus que ces duos étaient le fruit d'une étroite collaboration. Pour y parvenir, ces fins chanteurs apprennent l'ensemble de l'œuvre et non pas uniquement leur partition.

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    Les troglodytes chantent en couple de façon si bien synchronisée qu'on a l'impression qu'il n'y a qu'un seul oiseau © Carlos Rodriguez

    Les troglodytes chantent en couple de façon si bien synchronisée qu'on a l'impression qu'il n'y a qu'un seul oiseau © Carlos Rodriguez

    • Majestueux et colorés, admirez les oiseaux en photo 

    Les troglodytes maculés (Pheugopedius euophrys) sont des oiseaux appartenant à l'ordre des passeriformes et vivant en Amérique du Sud, particulièrement en Équateur. Ils sont reconnus pour être de très fins chanteurs, que ce soit individuellement, ou en couple, avec leur partenaire. Une étude montre que les duos sont le fruit d'une collaboration et d'un apprentissage unique, que l'on peut comparer à une danse chez les humains.

    Les recherches, détaillées dans Science, portent sur les mécanismes impliqués dans la coopération. Il est admis que les troglodytes chantent en duo afin de préserver leur territoire. Le but est de savoir si ce duo correspond à un réel effort pour ces oiseaux, ce qui serait la preuve d'une coopération réalisée à des fins bien précises.

    Mille chants analysés !

    Pour s'en rendre compte, les chercheurs, emmenés par Eric Fortune de l'université John Hopkins, ont analysé plus de mille chants de ces oiseaux. Certains effectués par des femelles, d'autres par des mâles, mais également des duos. Lors de ces derniers, une femelle et un mâle alternent rapidement les sons, de façon si fluide qu'il est impossible de savoir, à l'oreille, s'il s'agit ou non d'un duo.


    Le mâle et la femelle chantent en duo et donnent l'impression qu'un seul oiseau chante. À 7" environ, le mâle manque une mesure et récupère ensuite, ce qui montre que c'est bien la femelle qui joue le rôle de chef d'orchestre.

    Ces observations montrent que les chants effectués seuls et ceux effectués en couple diffèrent légèrement (quelques millisecondes) au niveau du timing, ce qui traduit déjà d'un réel effort : le duo n'est pas une simple superposition des chants individuels mais bien le fruit d'une coopération entre les deux interprètes.

    La femelle chef d'orchestre

    En outre, les analyses ont montré que c'est la femelle qui joue le rôle de chef d'orchestre. En effet, il arrive parfois que le mâle manque son tour au cours d'un chant. Mais cela n'empêche pas la femelle de continuer sa partitionpartition et le mâle reprend ensuite la sienne à la mesure suivante.

    Toutefois, ce qui intéressait surtout les scientifiques, c'est ce qu'il se passe dans le cerveaucerveau de ces troglodytes au moment où ils chantent. Pour cela, ils ont inséré des électrodesélectrodes dans le crânecrâne de trois couples d'oiseaux qu'ils avaient préalablement mis en captivité. Ils ont comparé les réponses à trois stimuli différents : le chant d'un mâle, celui d'une femelle et un duo.

    Comme un tango

    D'abord, les réactions étaient légèrement plus fortes à l'écoute des chants produits par une femelle, ce qui confirme que c'est bien celle-ci qui joue le rôle de chef d'orchestre. Mais plus surprenant, la réaction était beaucoup plus forte à l'écoute d'un chant interprété par un couple. Pour les auteurs de l'expérience, ceci constitue une preuve formelle que les troglodytes coopèrent et qu'ils écoutent le chant de leur partenaire avec attention afin d'ajuster le leur.

    Les auteurs comparent cela à deux humains qui dansent le tango. On aurait pu supposer que chacun des danseurs apprendrait sa partie, mais les résultats montrent en fait que le cerveau mémorise l'ensemble de la chorégraphie.

    De la danse au chant, en passant par le théâtre et la musique, il vaut mieux connaître l'ensemble de l'œuvre pour bien jouer !