On a bien retrouvé la tête d’Henri IV, d’après une minutieuse analyse dirigée par Philippe Charlier. C’est la fin d’une étonnante histoire et qui tombe durant l’année du 400e anniversaire de sa mort. L’an prochain, le « Vert-Galant » aura droit à des funérailles.

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    Dix-neuf scientifiques se sont penchés cette année sur une tête : celle, présumée, du roi Henri IVHenri IV. Elle a bien appartenu au roi de France et de Navarre assassiné le 14 mai 1610 par le dénommé Ravaillac : c'est le verdict apparemment formel qui résulte d'une longue série d'analyses, coordonnées par Philippe Charlier, médecin légiste et spécialiste du genre, qui avait démontré en 2007 que les restes de Jeanne d’Arc conservés au château de Chinon étaient en fait ceux d'une momie égyptienne. La découverte vient d'être détaillée dans la revue British Medical Journal.

    Cette conclusion est la fin d'une longue histoire, dont le dernier chapitre est dû à l'opiniâtreté d'un journaliste, Stéphane Gabet, réalisateur de documentaires et qui s'intéressait au destin de cette tête à l'occasion de « l'Année Henri IV », pour le 400e anniversaire de sa mort.

    Le bon roi Henri avait une petite marque sur l'aile droite du nez, et le lobe de son oreille droite avait été percé, deux détails retrouvés sur la tête embaumée. © P. Charlier <em>et al.</em>/BMJ

    Le bon roi Henri avait une petite marque sur l'aile droite du nez, et le lobe de son oreille droite avait été percé, deux détails retrouvés sur la tête embaumée. © P. Charlier et al./BMJ

    Cette saga d'un crânecrâne commence au lendemain de la mort du roi, dont on savait qu'il avait été embaumé puis inhumé à la basilique de Saint-Denis, près de Paris. Mais en 1793, la foule envahit l'édifice et, comme d'autres monarques, le corps de celui que l'on appelait le « Vert-Galant » est exhumé, en excellent état de conservation. On jette la dépouille dans une fosse commune, non sans l'avoir, semble-t-il, découpée en morceaux. Un récit évoque un médecin subtilisant la tête.

    Une tête qui a roulé sa bosse

    On retrouve cette relique à l'Hôtel Drouot en 1919 : Joseph-Émile Bourdais, brocanteur, vient d'acquérir une tête momifiée censée être celle d'Henri IV. Il l'a payée trois francs, note le registre du jour. Toute sa vie, Bourdais tentera en vain de démontrer l'authenticité de sa relique. La difficile enquête du journaliste le met sur la piste d'un homme, qui s'est un jour renseigné sur cette tête auprès de la sœur du brocanteur. Il a aujourd'hui 84 ans et montre aux enquêteurs la tête qu'il conserve secrètement dans son grenier. Lui et sa femme n'en avaient jamais parlé à personne, pas même à leurs enfants...


    Un résumé vidéo des analyses effectuées sur la tête attribuée à Henri IV. © BFM TV, Youtube

    L'enquête scientifique, médicale et historique, peut alors commencer. Les premières investigations montrent que la tête, qui comporte encore des poils, est celle d'un homme âgé (le roi est décédé à 56 ans) mort entre 1450 et 1640 et qu'elle a été arrachée après le décès.

    L'anthropologue Jean-Noël Vignal réalise un portrait du visage, avec les techniques de la médecine légalemédecine légale. Les traits sont plus que ressemblants avec les portraits connus. Les chercheurs retrouvent la trace d'un grain de beautégrain de beauté sur l'aile droite du neznez et celle d'un coup de couteau sur la mâchoire supérieure, ce qui correspond à une tentative d'assassinat dont Henri IV a été victime en 1594.

    Inhumation en 2011

    L'enquête historique montrera ensuite que le roi avait demandé un « embaumement à l'italienne », ce qui permettra d'expliquer pourquoi le crâne ne porteporte aucune trace d'ouverture, comme cela se pratiquait en France à l'époque. Les Italiens, eux, procédaient sans ouvrir le crâne. Enfin, un portrait montrant une boucle d'oreille, retrouvé par Nicole Garnier-Pelle, conservatrice du musée Condé (Chantilly), explique le petit trou dans le lobe de l'oreille droite. D'autres indices sont là, comme la présence de plomb, semblable à celui retrouvé dans le cercueil. En revanche, malgré la présence de poils, l'analyse ADNADN n'a pu être conduite. Tous les résultats de ce travail sont détaillés dans le texte de l'article publié dans le British Medical Journal (Multidisciplinary medical identification of a French king’s head (Henri IV)), actuellement accessible librement, ou sous forme de son résumé.

    Le propriétaire de cette tête l'avait promis : si elle est bien celle du roi de Navarre, elle sera restituée à l'État. L'an prochain, elle sera de nouveau inhumée dans la basilique de Saint-Denis, soit le 14 mai, anniversaire de sa mort, ou le 1er juillet, jour de sa première inhumation.