Selon de nouveaux indices chimiques fiables, du vin serait produit en France depuis le Ve siècle avant J.-C. Des traces d’acide tartrique ont été découvertes sur un pressoir mis au jour sur le site archéologique de Lattara (Hérault). Les premiers plants de vigne pourraient avoir été apportés par des Étrusques, puisqu’ils commerçaient avec cette cité par voie maritime. Le vin français a donc des origines italiennes.

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    Par-delà les continents, la France est célèbre pour ses vins, mais elle ne peut se targuer d'avoir inventé la viticulture. En effet, cette activité a vu le jour au Moyen-Orient voilà près de 8.000 ans, avant de s'étendre progressivement vers l'ouest, arrivant en Égypte voilà 5.000 ans, puis en Crète il y a 4.200 ans. Un millénaire plus tard, c'est à partir de cette île qu'un important commerce du vin s'est développé en Méditerranée, à la faveur des marchands grecs et phéniciens, chacun ayant des amphores aux formes distinctes. Mais alors, depuis quand la viticulture s'est-elle développée en France ?

    De nombreuses hypothèses ont été émises à ce sujet, notamment car nous savons que les habitants de Massilia (aujourd'hui Marseille) distribuaient un vin local dans leurs propres amphores en 550 avant J.-C. Cependant, aucune preuve ne montre qu'il était produit sur place. En revanche, nous en sommes maintenant certains, du vin a été fabriqué sur le site archéologique de Lattara (aujourd'hui Lattes en Hérault) cinq siècles avant notre ère.

    Les preuves réunies par l'équipe de Patrick McGovern de l'université de Pennsylvanie à Philadelphia (États-Unis) sont solides, selon les arguments avancés dans la revue Pnas. Revenons sur la mise en place de cette première industrie des civilisations gauloises, à l'âge de fer.  

    Vue supérieure de la plateforme de pressage découverte à Lattara. Elle accueillait probablement des paniers emplis de raisins, qui étaient ensuite pressés. Le jus était alors récolté dans cette pierre, puis s'écoulait par la gouttière visible dans le bas de l'image. © Michel Py, Unité de fouilles et de recherches archéologiques de Lattes

    Vue supérieure de la plateforme de pressage découverte à Lattara. Elle accueillait probablement des paniers emplis de raisins, qui étaient ensuite pressés. Le jus était alors récolté dans cette pierre, puis s'écoulait par la gouttière visible dans le bas de l'image. © Michel Py, Unité de fouilles et de recherches archéologiques de Lattes

    Un commerce maritime du vin entre l’Étrurie et Lattara

    Pour parvenir à leurs fins, les chercheurs ont utilisé plusieurs techniques chimiques, pour rechercher des traces d'acide tartrique (le principal acide du vin provenant du raisinraisin) sur des restes d'amphores étrusques et massiliennes, ainsi que sur une pierre au design un peu particulier. Ils ont notamment eu recours à un spectromètre de masse et à infrarougeinfrarouge.

    Des traces de cet élément ont été découvertes sur des fragments de terre cuite datant de 500 à 475 avant notre ère, et issus d'amphores étrusques (probablement de la ville de Cisra, aujourd'hui Cerveteri). Leur présence témoigne d'un commerce maritime du vin entre le centre de l'Italie et la cité antique de Lattara. Des résidus de résine de pin et d'herbes aromatiquesaromatiques (romarinromarin, thym et basilicbasilic, entre autres) ont également été trouvés. Ces ingrédients pourraient avoir été utilisés pour agrémenter le goût du vin, pour mieux le conserver, ou pour lui donner des vertus médicinales.

    Le plus vieux site de production de vin français

    Datée de 425 à 400 avant J.C., la pierre calcairecalcaire, dont la forme rappelle des dispositifs de pressage représentés dans des gravuresgravures grecques, a également fourni de précieux indices. Depuis sa découverte, les archéologues pensaient qu'elle servait à extraire de l'huile d’olive, mais les résidus tartriques les ont contredits pour confirmer l'hypothèse d'une utilisation lors du pressage des raisins.

    Par ailleurs, des graines et des restes de peau de raisin ont été trouvés dans le voisinage de cette pierre. Ces indices botaniquesbotaniques et chimiques prouveraient bien qu'on produisait du vin à l'âge de fer à Lattara, qui devient ainsi le plus vieux site viticole français.

    Selon la chronologie des indices découverts, un marché maritime du vin devait exister entre l'Étrurie et le sud de la France voilà 2.500 ans. Il a dû susciter un intérêt croissant dans notre pays, au point de pousser les Étrusques à implanterimplanter des plants de vignes communes (Vitis vinifera)) à Lattara. Ainsi, nous devons notre maîtrise actuelle de la viticulture à l'Italie...